Évaluation et Rapport de situation du COSEPAC sur l'esturgeon à museau court (Acipenser brevirostrum) au Canada 2005


Les rapports de situation du COSEPAC sont des documents de travail servant à déterminer le statut des espèces sauvages que l’on croit en péril. On peut citer le présent rapport de la façon suivante :

COSEPAC. 2005. Évaluation et Rapport de situation du COSEPAC sur l’esturgeon à museau court (Acipenser brevirostrum) au Canada -Mise à jour. Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. Ottawa. vii + 35 p.

Rapport précédent :

Dadswell, M.J. 1980. COSEWIC status report on the shortnose sturgeon Acipenser brevirostrum in Canada. Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada. Ottawa. 18 p.

Note de production :

Le COSEPAC aimerait remercier Matthew K. Litvak qui a rédigé le rapport de situation sur l’esturgeon à museau court (Acipenser brevirostrum) au Canada, en vertu d’un contrat avec Environnement Canada. Robert Campbell, coprésident du Sous-comité de spécialistes des poissons d’eau douce du COSEPAC, a supervisé le présent rapport et en a fait la révision.

Also available in English under the title COSEWIC assessment and update status report on the shortnose sturgeon (Acipenser brevirostrum) in Canada.

Photo de la couverture :

Esturgeon à museau court – vue latérale d’une femelle reproductrice (longueur totale de 58 cm) du fleuve Hudson, NY (d’après Vladykov et Greeley, 1963).

©Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2005.

PDF : CW69-14/427-2005F-PDF

ISBN 0-662-74169-2

HTML : CW69-14/427-2005F-HTML

ISBN 0-662-74170-6

Nom commun : Esturgeon à museau court

Nom scientifique : Acipenser brevirostrum

Statut : Préoccupante

Justification de la désignation : Il s’agit d’une espèce anadrome limitée à un seul réseau hydrographique au Canada où le poisson frayant nécessite un accès libre aux frayères d’eau douce. Cependant, la population pourrait avoir été divisée depuis 1967 en raison du barrage de Mactaquac. Ce grand poisson à croissance lente et à maturation tardive est dépendant de mesures de conservation. Il existe certains risques de mortalité attribuables aux installations hydroélectriques, aux prises accessoires pendant les pêches au gaspareau et à l’alose ainsi qu’au braconnage. Toutefois, il n’existe aucune menace immédiate pouvant mener à l’élimination de la population dans une très courte période de temps.

Répartition : Nouveau-Brunswick

Historique du statut : Espèce désignée « préoccupante » en avril 1980. Réexamen et confirmation du statut en mai 2005. Dernière évaluation fondée sur une mise à jour d'un rapport de situation.

Taxinomie : classe des Actinoptérigiens; ordre des Acipensériformes; famille des Acipenséridés; genre Acipenser; espèce brevirostrum. Nom commun français : esturgeon à museau court; noms communs anglais : shortnose sturgeon, shortnosed sturgeon et little sturgeon. Nom malécite : buzgus. Description : corps allongé couvert de plaques osseuses et cylindrique au niveau de l’abdomen; queue hétérocerque (lobe supérieur plus long); nageoires paires rigides. La bouche est ventrale, inférieure et protractile (elle s’allonge en un tube). Quatre barbillons se trouvent à peu près à mi-chemin entre le bout du museau et la bouche.

Il existe 19 segments de population d’esturgeons à museau court le long de la côte Est de l’Amérique du Nord, du Nouveau-Brunswick à la Floride. La seule occurrence connue au Canada a été notée dans le réseau hydrographique de la rivière Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick.

L’esturgeon à museau court fraye dans les eaux vives sur fond de rochers et de gravier. Les adultes passent l’hiver dans des fosses profondes soumises aux marées du cours inférieur de la rivière. Les juvéniles sont mal connus; leur taille moyenne décroît vers l’amont, ce qui porte à croire que les jeunes individus fréquentent des habitats situés plus en amont que ceux des adultes.

La biologie de l’esturgeon à museau court est très peu connue. Il s’agit d’un poisson d’une grande longévité et à maturation tardive. D’après la documentation sur les captures, les plus vieux individus, mâle et femelle, étaient âgés respectivement de 32 et 67 ans, et le spécimen le plus lourd capturé dans la rivière Saint-Jean pesait 23,6 kg et sa longueur à la fourche (du bout du museau à la fourche de la queue) était de 122 cm. À longueur égale, les mâles sont généralement plus légers que les femelles. Le taux de croissance des adultes est de 490 à 540 g par année. Les mâles et les femelles atteignent la maturité sexuelle à 11 et à 13 ans, respectivement. Les femelles produisent jusqu’à 200 000 œufs démersaux et adhésifs tous les trois ans. La fraye a lieu de la mi-avril à juin. Le taux de survie aux stades précoces du cycle vital est considéré comme le facteur limitatif du recrutement.

Une population estimée à 18 000 adultes a été identifiée entre 1973 et 1977 dans la rivière Saint-Jean. On a estimé à 2 000 adultes l’effectif observé lors de travaux récents dans la rivière Kennebecassis, un affluent de la rivière Saint-Jean où se trouve un site d’hivernage. Cependant, aucune estimation récente ne couvre l’ensemble du bas-estuaire de la Saint-Jean. Le savoir autochtone permet de penser que la population connaît un déclin depuis l’érection du barrage Mactaquac en 1967.

Le barrage Mactaquac entrave la migration de fraye vers l’amont. Il régularise le débit et la température des eaux et influence ainsi la disponibilité et la qualité de l’habitat. Aucun mécanisme n’a été mis en place pour permettre à l’esturgeon à museau court de franchir le barrage. Le réseau hydrographique de la rivière Saint-Jean se trouve dans une région hautement développée où l’activité résidentielle et industrielle a des impacts sur la qualité de l’eau. À cause de sa grande longévité, de sa nature benthique et de sa consommation de proies vivant dans les sédiments, l’espèce est particulièrement vulnérable aux contaminants qui s’accumulent dans les sédiments et dans ses proies.

L’esturgeon à museau court est l’une des 24 espèces d’Acipenséridés survivantes dans le monde; toutes ces espèces sont considérées comme en péril, leur statut variant de vulnérable (vulnerable) à menacé d’extinction (endangered) selon l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources, ou Union mondiale pour la nature). L’esturgeon à museau court est l’une des cinq espèces d’esturgeons présentes au Canada, et il ne s’y trouve qu’en un seul endroit, soit la rivière Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick. L’espèce revêt une importante particulière pour les peuples des Premières Nations, et faisait l’objet d’une pêche commerciale avant qu’une réglementation sur la taille des prises ne soit adoptée.

L’esturgeon à museau court est désigné en péril (endangered) en vertu de la Endangered Species Act des États-Unis depuis mars 1967. L’espèce a été désignée préoccupante au Canada en 1980 (COSEPAC), mais aucun plan de rétablissement n’a été élaboré. Le ministère des Pêches et des Océans a formé une équipe de gestion de cette espèce. L’espèce est inscrite à la liste rouge de l’UICN depuis 1996, où elle a le statut d’espèce vulnérable, et figure à l’annexe 1 de la CITES.

Le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) a été créé en 1977, à la suite d’une recommandation faite en 1976 lors de la Conférence fédérale-provinciale sur la faune. Le Comité a été créé pour satisfaire au besoin d’une classification nationale des espèces sauvages en péril qui soit unique et officielle et qui repose sur un fondement scientifique solide. En 1978, le COSEPAC (alors appelé Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada) désignait ses premières espèces et produisait sa première liste des espèces en péril au Canada. En vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP) promulguée le 5 juin 2003, le COSEPAC est un comité consultatif qui doit faire en sorte que les espèces continuent d’être évaluées selon un processus scientifique rigoureux et indépendant.

Le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) évalue la situation, au niveau national, des espèces, des sous-espèces, des variétés ou d’autres unités désignables qui sont considérées comme étant en péril au Canada. Les désignations peuvent être attribuées aux espèces indigènes comprises dans les groupes taxinomiques suivants : mammifères, oiseaux, reptiles, amphibiens, poissons, arthropodes, mollusques, plantes vasculaires, mousses et lichens.

Le COSEPAC est composé de membres de chacun des organismes responsables des espèces sauvages des gouvernements provinciaux et territoriaux, de quatre organismes fédéraux (le Service canadien de la faune, l’Agence Parcs Canada, le ministère des Pêches et des Océans et le Partenariat fédéral d’information sur la biodiversité, présidé par le Musée canadien de la nature), de trois membres ne relevant pas de compétences, ainsi que des coprésident(e)s des sous-comités de spécialistes des espèces et des connaissances traditionnelles autochtones. Le Comité se réunit au moins une fois par année pour étudier les rapports de situation des espèces candidates.

* Appelée « espèce disparue du Canada » jusqu’en 2003.
** Appelée « espèce en danger de disparition » jusqu’en 2000.
*** Appelée « espèce rare » jusqu’en 1990, puis « espèce vulnérable » de 1990 à 1999.
**** Autrefois « aucune catégorie » ou « aucune désignation nécessaire ».
***** Catégorie « DSIDD » (données insuffisantes pour donner une désignation) jusqu’en 1994, puis « indéterminé » de 1994 à 1999.

Le Service canadien de la faune d’Environnement Canada assure un appui administratif et financier complet au Secrétariat du COSEPAC.

Le corps est allongé et cylindrique au niveau de l’abdomen et de la queue, mais légèrement déprimé dans la région antérieure à la ceinture scapulaire (figure 1). Ce poisson porte une imposante cuirasse composée de cinq rangées de plaques osseuses (scutelles ou boucliers), une bouche infère, large, allongée et protractile, quatre barbillons antérieurs à la bouche sur la face ventrale du rostre, de petits yeux et des évents. La tête est relativement courte et sa forme varie beaucoup d’un spécimen à l’autre et selon l’âge des individus; elle est plus proéminente chez les individus jeunes. Le pédoncule caudal est étroit et la nageoire dorsale est postérieure aux pelviennes paires. La nageoire caudale hétérocerque est composée d’un lobe supérieur long et proéminent et d’un lobe inférieur court et large. Les nageoires pectorales sont grandes et fixes. Le premier rayon de la nageoire pectorale est épais et ossifié. Le corps, dépourvu d’écailles, porte de minuscules denticules.

Figure 1. Esturgeon à museau court adulte, vue latérale

Le squelette est cartilagineux à l’exception des os du crâne, de la mâchoire et de la ceinture scapulaire. La notocorde est persistante (Schmitz, 1998). L’esturgeon à museau court porte une vessie natatoire jointe à l’œsophage (physostome), celui-ci étant musculaire et fonctionnant comme un jabot ou un gésier pour broyer les invertébrés. L’intestin comporte une valvule spirale semblable à celle des requins ou des raies (classe des Chondrichthyens) (Vladykov et Greeley, 1963).

L’espèce présente de 22 à 29 branchicténies sur le premier arc, de 38 à 42 rayons sur la nageoire caudale, de 19 à 22 rayons sur la nageoire dorsale, de 8 à 13 plaques osseuses dorsales, de 22 à 23 plaques latérales, de 7 à 11 plaques ventrales, au moins deux plaques entre la dorsale et le fulcre caudal, et généralement une ou deux rangées de plaques pré-anales (Vladykov et Greeley, 1963; Scott et Crossman, 1973).

La coloration varie; la face dorsale de la région céphalique présente généralement un motif tacheté foncé sur fond brun-olive ou vert. Les flancs pâlissent vers le ventre, qui est blanc (figure 1). Les plaques dorsales sont brun pâle. Les plaques latérales, ventrales et pré-anales ont une teinte jaunâtre. Le bord d’attaque des nageoires est plus pâle et parfois blanc.

L’espèce la plus souvent associée à l’esturgeon à museau court est l’esturgeon noir (Acipenser oxyrhynchus); c’est également le cas dans le réseau de la Saint-Jean. Les adultes matures se distinguent facilement par leur taille, car l’esturgeon noir est beaucoup plus grand et gros que l’esturgeon à museau court. Le plus gros esturgeon noir signalé a été capturé dans la rivière Saint-Jean; il mesurait 4,59 m et pesait 364,9 kg (Vladykov et Greeley, 1963). Lorsque l’on capture simultanément des esturgeons noirs juvéniles et des esturgeons à museau court juvéniles ou adultes de taille semblable, il est possible de distinguer les deux espèces en observant les caractéristiques suivantes : 1) le rostre (museau) de l’esturgeon noir juvénile est beaucoup plus long et effilé que celui de l’esturgeon à museau court (figure 2); 2) la taille relative de la bouche de l’esturgeon à museau court (>62 p. 100 de la largeur interorbitale) est plus grande que celle de l’esturgeon noir (<55 p. 100 de la largeur interorbitale) (figure 2); 3) la nageoire anale de l’esturgeon à museau court compte de 19 à 22 rayons, alors que celle de l’esturgeon noir en compte de 25 à 30; 4) la nageoire dorsale de l’esturgeon à museau court compte de 19 à 22 rayons, alors que celle de l’esturgeon noir en compte de 38 à 46 (Vladykov et Greeley, 1963; Scott et Crossman, 1973; Scott et Scott, 1990). Gorham et McAllister (1974) ont proposé de distinguer ces deux espèces par la présence de plaques osseuses au-dessus de la nageoire anale de l’esturgeon noir et par l’absence de celles-ci chez l’esturgeon à museau court. Cependant, ces plaques sont parfois absentes chez l’esturgeon noir et, par conséquent, cette méthode n’est pas recommandée. Chez les esturgeons noirs adultes, la pointe du museau tend à s’émousser; ainsi, avec l’âge, la forme de leur tête se rapproche de plus en plus de celle d’un esturgeon à museau court. Cela occasionne une certaine confusion chez les pêcheurs à la ligne, qui peuvent être portés à croire qu’ils ont pêché un gros esturgeon à museau court, alors qu’en fait ils ont pris un esturgeon noir de taille normale. Mais l’esturgeon noir est beaucoup plus volumineux que l’esturgeon à museau court, et on peut différencier les deux espèces par le décompte des rayons de nageoires.

Figure 2. Bouche d’un esturgeon à museau court juvénile (à gauche) et d’un esturgeon noir juvénile (à droite). La taille relative, par rapport à la largeur interorbitale, de la bouche de l’esturgeon à museau court est plus grande que celle de l’esturgeon noir.

Les larves d’esturgeon à museau court ont une longueur totale d’environ 7 à 11 mm à l’éclosion (Buckley et Kynard, 1981). Elles possèdent un grand sac vitellin (figure 3ab), ainsi qu’un bouchon vitellin dans la valvule spirale qui se détache lorsque l’animal commence à s’alimenter. On considère que l’espèce connaît un développement direct, c’est-à-dire sans métamorphose. Les individus prennent leur forme juvénile/adulte à une longueur totale d’environ 20 à 25 mm (Bain, 1997).

Figure 3. A) Larve d’esturgeon à museau court nouvellement éclose. B) Larve plus âgée portant un sac vitellin, où l’on voit clairement le bouchon vitellin dans la valvule spirale. Les divisions de la règle sont des millimètres.

La seule population d’esturgeons à museau court connue au Canada se trouve dans le réseau hydrographique de la rivière Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick.

Dix-neuf segments distincts de populations d’esturgeons à museau court ont été identifiés le long de la côte Est de l’Amérique du Nord (National Marine Fisheries Service, 1998), entre la Floride et le Nouveau-Brunswick (figure 4). La taille des populations varie de 100 adultes dans la rivière Merrimack, Massachusetts, à environ 38 000 individus dans le fleuve Hudson, New York (National Marine Fisheries Service, 1998; tableau 1).

Figure 4. Aire de répartition mondiale.

Au Canada, l’esturgeon à museau court n’est présent que dans le réseau hydrographique de la rivière Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, notamment dans la Kennebecasis, affluent de la rivière Saint-Jean (figure 5).

Tableau 1. Liste des segments de population identifiés par le National Marine Fisheries Service (1998)
Segments de population distincts Cours d'eau occupés par l’esturgeon à museau court
Saint-Jean Rivière Saint-Jean (Nouveau-Brunswick, Canada)
Penobscot Rivière Penobscot (Maine)
Réseau hydrographique de la Kennebec Rivières Sheepscot, Kennebec et Androscoggin (Maine)
Merrimack Rivière Merrimack (Massachusetts)
Connecticut Fleuve Connecticut (Massachusetts et Connecticut)
Hudson Fleuve Hudson (New York)
Delaware Fleuve Delaware (New Jersey, Delaware et Pennsylvanie)
Baie de Chesapeake Baie de Chesapeake, fleuve Potomac (Maryland et Virginie)
Cape Fear Rivière Cape Fear (Caroline du Nord)
Baie Winyah Rivières Waccamaw, Pee Dee et Black (Caroline du Sud et Caroline du Nord)
Santee Rivière Santee (Caroline du Sud)
Cooper Rivière Cooper (Caroline du Sud)
Réseau hydrographique « ACE » Rivières Ashepoo, Combahee et Edisto (Caroline du Sud)
Savannah Rivière Savannah (Caroline du Sud, Géorgie) et repeuplement
Ogeechee Rivière Ogeechee (Géorgie)
Altamaha Rivière Altamaha (Géorgie)
Satilla Rivière Satilla (Géorgie)
St. Marys Rivière St. Marys (Floride)
St. Johns Rivière St. Johns (Floride)

Figure 5. Bassin hydrographique du cours inférieur de la rivière Saint-Jean. RKM indique la distance, en kilomètres, de parcours jusqu’à l’embouchure.

L’esturgeon à museau court a été décrit comme anadrome (Kynard, 1997). Dans le sud de son aire de répartition, l’espèce est estuarienne et anadrome, mais vers le nord l’espèce est plutôt amphibiotique d’eau douce, résidant dans les estuaires plutôt qu’en haute mer (Kieffer et Kynard, 1993). Dans la rivière Saint-Jean, on trouve des adultes autant en eau douce que dans la zone subissant l’influence des marées (Dadswell, 1979; Dadswell, 1984; Dadswell et al., 1984). De rares spécimens ont été capturés le long de la côte (Dadswell et al., 1984). Les individus se limitent généralement aux segments d’eaux saumâtres ou douces de leurs rivières natales. Certains esturgeons à museau court peuvent vivre uniquement en eau douce; on pourrait donc en trouver en amont du barrage Mactaquac sur la rivière Saint-Jean au RKM 145 (RKM = distance, en kilomètres, de parcours jusqu’à l’embouchure). Cependant, aucune étude n’a été menée en vue de vérifier cette hypothèse ou de confirmer si un tel segment de population existerait encore. Les études de marquage et de pistage ultrasonique des déplacements de la population du cours inférieur de la rivière Saint-Jean indiquent que ces poissons demeurent dans la rivière où ils sont nés et dans l’estuaire (Dadswell, 1979; Litvak et collaborateurs [données inédites]). Ces résultats corroborent les études sur les populations américaines (Buckley et Kynard 1985; Hall et al., 1991; Kieffer et Kynard, 1993; O’Herron et al., 1993; Kynard, 1997).

L’habitat d’hivernage semble se situer soit dans des fosses profondes et salines (~10 ppt) du cours inférieur de la rivière Saint-Jean, soit plus en amont dans le cas des individus appelés à frayer le printemps suivant (Dadswell, 1979; voir ci-dessous la section sur la migration de fraye en plusieurs étapes). Ces sites d’amont demeurent sous l’influence des marées et conservent un degré de salinité notable, mais faible (~10 ppm). Kynard (1997) estime que les esturgeons à museau court adultes en phase de reproduction sont largement séparés des adultes qui ne fraieront pas le printemps suivant. Par contre, Litvak et collaborateurs (données inédites) ont observé, par marquage et pistage ultrasonique, qu’un grand nombre d’individus hivernant dans le cours inférieur de la rivière Saint-Jean entreprennent tout de même une migration de fraye au printemps.

On estime que la fraye a lieu dans des zones à fort débit (voir également la section Reproduction ci-dessous). Les frayères des populations américaines présentent les caractéristiques suivantes : vitesse de l’eau variant entre 0,4 et 1,0 m/s, substrat généralement composé de gravier et/ou de rochers et température entre 8 et 13 °C (Buckley et Kynard, 1985; Kieffer et Kynard, 1996; Kynard, 1997; National Marine Fisheries Service, 1998; Litvak et al., données inédites). Par contre, peu d’études ont porté sur l’habitat de fraye de la population de la rivière Saint-Jean, qui n’a pas été clairement identifié.

Dadswell (1979) rapporte que le plus jeune juvénile capturé dans la rivière Saint-Jean était âgé de deux ans. Aucune capture d’individu âgé de moins de deux ans n’a été signalée et, par conséquent, aucune information n’est disponible sur l’habitat des jeunes juvéniles dans la rivière Saint-Jean. Dadswell (1979) a capturé d’autres juvéniles plus âgés. Selon sa classification, les juvéniles sont les individus de moins de 45 cm de longueur à la fourche. D’après ses observations, la distribution de l’espèce dans l’habitat fluvial s’étend de Oak Point (RKM 36) à Fredericton (RKM 120), mais se concentre surtout entre Evandale (RKM 46) et Oromocto (RKM 105) (figure 5). La taille moyenne des juvéniles est plus petite dans le cours supérieur de la rivière qu’en aval (Dadswell, 1979). Selon Bain (1997), les juvéniles résident en amont du coin salé dans l’Hudson (New York).

La construction du barrage Mactaquac en 1967 a bloqué l’accès aux frayères en amont du barrage. Le développement urbain et les activités forestières, agricoles et industrielles contribuent à l’envasement et au déversement de polluants dans la rivière (voir la section Facteurs limitatifs et menaces). Malgré certaines tentatives pour atténuer les effets de ces activités sur l’accumulation de contaminants, la situation, dans le meilleur des cas, demeure stable, mais la tendance générale de l’habitat continue probablement d’être au déclin, bien qu’il n’existe aucune preuve documentaire sur les tendances de l’habitat. Dans le passé, des mortalités massives d’esturgeon et d’autres espèces ont été observées dans des zones eutrophes de l’estuaire étouffées par la végétation. On estime que ces événements étaient dus à une raréfaction de l’oxygène associée à la prolifération des végétaux en présence de concentrations élevées de nutriments (Dadswell et al., 1984).

En général, la qualité de l’eau de la rivière s’est améliorée au cours des 30 dernières années, grâce à des investissements dans le traitement des eaux par les industries et les municipalités riveraines (Fredericton Angler’s Club, 1994 et 1995; M. Toner, ministère des Ressources naturelles du Nouveau-Brunswick, Fredericton, N.-B., comm. pers., 2005).

La responsabilité de l’esturgeon à museau court revient au ministère des Pêches et des Océans. En vertu du Protocole d’entente Canada-Nouveau-Brunswick sur la pêche récréative, l’esturgeon demeure une responsabilité fédérale. Bien qu’aucune législation ne soit en place pour protéger l’habitat, une protection générale est garantie par l’intermédiaire des dispositions sur l’habitat de la Loi sur les pêches. Bien que la rivière soit un plan d’eau navigable et par conséquent de propriété publique, les terres qui la bordent sont principalement de propriété privée. Le MPO constitue depuis 2004 un groupe de travail sur la conservation des esturgeons des Maritimes, regroupant des représentants des gouvernements, des universités et des organisations non gouvernementales (ONG) de défense de l’environnement (R. Bradford, comm. pers.).

Un permis délivré en vertu du Règlement de pêche est obligatoire pour conserver un esturgeon à museau court, quel que soit le motif. Un permis est également nécessaire pour transférer un individu vers une installation d’élevage, pour relâcher un individu dans un habitat sauvage ou pour transporter un individu d’une province à l’autre.

Bien que les esturgeons soient menacés de disparition du pays et/ou d’extinction dans la plupart de leurs aires de répartition, leur biologie demeure très mal connue, et l’esturgeon à museau court ne fait pas exception. La première occurrence signalée de l’esturgeon à museau court dans la rivière Saint-Jean remonte à 1957 (Liem et Day, 1959). Avant son identification, il était capturé « involontairement » par les pêcheurs d’esturgeon de la rivière Saint-Jean et classifié comme un « esturgeon » dans les statistiques sur les pêches. Les travaux de Dadswell (1979) font autorité sur cette espèce depuis les années 1970. Les étudiants du professeur Litvak, à l’Université du Nouveau-Brunswick, campus de Saint-Jean, s’occupent actuellement de mettre à jour et d’enrichir cette information.

À l’instar des autres esturgeons, l’esturgeon à museau court jouit d’une grande longévité. L’individu le plus âgé capturé dans la rivière Saint-Jean était une femelle de 67 ans (Dadswell, 1979). L’âge des esturgeons est généralement mesurable par le décompte des anneaux de croissance de la section transversale du premier rayon « osseux » de la nageoire pectorale, qui sont translucides en hiver et opaques en été (Cuerrier, 1951). La détermination de l’âge des esturgeons, y compris l’esturgeon à museau court, est un aspect important de la gestion et de la protection de ces espèces; mais jusqu’à tout récemment, la technique d’âgeage nécessitait de tuer l’individu. Heureusement, une technique non destructrice a été développée (Collins et Smith, 1996), ce qui a permis de déterminer l’âge de représentants de la population actuelle de la rivière Saint-Jean (Crossman et Litvak, données inédites).

Le plus gros spécimen capturé dans la rivière Saint-Jean, avant ces récentes études, était une femelle de 23,6 kg d’une longueur à la fourche de 122 cm (Dadswell, 1979). Depuis, trois individus d’une longueur supérieure ont été capturés (Litvak, données inédites). Le ratio poids-longueur de la population n’a pas changé significativement en 25 ans. D’après Dadswell (1979) et les calcul récents de Litvak (données inédites), la relation entre le poids (W) et la longueur à la fourche (LF) est, respectivement : log10 W = 3,21 (log10 LF) – 5,45 (ddl=1, 2 889, p<0,0001, r2=0,99) et log10 W = 3,11 (log10 LF) – 5,36 (ddl=1, 858, p<0,0001, r2=0,87) (figure 6). Ces deux relations indiquent un rapport allométrique entre le poids et la longueur, c’est-à-dire que les individus de grande taille sont relativement plus lourds que les individus de petite taille.

Figure 6. Graphique du poids en fonction de la longueur (droite bleue) d’esturgeons à museau court capturés dans le cours inférieur de la rivière Saint-Jean en 1998-2002 avec limites de confiance de 95 p. 100 (droites noires). La droite rouge superposée représente cette même relation établie par Dadswell (1979) pour 1973-1977.

Dadswell (1979) n’a relevé aucune différence de poids entre les mâles et les femelles de longueur identique. Litvak (données inédites) a déterminé le sexe de 40 adultes, soit 14 femelles et 26 mâles. La relation entre le poids et la longueur a été employée pour déterminer si les individus présentaient un ratio poids-longueur comparable à celui de la population et pour vérifier l’existence d’un dimorphisme sexuel en termes de poids. Un test T des différences résiduelles par rapport à la fonction de régression poids-longueur a révélé qu’à longueur égale, les mâles sont significativement plus légers que les femelles (ddl=38; p<0,05). Aucun caractère externe ne semble avoir été identifié à ce jour pour différencier les sexes, mais l’esturgeon à museau court présente un dimorphisme sexuel en termes de poids. Cela donne à penser que l’espèce pourrait présenter d’autres caractères dimorphiques permettant de distinguer les sexes sur le terrain.

Dadswell (1979) a estimé le taux de croissance de 106 individus marqués et recapturés. Pendant la période de l’étude, les individus ont gagné 490 grammes par année (1,32 g/jour). Selon les travaux de Litvak (données inédites), les esturgeons à museau court capturés dans la rivière Saint-Jean (1998-2002) présentaient un gain de poids annuel moyen de 540 g (1,48 g par jour, ET +1,2), soit un taux de croissance spécifique quotidien (d’après Ricker, 1975) de 0,017 p. 100 ± 0,067. Les courbes de croissance de Von Bertalanffy, basées sur la longueur à la fourche et l’âge des adultes, ont été tracées pour les femelles et les mâles de la population de la rivière Saint-Jean : Wd (femelles)=24,8(1-e-0,042(t-0,8))3 et Wd (mâles)=13,9(1-e-0,063(t-0,51))3, respectivement (Dadswell, 1979).

La distribution de la longueur des individus capturés entre 1998 et 2002 (Litvak, données inédites) indique que la limite de taille des captures fixée à 122 cm (48 po) pour les individus présents dans le réseau hydrographique de la rivière doit être révisée, car certains individus dépassent cette taille (figure 7).

Figure 7. Distribution de fréquence de la longueur à la fourche d’esturgeons à museau court capturés dans la rivière Saint-Jean en 1998-2002. La limite de taille des captures est actuellement de 122 cm.

L’esturgeon à museau court est un poisson itéropare très fécond produisant un grand nombre d’œufs démersaux et adhésifs (de 27 000 à 208 000 œufs; Dadswell, 1979). La production d’œufs est directement proportionnelle à la taille de la femelle; chaque femelle produit en moyenne 11 600 œufs par kilogramme de poids corporel (Dadswell, 1979). Les œufs sont de couleur noire à brune et d’environ 3,5 mm de diamètre au moment de la ponte, puis atteignent un diamètre de 4 mm après la fécondation et l’adhésion au substrat (Kynard, 1997). On n’a signalé que des observations anecdotiques du comportement de fraye en captivité. La fraye n’a jamais été observée à l’état sauvage.

Deux études se sont penchées sur l’ultrastructure fine des spermatozoïdes de l’esturgeon à museau court (Dilauro et al., 1999 et 2000). Les auteurs ont employé la microscopie électronique à transmission pour décrire les spermatozoïdes de ce poisson. La cellule possède un acrosome, une région céphalique, un segment intermédiaire et un seul flagelle. La longueur du corps cellulaire est de 9,71 µm (acrosome + noyau + segment intermédiaire) et la longueur du flagelle est de 37 µm. À la lumière de cette description des spermatozoïdes, les auteurs ont conclu que l’esturgeon à museau court est plus étroitement apparenté à l’esturgeon blanc (A. transmontanus), à l’esturgeon jaune (A. fulvescens) et à l’esturgeon étoilé (A. stellatus) qu’à l’esturgeon noir (Dilauro et al., 1999 et 2000).

Brown et Litvak (2004) ont étudié le comportement et la motilité des spermatozoïdes des esturgeons à museau court et des esturgeons noirs. Les spermatozoïdes recueillis ont été activés et leurs mouvements, notamment la vitesse moyenne globale, la vitesse maximum moyenne, la linéarité de la trajectoire et la motilité, ont été observés et notés sur une période de cinq minutes. La vitesse moyenne globale (esturgeon à museau court = 212 µm s-1 et esturgeon noir = 137 µm s-1), ainsi que la vitesse maximum moyenne (esturgeon à museau court = 372 µm s-1 et esturgeon noir = 268 µm s-1) diffèrent considérablement entre les spermatozoïdes de ces deux espèces, tout comme leur motilité. La linéarité moyenne de leur trajectoire ne diffère pas significativement ni entre les deux espèces, ni dans le temps. Les spermatozoïdes de l’esturgeon à museau court conservent leur motilité plus longtemps que ceux de l’esturgeon noir. Ces observations apportent un éclairage nouveau à la capacité de fraye des esturgeons mâles; la promiscuité des mâles chez les esturgeons à museau court et noirs serait plus prononcée qu’on ne le croyait.

Les adultes reproducteurs de la rivière Saint-Jean, comme ceux d’autres populations, entreprennent une migration de fraye au printemps. Ces migrations commencent lorsque la température de l’eau atteint 8 ou 9 °C. Dadswell (1979) a été le premier à supposer que l’esturgeon à museau court fraierait entre Oak Point et Fredericton dans les rivières Saint-Jean et Kennebecasis. Cela a été corroboré par la capture de trois larves sur les hauts-fonds d’Oromocto au RKM 120 (Taubert et Dadswell, 1980). Par contre, on n’a trouvé ni œufs ni larves dans la rivière Kennebecasis. Dadswell (1984) a suggéré par la suite qu’un autre site de fraye devait se trouver entre Fredericton et le barrage Mactaquac. Kynard (1997) a avancé l’hypothèse que l’espèce se rend probablement au barrage Mactaquac ou près de celui-ci pour frayer, puisque presque toutes les autres populations d’esturgeons à museau court occupant de grandes rivières sur lesquelles un barrage a été érigé frayent près du premier ouvrage qui bloque le cours d'eau. Des études récentes par marquage sonique ont révélé la présence d’esturgeons à museau court jusqu’au pied du barrage Mactaquac (RKM 145; Litvak, données inédites), ce qui corrobore l’hypothèse de Kynard (1997). Ces individus, marqués l’automne précédent, avaient passé l’hiver dans la rivière Kennebecasis, un affluent du cours inférieur de la rivière Saint-Jean, puis migré rapidement vers l’amont au printemps. Entre 1998 et 2002, 14 larves ont été prises à cet endroit avec un filet bongo tracté et lesté. En 2003, à l’aide d’un système différent, on a capturé des centaines d’œufs et de larves à moins de cinq kilomètres du barrage (Litvak, données inédites). Dadswell (1979) a avancé l’hypothèse que l’esturgeon à museau court fraye de la mi-mai à la mi-juin. Litvak (données inédites), a utilisé l’étude de Hardy et Litvak (2004a) sur l’effet de la température sur la croissance de l’esturgeon à museau court pour prédire rétrospectivement les dates de l’éclosion des œufs et de la saison de reproduction. L’auteur a conclu que l’esturgeon à museau court, au cours des quatre années de l’étude, avait commencé à frayer plus tôt qu’on ne le croyait, soit en avril.

Les migrations précédant la fraye peuvent varier chez l’esturgeon à museau court (Kieffer et Kynard, 1993). Kieffer et Kynard (1993) proposent trois modèles : 1) une courte migration en une seule étape au printemps, quelques semaines seulement avant la fraye; 2) une longue migration en une seule étape à la fin de l’hiver et au début du printemps, avant la fraye; 3) une courte migration en deux étapes composée d’une longue migration d’automne pour se rapprocher de l’habitat de fraye avant l’hivernage, suivie d’une courte migration telle que décrite au point 1 (Kieffer et Kynard, 1993). Dadswell (1984) pense que l’esturgeon à museau court fraye dans des chenaux profonds et effectue une migration en deux étapes, selon le modèle 3. Au moyen de marques soniques, Litvak (données inédites), n’a observé que le modèle 2 chez l’espèce, mais cela peut être une caractéristique propre au segment de la population de la rivière Saint-Jean étudiée.

Dadswell (1979) est d’avis que les adultes demeurent en amont jusqu’à ce qu’une baisse de la température de 2 ou 3 °C en automne déclenche une avalaison. Kynard (1997) a observé pour sa part que les adultes se dispersent vers l’aval après la fraye. Litvak (données inédites) a observé que les géniteurs marqués emploient les deux stratégies dans la rivière Saint-Jean.

Le ratio femelles-mâles dans la rivière Saint-Jean est d’environ 2 pour 1 (Dadswell, 1979). Le plus vieux mâle capturé dans la rivière était âgé de 32 ans (Dadswell, 1979). Cette constatation, ainsi que le ratio des sexes de 1 pour 1 chez les juvéniles révélé par les échantillonnages, porte à croire que les mâles vivent moins longtemps que les femelles (Dadswell, 1979). Les mâles et les femelles atteignent la maturité sexuelle à 11 et à 13 ans en moyenne, respectivement, plus tard que dans les populations du sud; l’âge moyen des adultes est d’environ 21 ans (Dadswell, 1984). On dispose de peu d’information sur la périodicité de la fraye. On a avancé l’hypothèse que les femelles fraieraient moins fréquemment, soit une fois tous les trois à cinq ans, alors que les mâles fraieraient aux deux ans (Dadswell, 1979). Les populations plus méridionales tendent à frayer plus souvent (Dadswell et al., 1984). Les mâles de la rivière Saint-Jean en captivité ne produisent pas de sperme tous les ans (P. Soucy, Canadian Caviar, comm. pers., 2003).

Dadswell (1979) a avancé l’hypothèse qu’un tiers de la population femelle de la rivière Saint-Jean frayait chaque année et que 12 000 femelles produisaient en moyenne 94 000 œufs par individu, soit une production d’environ 3,76 x 109 œufs par année. Puisque la rivière compte moins de 20 000 adultes, ce nombre élevé d’œufs souligne l’importance de déterminer les facteurs qui influent sur la survie au début du cycle vital.

Les esturgeons ont un corps massif, une peau épaisse et résistante et des plaques osseuses qui les protègent des prédateurs aux stades juvénile et adulte. La mortalité aux premiers stades n’a pas été très étudiée chez l’esturgeon et demeure méconnue, mais il est probable que le facteur le plus déterminant est l’effectif des classes d’âge. De récentes analyses d’élasticité indiquent que chez trois espèces d’esturgeons de l’Amérique du Nord (noir, blanc et à museau court), c’est le taux de survie dans les premières années de développement qui induit la plus grande variabilité dans la dynamique des populations (Gross et al., 2002). Même si, tel que mentionné précédemment, 3,76 x 109 œufs sont produits annuellement, on ne capture que peu de juvéniles, ce qui indique que le principal facteur limitatif du recrutement intervient lors des premiers stades du développement.

Les œufs élevés en écloserie sont vulnérables aux infections fongiques (Litvak, obs. pers.). Ils doivent être enduits de terre à foulon pour éviter l’agglutination. Ils sont ensuite déposés dans des bocaux MacDonald à un débit de 3 l/min. Malgré ces précautions, les œufs sont tout de même infectés par des champignons. Par contre, peu de signes de champignons ont été observés lors des cueillettes d’œufs sur le terrain. Selon Kynard (1997), 8 p. 100 de la mortalité des œufs est attribuable à des infections fongiques dans la frayère du fleuve Connecticut.

L’inanition a été identifiée comme un déterminant important de la formation des classes d’âge chez de nombreuses espèces de poissons à sélection r. La survie et le recrutement des larves pourraient être déterminés par la correspondance spatio-temporelle des larves et de leur espace de prédation (l’hypothèse d’appariement-mésappariement de Cushing, 1972). Hardy (2000) a étudié la résistance à l’inanition de larves d’esturgeon à museau court et leur croissance en réponse à une interruption de l’alimentation. L’inanition a un effet sur la croissance et la survie, mais les larves peuvent atteindre un degré d’inanition élevé puis reprendre leur croissance et conserver un taux de survie élevé après avoir recommencé à s’alimenter. Le taux de croissance spécifique (poids sec) à la reprise de l’alimentation est le plus élevé chez les individus ayant été privés de nourriture le plus longtemps, ce qui permet de penser qu’il existe un mécanisme compensatoire déclenché par l’inanition. Un point de non-retour de 56 p. 100 est atteint à 41 jours après la fécondation, ce qui est long comparativement à bien d’autres espèces de poissons à sélection r. Ces études indiquent que l’inanition, intimement liée à la disponibilité de la nourriture, ne représenterait pas un déterminant majeur du taux de survie aux stades précoces du cycle vital. Les travaux de recherche à venir devraient donc se pencher sur la mortalité causée par la prédation.

Il est indispensable d’approfondir les connaissances sur la biologie et l’écologie des premiers stades du cycle vital des esturgeons pour pouvoir élaborer des stratégies de protection de ces espèces (Smith et al., 2002). Le faible taux de survie des esturgeons juvéniles pourrait affecter la vitalité à long terme des populations d’esturgeons et constituer un goulot d’étranglement du recrutement (Gross et al., 2002; Smith et al., 2002). Bien que les stades juvéniles du cycle vital des esturgeons soient d’une grande importance, leur biologie et leur écologie demeurent largement méconnues.

Le taux de croissance de l’esturgeon à museau court est inversement proportionnel à la latitude; les individus des populations septentrionales croissent plus lentement que leurs congénères méridionaux (National Marine Fisheries Service, 1998). Ce phénomène est lié à la température plutôt qu’à un caractère intrinsèque des populations. Hardy et Litvak (2004b) ont élevé des esturgeons à museau court et des esturgeons noirs à différentes températures (13, 15, 18 et 21 °C) post-éclosion et comparé le taux et l’efficacité d’absorption du vitellus, la longueur standard maximum, le taux de survie et le développement du réflexe de fuite. Les esturgeons noirs nouvellement éclos sont de plus petite taille, résorbent le sac vitellin (incorporation du vitellus dans les tissus corporels) de manière plus efficace et se développent plus rapidement que les esturgeons à museau court élevés à température égale (13 et 15 °C). Lorsque l’on compare les individus d’une même espèce, la diminution de la température retarde l’absorption du vitellus et le déclenchement du réflexe de fuite et prolonge le délai avant l’atteinte de la taille maximale et d’un taux mortalité de 100 p. 100. Par contre, l’efficacité d’absorption du vitellus et la taille des larves sont indépendantes de la température chez les deux espèces. Ces résultats indiquent que, même si la température influe sur le métabolisme pour accélérer le développement, ces deux espèces demeurent extrêmement efficaces pour transformer les nutriments du vitellus en tissus corporels. La moindre efficacité à ce chapitre des larves d’esturgeon à museau court pourrait être attribuable à une différence dans la qualité du vitellus entre les deux espèces ou à un rendement de conversion plus efficace chez l’esturgeon noir. La capacité de ces deux espèces à se développer entièrement et efficacement dans un vaste domaine de températures pourrait représenter un avantage compétitif sur d’autres espèces plus sténothermes et expliquer leur persistance au cours des âges.

Jarvis (2001) a étudié les effets de la salinité sur la croissance de l’esturgeon à museau court en aquaculture. Des juvéniles (poids moyen de 273 g) ont été élevés à quatre taux de salinité (0, 5, 10 et 20 ppm) pendant 10 semaines à 18 °C. Le gain de poids et l’indice de consommation ont diminué avec l’augmentation de la salinité. Les poissons élevés à zéro partie par millier ont gagné significativement plus de poids et présenté un indice de consommation plus élevé que tous les autres poissons. Les poissons élevés à 20 parties par millier ont eu la croissance la plus faible.

Kieffer et al. (2001) ont étudié la réponse physiologique à l’exercice de l’esturgeon noir et de l’esturgeon à museau court. Le taux de consommation d’oxygène et d’excrétion d’ammoniac a été mesuré chez les deux espèces, et une série de paramètres physiologiques musculaires (concentration de lactate, de glycogène, de pyruvate, de glucose et de phosphocréatine) et sanguins (osmolalité et concentration de lactate) ont été mesurés chez des esturgeons à museau court juvéniles après cinq minutes d’exercice intensif. Chez les deux espèces, le taux de consommation d’oxygène et d’excrétion d’ammoniac ont approximativement doublé après l’exercice intensif. Le taux de consommation d’oxygène post-exercice est revenu à la valeur de référence après 30 minutes chez les deux espèces d’esturgeons, mais le taux d’excrétion d’ammoniac post-exercice est demeuré élevé chez l’esturgeon noir pendant les quatre heures qu’a duré l’expérience. Les concentrations des métabolites énergétiques dans les muscles au repos chez l’esturgeon à museau court sont similaires à celles d’autres espèces de poissons, mais elles n’ont diminué que légèrement après une période d’exercice, et la récupération était complète au bout d’une heure. Au repos, la concentration musculaire de lactate est basse (<1 μmol/g) mais elle augmente à environ 6 μmol/g après l’exercice, puis revient au niveau de référence après six heures. Contrairement à d’autres espèces de poissons téléostéens qui subiraient un stress semblable, comme la truite arc-en-ciel (Oncorhynchus mykiss), la concentration plasmatique de lactate n’a pas augmenté considérablement et est revenue au niveau de référence après deux heures. L’osmolalité plasmatique n’a pas été affectée significativement par l’exercice chez l’esturgeon à museau court. Ces résultats, dans leur ensemble, indiquent que la réponse physiologique à l’exercice de l’esturgeon noir et de l’esturgeon à museau court est différente de la réponse typique des autres espèces de poissons. Il est possible que ces esturgeons possèdent des mécanismes comportementaux ou endocriniens différents de ceux des autres poissons, qui réduisent leur capacité de réponse physiologique à l’exercice.

Collins et al. (2000) ont avancé l’hypothèse que la détérioration de la qualité de l’eau affecte la production de juvéniles dans les aires d’alevinage et que le faible taux d’oxygène, en particulier dans ces aires, serait un facteur limitatif du recrutement. Mais les populations méridionales occupent des rivières chaudes et donc pauvres en oxygène; les conditions ne sont probablement pas aussi sévères au Canada. Secor et Nicklitschek (2001) ont suggéré que l’absence ou le déclin des populations d’esturgeon à museau court et d’esturgeon noir serait attribuable à la rareté de l’oxygène. Ils ont également avancé que le rétablissement apparent de l’esturgeon à museau court dans l’Hudson serait dû au retour à la normale du taux d’oxygène dans ce fleuve. Afin d’élucider la question dans le cas de la population d’esturgeons à museau court de la rivière Saint-Jean, le laboratoire de Kieffer à l’UNB étudie présentement les besoins en oxygène de l’espèce.

Les larves vésiculées d’esturgeon à museau court sont photophobes et recherchent le couvert (Kynard et Horgan, 2002). Les esturgeons à museau court des fleuves Hudson et Connecticut migrent sur une période de trois jours (Kynard et Horgan, 2002) après l’absorption du sac vitellin. Ces auteurs ajoutent que l’esturgeon à museau court pourrait entreprendre une migration en deux étapes lors des premiers stades de son cycle vital : 1) une brève période de déplacement larvaire actif/passif, puis 2) une migration active vers les aires de croissance en aval au début du stade juvénile.

Les esturgeons juvéniles se déplacent généralement vers l’amont en été et vers l’aval en automne et en hiver (Dadswell et al., 1984; Hall et al., 1991). Une étude de marquage et pistage ultrasonique dans la Savannah a démontré que l’esturgeon à museau court juvénile (<56 cm) connaît une migration d’été induite par la température de l’eau (Collins et al., 2000). Les individus se dirigent vers l’amont lorsque la température excède 22 °C et retournent vers le port de Savannah en aval lorsque la température tombe en deçà de ce seuil. Aucune migration nycthémérale n’a été observée lors de cette étude.

Déplacements des adultes à la lumière des études génétiques (voir la section Reproduction pour une discussion des migrations de fraye). Dadswell et al. (1984) et Kynard (1997) ont évoqué la possibilité que les adultes s’aventurent, bien qu’occasionnellement, hors de leurs rivières natales, et que ce comportement facilite le flux génique entre les populations. Bien que la probabilité d’émigration soit plus élevée chez les populations septentrionales, les échanges génétiques y sont considérés comme faibles comparativement à d’autres espèces « anadromes » (Grunwald et al., 2002; Quattro et al., 2002). Ces auteurs ont suggéré de gérer tous ces groupes comme des populations discrètes. Leurs données indiquent en outre que la population de la rivière Saint-Jean a été nettement isolée sur le plan reproducteur pendant une longue période, et pourrait donc être plus distincte sur le plan génétique par rapport à sa population voisine immédiate que ne le sont les deux populations situées aux extrémités de l’aire de répartition étatsunienne. Cela indique que la probabilité d’une immigration de source externe provenant de populations adjacentes est faible. Enfin, toutes les populations d’esturgeons à museau court dont la structure génétique a été étudiée par Grunwald et al. (2002) et Quattro et al. (2002) ne présentaient pas de goulot d’étranglement génétique.

Les esturgeons sont des poissons de fond qui s’alimentent par succion. Les esturgeons à museau court juvéniles se nourrissent principalement de crustacés et d’insectes, alors que les adultes dans l’estuaire de la rivière Saint-Jean consomment principalement des mollusques, en particulier la mye, Mya arenaria (Dadswell, 1979; Pottle et Dadswell, 1979; Dadswell et al., 1984).

Il est possible que les esturgeons à museau court et les esturgeons noirs, surtout les juvéniles, entrent en compétition pour la nourriture (Bain, 1997). L’analyse du contenu de l’intestin d’esturgeons à museau court et d’esturgeons noirs juvéniles capturés dans le réseau hydrographique de la rivière Saint-Jean par Pottle et Dadswell (1979) révèle la présence de proies communes dans l’œsophage des deux espèces. Ces deux poissons sont sympatriques dans la plus grande partie de leur aire de répartition, et on croit que les juvéniles fréquentent les mêmes habitats. Cependant, jusqu’à tout récemment, peu de recherches avaient été menées sur leurs relations interspécifiques potentielles (voir la section Comportement et adaptabilité ci-dessous), et on ne disposait que d’observations anecdotiques suggérant la formation d’une hiérarchie de dominance (Kynard et Horgan, 2002). Les différences entre les deux espèces pourraient affecter leur répartition et leur utilisation des ressources alimentaires dans la nature.

S’il est vrai que la compétitivité varie au sein d’une espèce et d’une espèce à l’autre, la croissance pourrait être affectée lorsqu’une espèce ou des individus plus agressifs prennent le contrôle d’une part grandissante des ressources alimentaires disponibles (Beacham, 1993; Cutts et al., 1998; McCarthy, 2001). Giberson (2004) a démontré que lorsque des esturgeons à museau court et des esturgeons noirs juvéniles sont élevés ensemble, la recherche de nourriture et le taux de croissance diminuent chez l’esturgeon à museau court. Giberson (2004) a comparé l’effet de l’abondance de la nourriture sur le taux de croissance et le changement du coefficient de variation (CV) du poids d’esturgeons noirs et d’esturgeons à museau court juvéniles élevés ensemble et séparément. Dix-huit groupes de quatre esturgeons, composés soit d’une seule espèce (groupes monospécifiques), soit des deux espèces (groupes mixtes), ont été placés dans autant de cages flottantes. Les cages ont été sélectionnées au hasard pour que la nourriture y soit abondante (3 p. 100 du poids corporel par jour [PC/j]) ou rare (1 p. 100 du PC/j). Les esturgeons noirs dans les groupes mixtes et monospécifiques ont présenté un taux de croissance spécifique quotidien significativement supérieur à celui des esturgeons à museau court, aux deux niveaux d’abondance de nourriture. Les esturgeons à museau court dans les groupes mixtes ont présenté un taux de croissance significativement inférieur à celui de leurs congénères dans les groupes monospécifiques, aux deux niveaux d’abondance de nourriture. Le taux de croissance des esturgeons noirs n’a pas été affecté par la présence d’esturgeons à museau court, aux deux niveaux d’abondance de nourriture. Le changement du CV du poids a été significativement affecté par l’espèce, l’abondance de nourriture (1 p. 100 ou 3 p. 100 PC/j) et la composition du groupe (mixte ou monospécifique). Dans les groupes mixtes, les esturgeons à museau court et les esturgeons noirs nourris à 1 p. 100 PC/j ont présenté un plus grand changement de CV que les individus des groupes monospécifiques nourris à 3 p. 100 PC/j. Ces résultats indiquent que l’esturgeon noir, un compétiteur en apparence supérieur, pourrait exercer une pression sur l’esturgeon à museau court dans les situations où l’habitat ou la nourriture sont limités.

Bien que les esturgeons soient l’un des groupes de poissons à nageoires rayonnées les plus primitifs (Bemis et al., 1997), ils disposent probablement d’un système d’interactions et de comportements sociaux plus complexe qu’on ne le croyait auparavant. Le stade juvénile du cycle vital des esturgeons est particulièrement important, car le taux de survie à ce stade affecte directement le taux de recrutement de la population adulte (Gross et al., 2002; Smith et al., 2002). Par conséquent, comme on l’a vu dans la section précédente, il est important de savoir si les esturgeons à museau court et les esturgeons noirs se partagent des ressources et, le cas échéant, de quelle manière. Giberson (2004) a formé des paires composées d’un esturgeon à museau court et d’un esturgeon noir dans une expérience de compétitivité. L’auteur a observé que les esturgeons noirs entreprennent la recherche de nourriture les premiers et initient plus d’événements de recherche de nourriture. Même lorsqu’ils sont appariés avec un esturgeon à museau court de plus grande taille, les esturgeons noirs commencent à chercher de la nourriture les premiers et de manière plus active.

Les esturgeons à museau court semblent être des poissons sociaux. Ils se rassemblent en bancs quelques jours après l’éclosion (Litvak, obs. pers.). Ce comportement grégaire ne s’observe que là où l’eau circule; les larves forment alors des bancs serrés mais bien espacés pour nager à contre-courant. Ces bancs se dissipent lorsque le courant cesse. Des observations en plongée autonome semblent indiquer que les adultes à l’état sauvage se tiennent également en bancs (Levi Sabatis, Première Nation Oromocto, comm. pers.).

Certains autres indices fort concluants, quoique inusités, semblent indiquer que les esturgeons à museau court adultes sont extrêmement sociaux et pourraient même former des paires. Dadswell (1979) a fait l’intéressante observation que, lorsque des groupes de poissons marqués sont repris au filet maillant, les individus sont souvent recapturés avec d’autres poissons dans le même ordre que lors de la capture initiale. La probabilité que des paires de poissons soient recapturées ensemble et retirées du filet maillant dans le même ordre par hasard est extrêmement faible. Les étudiants du laboratoire de Litvak ont fait la même observation.

Comme il est mentionné précédemment, il est important de connaître les mécanismes de partage des ressources entre les esturgeons noirs et les esturgeons à museau court. On considérait généralement que les esturgeons à museau court et les esturgeons noirs se partageaient les ressources selon leur préférence de salinité des eaux (National Marine Fisheries Service, 1998). Cependant, Giberson (1999) a fabriqué un canal inclinable pour offrir aux esturgeons un choix de différents débits. Dans tous les cas, les esturgeons à museau court ont choisi de nager dans des eaux à plus fort débit que les esturgeons noirs. Cela indique que, même si les deux espèces semblent se partager les ressources en privilégiant des habitats de salinité légèrement différente, ce choix pourrait être autant motivé par une prédilection pour le débit.

Ces poissons sont relativement faciles à élever en laboratoire et seraient d’excellents candidats à une réintroduction, au besoin. Un stock de géniteurs peut être manipulé par injection d’hormones (LHRHa) pour produire des gamètes (Conte et al., 1988). Les œufs fécondés sont incubés dans des bocaux MacDonald jusqu’à l’éclosion. Le taux de survie normal du stade d’œuf au stade juvénile en laboratoire est de plus de 70 p. 100 (Litvak, données inédites), et les larves sont faciles à sevrer avec des préparations alimentaires. L’espèce semble assez facile à élever en captivité, mais le succès final que connaîtrait un programme de reproduction en captivité est inconnu.

Deux estimations de la population de la rivière Saint-Jean ont été effectuées, toutes deux en aval du barrage Mactaquac; une partie importante de la rivière en amont du barrage n’a pas été étudiée. Dadswell (1979) a estimé la population adulte à 18 000 individus (±30 p. 100) dans le cours inférieur de la rivière Saint-Jean entre 1973 et 1977. Litvak et ses collaborateurs mènent actuellement une estimation de la population (depuis 1998) qui porte surtout sur la rivière Kennebecasis. À l’aide de la technique d’estimation de la population ouverte de Jolly-Seber (Krebs, 1999) ils ont dénombré 2 068 individus, ou entre 11 277 et 801 individus avec des limites de confiance supérieure et inférieure de 95 p. 100, dans cet affluent de la rivière Saint-Jean (Litvak, données inédites). Le taux de survie estimé (soit f, le rapport entre le nombre d’individus marqués au début de l’échantillonnage t+1 et le nombre d’individus marqués à la fin de l’échantillonnage t) de cette population est de 0,05 (Litvak, données inédites). Le taux de survie comprend une correction pour toutes les mortalités accidentelles et les prises au temps t. Les émigrations sont comptées comme des morts. Le taux de dilution (l), une estimation du taux d’ajout de la population, a été estimé à 6,3. Ce taux de dilution comprend les ajouts par les naissances et par l’immigration. Un taux minimum de dilution de 1,0 signifie que la population ne connaît aucun ajout. Les estimations préliminaires indiquent que la population de la rivière Kennebecasis est hautement variable. Cela peut être dû à l’immigration et à l’émigration associées aux autres affluents de la rivière Saint-Jean. À l’heure actuelle, il est impossible de comparer ces données aux estimations de Dadswell (1979) et de Krebs (1999) en raison de différences dans la méthodologie, la période et l’emplacement des relevés, mais Litvak et ses collaborateurs mènent actuellement des études dont la méthodologie sera uniforme dans tous les affluents pour mieux déterminer les tendances des populations.

D’après les renseignements anecdotiques recueillis et les observations personnelles d’anciens de la Première Nation Oromocto, les représentants de l’équipe technique des pêches de la Première Nation Oromocto (Levi Sabattis, Harold Paul et Brian Paul) signalent que les anciens s’entendent sur le fait que l’abondance d’esturgeons à museau court a diminué au cours des trente dernières années. Ils associent ce déclin à la présence du barrage Mactaquac. Cependant, on ne dispose d’aucune donnée solide pour dégager une quelconque tendance.

Un ascenseur à poissons a été installé près du barrage Mactaquac dès sa construction en 1967. On n’a jamais capturé d’esturgeon à museau court dans ce dispositif, car son point d’entrée n’atteint qu’une profondeur de 1,8 m à un endroit où le fond est à 12,8 m (Rod Price, chargé de projet à la passe à poissons Mactaquac).

Aucune information sur la présence et/ou l’absence de l’esturgeon à museau court en amont du barrage Mactaquac n’est actuellement disponible.

Il n’y a aucune pêche commerciale d’esturgeon à museau court. Seuls les spécimens de plus de 122 cm (48 po) peuvent être conservés par les pêcheurs récréatifs (lignes directrices sur la pêche du ministère des Ressources naturelles et de l’Environnement). Cependant, des prises accessoires par des pêcheurs d’autres espèces anadromes sur la côte Est et du braconnage ciblé ont probablement lieu dans l’ensemble de son aire de répartition (Dadswell, 1979; Collins et al., 1996; Kynard, 1997). L’ampleur de la pêche et des marchés illégaux est inconnue, mais on croit qu’elle est importante (NatureServe, 2004).

Dans la rivière Saint-Jean, l’esturgeon à museau court est capturé accessoirement par les pêcheurs commerciaux de gaspareau (Alosa pseudoharengus) et d’alose (A. sapidissima) (Litvak, obs. pers.). La plupart du temps, les esturgeons sont relâchés indemnes. Cependant, ils sont hautement vulnérables à la capture lors de leur migration de fraye du printemps, qui coïncide avec les déplacements du gaspareau. Certains indices suggèrent que la capture avec remise à l'eau durant la migration génésique pourrait interrompre la fraye et provoquer l’abandon de la migration (National Marine Fisheries Service, 1998).

À ce jour, peu de recherches ont étudié les effets des contaminants sur l’esturgeon à museau court, et aucune n’a été menée sur la population de la rivière Saint-Jean. Étant donné que l’espèce vit très longtemps et se nourrit d’animaux benthiques, elle est un candidat idéal à la bioaccumulation de métaux lourds et d’autres substances toxiques (Dadswell, 1979). Kocan et al. (1993) ont étudié les effets du lixiviat de goudron de houille (HAP) sur le développement des embryons et des larves. L’exposition à cette substance s’est traduite par un taux de mortalité extrêmement élevé après 18 jours.

Quatre barrages se dressent sur la rivière Saint-Jean : Grand-Sault, Tobique, Beechwood et Mactaquac. L’érection de barrages sur les grands cours d'eau d’Amérique du Nord a eu des effets dévastateurs pour les espèces anadromes. Les barrages hydroélectriques peuvent restreindre l’habitat de l’esturgeon à museau court en altérant le débit de la rivière et/ou la température de l’eau dans les zones de fraye et d’incubation des œufs (National Marine Fisheries Service, 1998). Des barrages bloquent le passage vers l’amont à presque toutes les populations d’esturgeons à museau court, et confinent par conséquent la fraye aux eaux d’aval (Kynard, 1997). Les poissons aux premiers stades du cycle vital sont donc vulnérables à la régularisation des eaux exercée par les barrages. Par contre, aucune donnée historique ne fait état de la présence de l’esturgeon à museau court en amont du barrage Mactaquac, et aucune étude sur les effets du barrage sur la fraye en aval du barrage n’a été menée, bien que les modifications de débit et de température puissent nuire au développement de l’esturgeon à museau court.

Des activités industrielles ont cours le long de la rivière Saint-Jean. On y trouve une grande industrie forestière comptant cinq usines de pâtes et papiers. La vallée de la rivière Saint-Jean accueille l’une des industries agricoles les plus productives du Canada maritime, comptant notamment quatre usines de transformation de pommes de terre. Les eaux d’égout brutes des villes, notamment Saint-Jean, s’écoulent directement dans la rivière. Les usines de pâtes et papiers, l’agriculture et la foresterie contribuent directement ou indirectement au déversement de contaminants dans la rivière, et un rejet accidentel de substances toxiques ou d’autres polluants pourrait avoir des conséquences désastreuses pour la seule population d’esturgeons à museau court du Canada. On sait que la baisse de la concentration d’oxygène est causée par l’eutrophisation liée aux usines de pâtes et papiers, à la sylviculture, à l’agriculture et aux rejets d’égouts (Dadswell et al., 1984; NatureServe, 2004). La hausse de la température de l’eau en été exacerbe la situation en diminuant la concentration d’oxygène dissous dans l’eau.

Quoique l’on décrive la rivière Saint-Jean comme « hautement industrialisée et urbanisée », ceci doit être relativisé à l’échelle du Nouveau-Brunswick : le bassin versant de la rivière est en grande majorité couvert de forêts. Trois villes se trouvent sur le cours de la rivière Saint-Jean : Fredericton, soit 80 000 habitants, Saint-Jean (autour de l’embouchure de la rivière, plutôt que sur la rivière elle-même), soit environ 125 000 habitants, et Edmunston, soit un peu plus de 20 000 habitants. De nombreuses petites municipalités bordent également la rivière, mais toutes possèdent aujourd’hui un système de traitement des eaux usées. Les usines de traitement ont des déversoirs de trop-plein, mais ceux-ci ont rarement été utilisés. Un certain pourcentage des eaux usées de la municipalité de Saint-Jean est déversé dans l’embouchure de l’estuaire sans avoir été traité, mais la situation s’est améliorée au cours des dernières années (M. Toner, comm. pers., 2005).

L’introduction accidentelle d’espèces exotiques comme l’esturgeon blanc (Acipenser transmontanus) ou l’esturgeon jaune (Acipenser fulvescens) par des aquariophiles ou des aquaculteurs pourrait constituer une menace pour la population existante (NatureServe, 2004). L’introduction de maladies par l’aquaculture est également une menace potentielle.

L’esturgeon à museau court est l’une des 24 espèces d’Acipenséridés survivantes; toutes sont inscrites par l’UICN dans des catégories de risque allant de vulnérable à en danger. C’est l’une des cinq espèces d’esturgeons présentes au Canada. La population de la rivière Saint-Jean représente la seule occurrence de l’esturgeon à museau court au Canada et la population la plus septentrionale de l’espèce. Elle a été exploitée commercialement, mais est aujourd’hui protégée par une limite de taille des prises visant tous les esturgeons de cette rivière; tous les individus de moins de 122 cm (48 po) doivent être relâchés. Elle est considérée comme une population distincte (Grunwald et al., 2002; Quattro et al., 2002).

L’esturgeon à museau court est désigné en péril (« Endangered ») en vertu de l’Endangered Species Act des États-Unis depuis mars 1967. Le National Marine Fisheries Service a élaboré un plan de rétablissement définitif pour les États-Unis en 1998. L’espèce a été désignée préoccupante au Canada en 1980, mais aucune équipe de rétablissement n’a été constituée. Le MPO forme actuellement un groupe de travail sur la conservation des esturgeons dans les Maritimes regroupant des représentants des gouvernements, des universités et des ONG de défense de l’environnement (Rod Bradford, MPO, comm. pers.). L’espèce est inscrite sur la liste rouge de l’UICN depuis 1996, où elle a le statut d’espèce vulnérable pour les raisons suivantes : 1) elle a connu une détérioration de sa zone d’occupation, de sa zone d’occurrence et/ou de la qualité de son habitat; 2) elle est gravement fragmentée; 3) on note un déclin continu de son aire de répartition, de sa zone d’occurrence et/ou de la qualité de son habitat ainsi que du nombre de sites ou de sous-populations. L’espèce est inscrite à l’annexe 1 de la CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction) et à l’annexe 1 de la WAPPRIITA (Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales et la réglementation de leur commerce international et interprovincial), qui encadre le commerce interprovincial de tout produit de l’espèce. Elle est également protégée par une limite inférieure de longueur à la fourche fixée à 122 cm (48 po) pour la pêche récréative dans la rivière Saint-Jean. Cela correspond à la longueur du plus grand spécimen documenté (122 cm), ce qui signifie en pratique qu’aucun esturgeon à museau court ne peut être capturé ni par les pêcheurs récréatifs, ni par les pêcheurs commerciaux. De plus, pour conserver un esturgeon à museau court, une personne doit posséder un permis délivré en vertu du Règlement de pêche (Dispositions générales) à des fins scientifiques, éducatives, de recherche ou d’exposition au public (ce sont les seuls cas où le prélèvement d’un esturgeon à museau court est permise). Un permis en vertu du même Règlement de pêche est également nécessaire pour transférer un esturgeon à museau court vers une pisciculture, pour relâcher un individu dans un habitat sauvage ou pour transporter un individu d’une province à l’autre.

Les classements NatureServe sont : cote mondiale (« GRank ») de G3 (localement dans une aire de répartition restreinte) et cote du N.-B.SRank.NB ») de S2 (rare dans l’ensemble de l’aire de répartition dans la province ou menacé de disparition en raison de sa rareté ou d’autres facteurs [NatureServe, 2004]).

Esturgeon à museau court – Shortnose Sturgeon

Répartition au Canada : rivière Saint Jean, Nouveau-Brunswick

s.o.

Classification selon Nature Conservancy (Natureserve 2004)

Nationale
Régionale

U.S. Endangered Species Act -- Espèce désignée en voie de disparition en 1967.

AFS -- Désignée menacée en 1989

UICN -- Vulnérable

CITES -- Annexe I

Les espèces sauvages 2000

(Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril -- 2001)

COSEPAC-- Espèce préoccupante, 1980, 2005.

Statut : Préoccupante

Code alphanumérique :Correspond au critère de la catégorie « menacée » D2, mais est désignée « préoccupante », car il n’y a pas de menace immédiate.

Justification de la désignation : Il s’agit d’une espèce anadrome limitée à un seul réseau hydrographique au Canada où le poisson frayant nécessite un accès libre aux frayères d’eau douce. Cependant, la population pourrait avoir été divisée depuis 1967 en raison du barrage de Mactaquac. Ce grand poisson à croissance lente et à maturation tardive est dépendant de mesures de conservation. Il existe certains risques de mortalité attribuables aux installations hydroélectriques, aux prises accessoires pendant les pêches au gaspareau et à l’alose ainsi qu’au braconnage. Toutefois, il n’existe aucune menace immédiate pouvant mener à l’élimination de la population dans une très courte période de temps.

Critère A (Population globale en déclin) : Sans objet, car le déclin en évidence est équivoque et n’est pas quantifié.

Critère B (Petite aire de répartition, et déclin ou fluctuation) : Sans objet, même si la superficie de la zone d’occupation est inférieure à 500 km² et que l’espèce est connue seulement dans un emplacement au Canada, il n’existe aucune évidence de déclin continu ou de fluctuations extrêmes de la zone d’occupation, de l’étendue ou de la qualité de l’habitat, ou du nombre d’individus matures.

Critère C (Petite population globale et déclin) : Sans objet, l’espèce peut être qualifiée menacée sous C, seulement si l’on tient compte des femelles qui fraient et qu’il y a évidence de déclin antérieur associé à la perte de l’habitat. Toutefois, il n’existe aucune évidence appuyant un déclin continu de plus de 10 % pour les trois générations suivantes. La population pourrait avoir été divisée depuis 1967 en raison de la construction du barrage de Mactaquac.

Critère D (Très petite population ou aire de répartition limitée) : correspond au critère de la catégorie D2, population présente dans un emplacement et dans une rivière seulement.

Critère E (Analyse quantitative) : sans objet, aucune donnée d’analyse.

* Le COSEPAC a demandé une réévaluation d’ici 5 ans.

Nous remercieons Ryan Hardy, Alisha Giberson, Mike Browne, Jamie Crossman et Xinhai Li pour leur travail exceptionnel sur cette espèce. Nous remercieons également les examinateurs du COSEPAC pour leur assistance. Et enfin, nous remercieons de leur soutien les agences de financement suivantes : FEE/WWF Canada, CRSNG et Fonds de fiducie de la Faune du Nouveau-Brunswick.

Le financement pour la préparation du présent rapport de situation a été fourni par le Service canadien de la faune d’Environnement Canada.

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Matthew K. Litvak est titulaire d’un baccalauréat ès sciences de l’Université York (1981) et d’une maîtrise ès sciences et d’un doctorat de la University of Toronto, (1984 et 1990). Il est actuellement professeur de biologie à l’Université du Nouveau-Brunswick, campus Saint-Jean. Avec l’assistance de ses étudiants des cycles supérieurs et de premier cycle, il étudie l’écologie de l’esturgeon à museau court depuis 1998. Son laboratoire fut le premier au Canada à élever en captivité avec succès des larves d’esturgeons à museau court et d’esturgeons noirs.

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