Coast manroot (Marah oreganus) évaluation et rapport de situation du COSEPAC 2009

Table des matières

Liste des figures

Liste des tableaux

Information sur le document

Marah d’Orégon Marah oreganus

[métadonnées pour l’illustration de la page couverture].

En voie de disparition - 2009

COSEPAC – Comité sur la situation des espèces en péril au Canada

Les rapports de situation du COSEPAC sont des documents de travail servant à déterminer le statut des espèces sauvages que l’on croit en péril. On peut citer le présent rapport de la façon suivante :

COSEPAC. 2009. Évaluation et Rapport de situation du COSEPAC sur le marah d’Orégon (Marah oreganus)au Canada. Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. Ottawa. vi + 30 p.

Note de production :
Le COSEPAC remercie Marta Donovan et Matt Fairbarns qui ont rédigé le rapport de situation sur le Marah d’Orégon (Marah oreganus) au Canada. Le COSEPAC remercie également le Centre de données sur la conservation (Conservation Data Centre) de la Colombie–Britannique qui a fourni le financement pour la préparation du présent rapport. Erich Haber, coprésident du Sous–comité de spécialistes des plantes vasculaires du COSEPAC, a supervisé le présent rapport et en a fait la révision, avec la participation des membres du COSEPAC. Cette révision peut avoir entraîné des modifications et des ajouts à la version initiale du rapport.

Pour obtenir des exemplaires supplémentaires, s’adresser au :

Secrétariat du COSEPAC
a/s Service canadien de la faune
Environnement Canada
Ottawa (Ontario)
K1A 0H3

Tél. : 819–953–3215
Téléc. : 819–994–3684
Courriel
Site Web

Also available in English under the title COSEWIC Assessment and Status Report on the Coast Manroot Marah oreganus in Canada.

Illustration/photo de la couverture :
Marah d’Orégon -- Photo par Matt Fairbarns.

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2010.
No de catalogue CW69–14/595–2010F–PDF
ISBN 978–1–100–94001–4

COSEPAC - Sommaire de l’évaluation

Sommaire de l’évaluation – Novembre 2009

Nom commun
Marah d’Orégon

Nom scientifique
Marah oreganus

Statut
En voie de disparition

Justification de la désignation
Il s’agit d’une vigne vivace longévive qu’on ne trouve qu’à trois localités largement éloignées les unes des autres dans le sud est de l’île de Vancouver et dans des îles Gulf adjacentes. Il reste moins de 20 individus matures, et rien n’indique une production de semences. Des pertes d’habitat, de populations et d’individus matures sont prévues dans l'aire de répartition canadienne. Les principales menaces sont le développement des quelques sites connus, les espèces exotiques et les événements fortuits touchant les quelques individus restants.

Répartition
Colombie–Britannique

Historique du statut
Espèce désignée « en voie de disparition » en novembre 2009.

COSEPAC - Résumé

Marah d’Orégon Marah oreganus

Information sur l’espèce

Le marah d’Orégon (Marah oreganus) est une vivace grimpante de grande taille de la famille des Cucurbitacées. Chaque année, la racine, grosse et ligneuse, donne naissance à des tiges aériennes rampantes munies de vrilles ramifiées. Les feuilles sont alternes, pétiolées, longues d’environ 20 cm et irrégulièrement palmées–lobées. La plante est monoïque, produisant des fleurs unisexuées blanchâtres. Les fleurs mâles sont réunies en grappe à l’aisselle des feuilles. Elles sont pédicellées, et leur périanthe, en forme de cloche, est généralement formé de cinq pièces. Les fleurs femelles sont isolées, pédicellées et également portées à l’aisselle des feuilles. Elles se distinguent par un renflement à la base. L’ovaire se développe pour donner un fruit épineux renfermant plusieurs grosses graines lourdes à tégument lisse.

Répartition

Le marah d’Orégon se rencontre depuis le sud de la Colombie–Britannique jusqu’au centre de la Californie, surtout à l’ouest de la chaîne des monts Cascade. Au Canada, l’espèce est confinée à une petite zone allant du sud–est de l’île de Vancouver à l’île Pender, dans la partie méridionale des îles Gulf. Sa zone d’occurrence s’étend sur 77 km², mais les quelques sites qu’elle occupe réellement couvrent une superficie inférieure à 12 km².

Habitat

En Colombie–Britannique, l’habitat du marah d’Orégon est en corrélation avec la répartition du chêne de Garry, qui est souvent observé à proximité. Les populations actuelles et historiques du marah d’Orégon ont été trouvées sur des versants rocheux exposés au sud, dans des fourrés en bordure de la route ou à la lisière du bois, à faible altitude près de la côte du sud–est de l’île de Vancouver et de celle des îles Gulf méridionales, souvent à moins de 30 m du bord de l’eau.

Biologie

Le marah d’Orégon est une herbacée vivace à grosse racine ligneuse qui donne naissance à une ou plusieurs tiges aériennes chaque année. L’espèce ne se multiplie pas par voie végétative. Lorsque la graine germe, les cotylédons (feuilles séminales) se soudent et s’allongent rapidement en s’enfonçant dans le sol, formant sous la terre un organe tubulaire de réserve. Ce mode de germination des graines et d’établissement des semis est particulier au genre Marah et à quelques autres dicotylédones. Il serait une adaptation complexe favorisant un établissement rapide des semis dans les régions à climat de type méditerranéen, connaissant une saison chaude et sèche.

Taille et tendances des populations

En 2006, l’effectif canadien du marah d’Orégon s’élevait à 18 individus matures répartis entre trois localités. Une quatrième population est tenue pour disparue puisqu’elle n’a pas été revue depuis 1964. Faute de données historiques, il est impossible de dégager des tendances démographiques pour les trois populations actuelles.

Facteurs limitatifs et menaces

La principale menace pesant sur le marah d’Orégon est la perte d’habitat découlant de l’aménagement, des activités récréatives et de la présence d’espèces envahissantes. Une des populations a été détruite par piétinement; les autres sont très petites et sont aussi fortement exposées au piétinement.

Importance de l’espèce

Les populations de marah d’Orégon de la Colombie–Britannique ont une valeur de conservation élevée puisqu’elles constituent la totalité de l’effectif canadien d’une espèce dont l’aire de répartition est très restreinte. Les peuples autochtones utilisaient différentes parties de la plante à des fins médicinales.

Protection actuelle ou autres désignations de statut

Au Canada, le marah d’Orégon n’est protégé par aucune loi visant les espèces en péril. Selon le classement de l’organisme NatureServe, le marah d’Orégon est non en péril à l’échelle mondiale (cote G5), mais gravement en péril à l’échelle de la Colombie–Britannique (cote S1). L’espèce n’est répertoriée dans aucune aire protégée.

Historique du COSEPAC

Le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) a été créé en 1977, à la suite d’une recommandation faite en 1976 lors de la Conférence fédérale–provinciale sur la faune. Le Comité a été créé pour satisfaire au besoin d’une classification nationale des espèces sauvages en péril qui soit unique et officielle et qui repose sur un fondement scientifique solide. En 1978, le COSEPAC (alors appelé Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada) désignait ses premières espèces et produisait sa première liste des espèces en péril au Canada. En vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP) promulguée le 5 juin 2003, le COSEPAC est un comité consultatif qui doit faire en sorte que les espèces continuent d’être évaluées selon un processus scientifique rigoureux et indépendant.

Mandat du COSEPAC

Le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) évalue la situation, au niveau national, des espèces, des sous–espèces, des variétés ou d’autres unités désignables qui sont considérées comme étant en péril au Canada. Les désignations peuvent être attribuées aux espèces indigènes comprises dans les groupes taxinomiques suivants : mammifères, oiseaux, reptiles, amphibiens, poissons, arthropodes, mollusques, plantes vasculaires, mousses et lichens.

Composition du COSEPAC

Le COSEPAC est composé de membres de chacun des organismes responsable des espèces sauvages des gouvernements provinciaux et territoriaux, de quatre organismes fédéraux (le Service canadien de la faune, l’Agence Parcs Canada, le ministère des Pêches et des Océans et le Partenariat fédéral d’information sur la biodiversité, lequel est présidé par le Musée canadien de la nature), de trois membres scientifiques non gouvernementaux et des coprésidents des sous–comités de spécialistes des espèces et du sous–comité des connaissances traditionnelles autochtones. Le Comité se réunit au moins une fois par année pour étudier les rapports de situation des espèces candidates.

Définitions (2009)

Espèce sauvage
Espèce, sous–espèce, variété ou population géographiquement ou génétiquement distincte d’animal, de plante ou d’une autre organisme d’origine sauvage (sauf une bactérie ou un virus) qui est soit indigène du Canada ou qui s’est propagée au Canada sans intervention humaine et y est présente depuis au moins cinquante ans.

Disparue (D)
Espèce sauvage qui n’existe plus.

Disparue du pays (DP)
Espèce sauvage qui n’existe plus à l’état sauvage au Canada, mais qui est présente ailleurs.

En voie de disparition (VD)*
Espèce sauvage exposée à une disparition de la planète ou à une disparition du pays imminente.

Menacée (M)
Espèce sauvage susceptible de devenir en voie de disparition si les facteurs limitants ne sont pas renversés.

Préoccupante (P)**
Espèce sauvage qui peut devenir une espèce menacée ou en voie de disparition en raison de l'effet cumulatif de ses caractéristiques biologiques et des menaces reconnues qui pèsent sur elle.

Non en péril (NEP)***
Espèce sauvage qui a été évaluée et jugée comme ne risquant pas de disparaître étant donné les circonstances actuelles.

Données insuffisantes (DI)****
Une catégorie qui s’applique lorsque l’information disponible est insuffisante (a) pour déterminer l’admissibilité d’une espèce à l’évaluation ou (b) pour permettre une évaluation du risque de disparition de l’espèce.

* Appelée « espèce disparue du Canada » jusqu’en 2003.
** Appelée « espèce en danger de disparition » jusqu’en 2000.
*** Appelée « espèce rare » jusqu’en 1990, puis « espèce vulnérable » de 1990 à 1999.
**** Autrefois « aucune catégorie » ou « aucune désignation nécessaire ».
***** Catégorie « DSIDD » (données insuffisantes pour donner une désignation) jusqu’en 1994, puis « indéterminé » de 1994 à 1999. Définition de la catégorie (DI) révisée en 2006.

Le Service canadien de la faune d’Environnement Canada assure un appui administratif et financier complet au Secrétariat du COSEPAC.

Rapport de situation du COSEPAC sur le Marah d’Orégon Marah oreganus au Canada - 2009

Information sur l’espèce

Nom et classification

Nom scientifique : Marah oreganus (Torr. ex S. Wats.) T.J. Howell
Synonymes : (d’après Hitchcock et al., 1959) Sicyos oregana T. & G.;
Megarrhiza oregana Torr. ex S. Wats.; Echinocystis oregana Cogn.;
Micrampelis oregana Greene
Nom français : marah d’Orégon
Noms anglais : Coast Manroot, Old–man–in–the–ground, Western Wild Cucumber
Famille : Cucurbitacées
Grand groupe végétal : Eudicotylédones

Le nom Marah vient du mot hébreu signifiant « amer ». Le groupe est ainsi nommé en raison de l’amertume de toutes les parties de la plante et, en particulier, de la racine.

Le Marah oreganus est l’une des sept espèces du genre Marah réparties sur la côte ouest de l’Amérique du Nord, depuis le sud de la Colombie–Britannique jusqu’à la Basse–Californie, au Mexique. Cinq d’entre elles vivent à basse ou à moyenne altitude dans les montagnes de la Californie, une autre se rencontre dans l’île mexicaine de Guadalupe, et la septième est présente en Arizona et au Nouveau–Mexique. Le genre Marah est parfois inclut dans le genre Echinocystis (Hitchcock et al., 1959; Schlising, 1993).

Les Marah forment de très grosses racines tubéreuses, pouvant peser plus de 100 kg. La racine est vivace et produit des tiges aériennes chaque année après les pluies hivernales. Les Marah possèdent plusieurs caractères distinctifs des Cucurbitacées : les tiges sont dotées de vrilles, les feuilles sont palmées–lobées, et la plante est monoïque, avec les fleurs staminées (mâles) réunies en grappes axillaires et les fleurs pistillées (femelles) portées isolément également à l’aisselle des feuilles. L’ovaire se transforme en un fruit épineux renfermant plusieurs grosses graines lourdes.

Description morphologique

Le Marah oreganus est une plante grimpante vivace à grosse racine tubéreuse produisant chaque année, à la fin de l’hiver ou au début du printemps, en réaction aux pluies abondantes, une seule ou plusieurs tiges aériennes. Les tiges sont grosses et peuvent atteindre 6 m de longueur. Elles sont munies de vrilles leur permettant de s’élever en s’accrochant aux plantes voisines aussi bien que de courir au sol. La racine porte de nombreux bourgeons capables de produire des tiges dans le cas où elle viendrait à être fragmentée.

Les feuilles sont alternes, pétiolées, cordées, non stipulées, longues de 10 à 30 cm (pétiole compris), larges de 20 à 30 cm et irrégulièrement palmées–lobées, les lobes étant au nombre de cinq à sept (figure 1). Le dessus est couvert de poils raides, et le dessous est garni de poils clairsemés. Il existe une grande variation de la grandeur des feuilles et de la longueur des lobes, entre individus et chez un même individu (Douglas et al., 1998).

Figure 1. Le Marah oreganus (Hitchcock et al., 1959. Dessin reproduit avec la permission de l’University of Washington Press).

Illustration du Marah oreganus.

Comme les autres Cucurbitacées, le Marah oreganus est monoïque, les fleurs, unisexuées, étant réunies sur le même pied. Les fleurs mâles (staminées) sont réunies en grappe à l’aisselle des feuilles. Leur périanthe, en forme de cloche, est blanchâtre et formé de 5 à 8 pièces (pétales et sépales). Les fleurs femelles (pistillées) se distinguent par leur base renflée; elles sont portées par un court pétiole et apparaissent, généralement isolées, à l’aisselle des mêmes feuilles que les inflorescences mâles (Douglas et al., 1998).

Le fruit est un péponide (type de baie), ou pépon, de forme ronde à ovale, de diamètre atteignant 4 ou 5 cm, légèrement effilé vers l’extrémité et se terminant par un petit bec (figure 2). Il est couvert d’épines vertes atteignant 1 cm de longueur, molles et sans crochet. Le fruit est d’abord d’un vert vif, avec des bandes longitudinales foncées alternant avec des bandes claires, puis devient jaune à l’approche de la saison sèche. Il gonfle en mûrissant, et lorsqu’il atteint la maturité, au début de l’été, il éclate en libérant des graines de couleur havane, larges et légèrement aplaties, ou nombre de trois ou plus. Les graines sont lisses, turgescentes et légèrement arrondies aux extrémités; elles pèsent environ 1 g chacune (Hitchcock et al., 1959; Douglas et al., 1998). Chez le Marah oreganus, les graines sont plus aplaties que chez les autres Marah (Abrams et Ferris, 1960).

Figure 2. Fruits du Marah oreganus, chez l’unique spécimen connu de la péninsule de Saanich (population 1) (photographie de Matt Fairbarns).

Photographie du fruit mûrissant du Marah oreganus, chez l’unique vieux spécimen de la péninsule de Saanich (population no 1).

La racine du Marah oreganus est grosse, dure et tubéreuse. Chez les plantes âgées, elle peut atteindre plusieurs mètres de longueur et peut peser plus de 100 kilogrammes. Elle présente des renflements et des appendices évoquant des bras, d’où les noms communs anglais de « Manroot » et « Old–man–in–the–ground » que l’on donne à la plante. Les racines fraîchement déterrées ont une surface écailleuse de couleur havane. Les racines blessées ou en décomposition prennent une coloration dorée ou orangée.

Le Marah oreganus ressemble au concombre grimpant (Echinocystis lobata), introduit dans l’ouest du Canada depuis l’est de l’Amérique du Nord. On peut cependant distinguer les deux espèces par leurs fruits et leurs graines : chez le concombre grimpant, le fruit est plus globuleux, et les graines sont plus rugueuses que chez le M. oreganus.

Description génétique

Le Marah oreganus a un nombre chromosomique de n = 16 (Hitchcock et al., 1959; Schlising, 1966). On ne possède aucune autre information génétique.

Unités désignables

Les populations canadiennes de Marah oreganus forment une seule unité désignable puisqu’elles sont confinées à une zone géographique très restreinte entièrement contenue dans une seule des aires écologiques définies par le COSEPAC (région du Pacifique).

Répartition

Aire de répartition mondiale

Le Marah oreganus se rencontre depuis le sud de la Colombie–Britannique jusqu’au centre de la Californie (figure 3), surtout à l’ouest de la chaîne des monts Cascade, parfois, mais rarement, à l’est jusqu’à la rivière Snake, à la urfrontière entre l’Oregon et l’Idaho (Hitchcock et al., 1959). D’après NatureServe (2007), le M. oreganus est présent au Wyoming, au Nebraska et dans le Montana, mais il pourrait s’agir d’erreurs d’identification, le concombre grimpant (Echinocystis lobata) ayant été confondu avec le M. oreganus. Les cartes détaillées de la flore américaine établies par comté (USDA NRCS, 2009) n’indiquent pas la présence du M. oreganus au Wyoming, au Nebraska ou dans le Montana (voir la figure 3).

Figure 3. Aire de répartition mondiale du Marah oreganus. Le cercle plein représente l’aire de répartition de l’espèce en Colombie–Britannique. Les zones ombrées représentent l’aire de répartition aux États–Unis, établie d’après les comtés pour lesquels l’espèce est mentionnée dans USDA NRCS (2009).

Carte montrant l’aire de répartition mondiale du Marah oreganus en Colombie-Britannique et aux États-Unis.

Aire de répartition canadienne

Au Canada, le Marah oreganus se rencontre uniquement dans une zone restreinte du sud–est de l’île de Vancouver et dans les îles Gulf méridionales (figure 4). Selon les estimations, la zone d’occurrence actuelle de l’espèce serait inférieure à 77 km², si la superficie d’océan séparant les populations est incluse, et à 37 km², dans le cas contraire. La superficie d’habitat réellement occupée par l’espèce est de 0,0031 km². L’indice de la zone d’occupation est de 3 km² pour une grille à mailles de 1 × 1 km, ou de 12 km² pour une grille à mailles de 2 × 2 km.

Figure 4. Aire de répartition canadienne du Marah oreganus.

Carte montrant l’aire de répartition canadienne du Marah oreganus.

Le Marah oreganus aurait été cultivé en Colombie–Britannique par les Premières nations à des fins médicinales (Turner et Bell, 1971). Toutefois, étant donné l’étroite association qui existe entre le M. oreganus et les écosystèmes du chêne de Garry et le fait qu’une seule des quatre populations de l’espèce se trouve sur des terres des Premières nations, le M. oreganus devrait être considéré comme espèce indigène se trouvant, en Colombie–Britannique, à la limite septentrionale de son aire de répartition. Puisque l’hypothèse selon laquelle le M. oreganus aurait été introduit par l’humain en Colombie–Britannique n’est appuyée par aucune preuve convaincante, l’espèce doit être considérée comme élément de la flore indigène de la province. La plus ancienne mention répertoriée date de 1898.

Habitat

Besoins en matière d’habitat

Dans toute son aire de répartition, le Marah oreganus se rencontre presque toujours dans les mêmes types d’habitat, soit des zones arbustives ou ouvertes à la lisière des forêts, des champs de plantes graminoïdes, des taillis, des forêts ouvertes et des versants de collines (Hitchcock et al., 1959; Schlising, 1993; Atkinson et Sharpe, 1993). À la limite méridionale de son aire, dans le nord et dans la région côtière du centre de la Californie, l’espèce se rencontre jusqu’à 1 800 m d’altitude (Schlising, 1993). Dans le nord–ouest de l’État de Washington, à l’île San Juan, on la trouve jusqu’à 500 m d’altitude (Atkinson et Sharpe, 1993). Le M. oreganus peut pousser en plein soleil comme en pleine ombre. Il tolère différents types de sol et différentes conditions d’acidité, mais il exige un sol humide au moins une partie de l’année.

En Colombie–Britannique, l’habitat du Marah oreganus est en corrélation avec la répartition du chêne de Garry (Quercus garryana), espèce souvent observée à proximité du M. oreganus. Les populations actuelles et historiques de M. oreganus ont été observées sur des versants rocheux exposés au sud, dans des accumulations de sol entre les affleurements rocheux et dans des trouées en bordure de forêts mixtes, à faible altitude près de la côte du sud–est de l’île de Vancouver et des îles Gulf méridionales, souvent à moins de 30 m du bord de l’eau. Cette région se trouve dans l’ombre pluviométrique des montagnes de l’île de Vancouver et des monts Olympic, qui interceptent la majeure partie des précipitations apportées par les systèmes de haute pression dominants venant du Pacifique. Il en résulte un climat à hivers doux et étés chauds et secs. Les températures sont tempérées en hiver par l’effet de l’océan, où dominent toute l’année les eaux chaudes du courant de Californie.

En novembre, mois généralement le plus humide de l’année, la région reçoit en moyenne 144 mm de précipitations (peu sous forme de neige). En janvier, mois le plus froid de l’année, la température moyenne quotidienne est de 3,8 °C, et la moyenne des températures minimales quotidiennes est de 0,7 °C1. Durant l'été, une grande zone de haute pression s'installe de façon semi–permanente dans le nord–est du Pacifique. Elle détermine la circulation atmosphérique générale au–dessus de l'ouest du Canada et est à l’origine des étés chauds et secs que connaît cette région. En juillet et août, il tombe en moyenne moins de 25 mm de précipitations par mois, ce qui donne souvent lieu à d’importants déficits hydriques. La neige et les fortes gelées étant rares dans le sud de l’île de Vancouver, la saison de croissance y est plus longue que dans le reste de la province.

La population de Marah oreganus se trouvant dans la péninsule de Saanich (population  1) ne compte qu’un individu, emmêlé avec du liseron des haies (Convolvulus sepium). Les tiges enchevêtrées des deux espèces recouvrent un petit fourré d’arbustes exotiques, composé notamment de ronce discolore (Rubus discolor = R. armeniacus) et de prunier domestique (Prunus domestica). Le M. oreganus est profondément enraciné dans le sol sur un bas–côté de route exposé au sud–ouest.

La population de l’île North Pender (population  2), formée de deux individus situés à 15 m l’un de l’autre, se trouve dans un milieu plus naturel. Il s’agit d’un escarpement rocheux abrupt, situé entre 5 et 25 m au–dessus du niveau de la mer et exposé au sud, parsemé de zones de sol à texture grossière et à forte proportion de fragments grossiers. On y trouve des chênes de Garry (Quercus garryana) et des douglas (Pseudotsuga menziesii) dispersés, des fourrés à rosier de Nootka (Rosa nutkana), symphorine blanche (Symphoricarpos albus) et holodisque discolore (Holodiscus discolor), et des trouées rocheuses où poussent la ronce Rubus ursinus, l’herbe à gomme Grindelia integrifolia, la sélaginelle de Wallace (Selaginella wallacei), l’orpin à feuilles spatulées (Sedum spathulifolium), la camassie de Suksdorf (Camassia leichtlinii), la gesse Lathyrus nevadensis ainsi que plusieurs herbacées introduites, dont la porcelle enracinée (Hypochaeris radicata) et le liondent Leontodon taraxacoides, et plusieurs graminées, dont le dactyle pelotonné(Dactylis glomerata), le brome raide (Bromus rigidus), le brome stérile (B. sterilis) et la vulpie faux–brome (Vulpia bromoides).

La population de l’île Saltspring (population  3) compte 15 individus répartis sur une superficie de 2 800 . Elle se trouve au sein d’une forêt mixte de seconde venue, où elle pousse sur un talus à forte pente, exposé au sud et sec, formé d’éboulis de diorites de quartz, d’affleurements rocheux et de sol à texture moyenne d’épaisseur variable. Les individus de Marah oreganus sont de différentes tailles et de différents âges; ils courent au sol et grimpent sur les arbres jusqu’à environ 4 m de hauteur. Les espèces dominantes sont le douglas, le chêne de Garry, l’holodisque discolore et diverses herbacées et graminées. Les espèces herbacées et graminoïdes non indigènes sont nombreuses. Les espèces dominantes côtoyant le M. oreganus sont le genêt à balais (Cytisus scoparius), le chèvrefeuille hispide (Lonicera hispidula), le dactyle pelotonné, l’osmorhize de Bertero (Osmorhiza berteroi), le pâturin des prés (Poa pratensis), la flouve odorante (Anthoxanthum odoratum), la crételle hérissée (Cynosurus echinatus) et l’élyme glauque (Elymus glaucus). La végétation de la forêt est relativement dense par endroits, mais d’après les espèces présentes, il est possible que tout le versant ait été plus ouvert autrefois, à cause d’incendies, de la récolte de bois ou de la présence de brouteurs.

La population de l’île South Pender (population  4), aujourd’hui disparue, se trouvait dans un pâturage déboisé qui s’asséchait en été, où elle poussait à la lisière d’une forêt de seconde venue de douglas, de thuya géant (Thuja plicata) et d’aulne rouge (Alnus rubra). Le site est plat, exposé au sud et partiellement ombragé. Le sol est assez épais, et les matériaux d’origine sont de texture moyenne. Le pâturage qui offrait autrefois un habitat propice au Marah oreganus est aujourd’hui en grande partie recouvert par une forêt jeune et dense. La diminution des surfaces où le sol minéral est exposé ou la compétition pour l’eau durant les périodes critiques de la saison de croissance qui accompagnent les changements de composition des espèces et de structure de la communauté pourraient créer des conditions défavorables à la germination et à l’établissement du M. oreganus.

L’étendue d’habitat propice au Marah oreganus dans l’aire de répartition canadienne de l’espèce n’a pas été mesurée, mais elle n’a probablement jamais été supérieure à 1 000 ha.

Tendances en matière d’habitat

La superficie d’habitat potentiel a grandement décliné au cours du siècle dernier, la zone côtière du sud–est de l’île de Vancouver ayant été en grande partie aménagée à des fins résidentielles et récréatives.

Dans la région de Victoria, la superficie des écosystèmes du chêne de Garry est inférieure à 5 % de ce qu’elle était à l’origine (Lea, 2006), et cette tendance correspond vraisemblablement au déclin de l’habitat propice du Marah oreganus. La majeure partie de ce qu’il reste de l’habitat a été profondément transformée par de nombreuses espèces exotiques envahissantes qui comprennent des arbustes, comme le genêt à balais, l’ajonc d’Europe (Ulex europaeus), la ronce Rubus ursinus, le daphné lauréole (Daphne laureola) et le houx commun (Ilex aquifolium); des graminoïdes, comme le brome stérile, le brome raide, le brome mou (Bromus hordeaceus), le dactyle pelotonné, la crételle des prés (Cynosurus cristata) et la houlque laineuse(Holcus lanatus); et des herbacées à feuilles larges (non graminoïdes), comme la porcelle enracinée, le liondent Leontodon taraxacoides, l’érodium cicutaire (Erodium cicutarium), le géranium mou (Geranium molle) et beaucoup d’autres espèces.

On croit que la population historique (population  4) de l’île South Pender a été piétinée par des brouteurs. Le fait qu’elle ne se soit pas régénérée est peut–être attribuable à la perturbation physique continue des lieux par des brouteurs, mais la transformation de l’habitat peut aussi avoir réduit sa capacité de rétablissement. Le site est non seulement envahi par des espèces ligneuses indigènes, mais les espèces introduites y sont également abondantes. La couverture de graminées introduites, en particulier de bromes, y est particulièrement importante. Le Marah oreganus résiste dans des écosystèmes dégradés de la Colombie–Britannique, mais l’impact sur sa survie des espèces exotiques envahissantes devenues dominantes dans de nombreuses zones d’habitat propice est peu connu. Il est possible que les espèces exotiques envahissantes empêchent le M. oreganus de germer, de s’établir ou de supporter la compétition pour l’eau et les éléments nutritifs durant les périodes critiques de la saison de croissance, comme cela se produit pour plusieurs autres plantes rares associées aux écosystèmes du chêne de Garry (Agence Parcs Canada, 2006).

Protection et propriété

La population  1 (péninsule de Saanich) se trouve dans une réserve indienne. Elle est bien visible depuis la voie publique. Les populations  2 (île North Pender) et  3 (île Saltspring) sont situées sur des terres privées. La population  4 (population disparue de l’île South Pender) se trouvait également sur une terre privée. Aucun des sites ne bénéficie d’une protection officielle. Cependant, celle de l’île North Pender est difficile d’accès, et le site est peu fréquenté.

Biologie

Cycle vital

Dans les monts Berkeley de la Californie, le Marah oreganus commence sa croissance après les pluies et les températures fraîches de novembre et décembre. Sa survie peut dépendre du fait qu’il commence sa croissance tôt, au moment où l’eau ne manque pas. Les tiges sortent de terre au début de mars et croissent rapidement, recouvrant souvent les arbustes et autres plantes voisines, qui ne semblent pas en souffrir. La floraison se produit peu après la croissance de la tige et dure généralement huit à dix semaines. La tige dépérit à l’approche de la saison chaude et sèche, et l’appareil souterrain demeure dormant jusqu’à la saison des pluies suivante, les tiges de l’année suivante émergeant alors de bourgeons qui se forment sur la racine (Schlising, 1966). Le M. oreganus est une herbacée grimpante vivace qui ne se multiplie pas par voie végétative. Sa grosse racine ligneuse produit chaque année de nouvelles tiges aériennes.

Le Marah oreganus est monoïque. En Californie, une variation spatiale et temporelle dans la séquence d’apparition des fleurs staminées et des fleurs pistillées a été observée. En règle générale, la floraison commence par une phase mâle (apparition de fleurs staminées seulement) ou hermaphrodite (apparition à la fois de fleurs staminées et de fleurs pistillées) puis se termine par une phase essentiellement femelle (fleurs pistillées seulement). Durant la majeure partie de la période de floraison, chaque nœud porte généralement une feuille, une vrille, un bourgeon à bois, une grappe de fleurs staminées et, à la base de celle–ci, une unique fleur pistillée. Parfois, les dix ou douze premiers nœuds florifères d’une tige portent chacun une fleur pistillée, pédicellée, seule ou avec une inflorescence staminée (Schlising, 1966).  

Au début de la période de floraison, les fleurs staminées s’ouvrent avant les fleurs pistillées du même nœud, mais à mesure que la période de floraison avance, les fleurs pistillées commencent à s’ouvrir avant ou en même temps que les fleurs staminées du même nœud. Plus tard dans la saison, la floraison s’achève avec une prédominance des fleurs pistillées chez la plupart des individus, les fleurs staminées étant même souvent absentes. De plus, les inflorescences tardives peuvent porter à la fois des fleurs pistillées et des fleurs staminées, voire uniquement des fleurs pistillées (Schlising, 1966).

Selon Schlising (1966), les conditions environnementales, notamment la température et la photopériode, pourraient avoir un effet sur les différentes phases de la séquence de floraison. Ainsi, les Marah ont tendance à produire plus de fleurs pistillées à mesure que les jours allongent et que le temps se réchauffe.

Germination des graines et morphologie des semis

À la fin des années 1870, Charles Darwin, en Angleterre, et Asa Gray, en Nouvelle–Angleterre, ont tous deux observé que le mode de germination des Marah, étudié chez des sujets issus de graines provenant de la Californie, était très différent de celui de la plupart des autres dicotylédones. Chez les Marah, les cotylédons (feuilles séminales) sont soudés et s’allongent rapidement en s’enfonçant dans le sol (Gray, 1877; Darwin, 1897), tandis que chez la plupart des autres dicotylédones, les cotylédons sont séparés et croissent au–dessus de la surface du sol.

À la différence de Darwin et de Gray, qui ont observé la germination des graines en serre, d’autres chercheurs ont abondamment étudié la germination des graines et l’établissement des semis du Marah oreganus dans son habitat naturel, dans les monts Berkeley du nord de la Californie. Les différentes étapes du développement devraient être les mêmes pour les populations de la Colombie–Britannique que pour celles du nord de la Californie, sauf toutefois pour un retard dans leur apparition. Ainsi, en Colombie–Britannique, la plupart des semis émergent à la fin d’avril, tandis que dans les monts Berkeley ils atteignent la surface du sol au début de mars (Schlising, 1969).

Après que les graines du Marah oreganus ont été exposées aux conditions humides et fraîches de la fin de l’automne et du début de l’hiver, il en sort une pousse embryonnaire qui se développe et commence à s’enfoncer dans le sol, entraînée par l’allongement de la base des cotylédons. En s’allongeant, les cotylédons se soudent et forment un tube dans lequel le reste de la plantule (épicotyle, hypocotyle et radicule) est entraîné hors de la graine et dans le sol (Schlising, 1969).

Au cours d’expériences de germination en laboratoire, Stocking (1955) et Schlising (1966) ont trouvé que le taux de germination était faible pour les graines de Marah oreganus et de M. fabaceus n’ayant pas été exposées au préalable à des températures fraîches (40 °F/4,4 °C) durant au moins trois semaines, ce qui donne à penser que le froid est nécessaire à la germination des graines des Marah.

Chez les populations du nord de la Californie, le tube formé par la base des cotylédons cesse de s’allonger avant janvier, la plantule souterraine ayant alors atteint entre 5 et 25 cm de longueur. La plantule se sépare alors, l’épicotyle croissant vers le haut en passant à l’intérieur du tube pour devenir la tige de la plante, tandis que l’hypocotyle se renfle sous terre et forme la racine tubéreuse. La plantule accomplit une croissance importante avant même que l’épicotyle ne donne une pousse verte au–dessus de la surface du sol. L’hypocotyle commence à former la racine avant même que la jeune plante ne commence la photosynthèse, puisant les éléments nutritifs nécessaires dans les lobes charnus et riches en protéines des cotylédons, qui demeurent dans le sol à l’intérieur du tégument de la graine (Schlising, 1969).

Ce mode de germination des graines et d’établissement des semis est particulier au genre Marah et à quelques autres dicotylédones se rencontrant principalement dans des milieux chauds et secs. L’allongement hypogé des cotylédons soudés serait une adaptation complexe favorisant un établissement rapide des semis dans les régions à climat de type méditerranéen, connaissant une saison sèche (Schlising, 1969).

Reproduction

Le Marah oreganus étant monoïque, le pollen doit être transporté sur une autre fleur du même individu ou sur une fleur d’un autre individu pour qu’il y ait fécondation. L’écologie de la reproduction a été abondamment étudiée chez les populations de M. oreganus des monts Berkeley, et il semble que l’espèce soit auto–incompatible. Dans des expériences de pollinisation manuelle, aucune des fleurs fécondées avec du pollen provenant du même individu (auto–pollinisation) n’a produit de fruits. En revanche, 42 % des pollinisations croisées (application manuelle de pollen provenant d’un autre individu ou pollinisation naturelle) ont produit des fruits et des graines. En outre, 19 % des pollinisations interspécifiques entre le M. oreganus et le M. fabaceus ont produit des fruits et des graines (Schlising, 1966).

Le fait que la fleur pistillée est réceptive avant que les fleurs staminées du même nœud ne libèrent leur pollen favorise la pollinisation croisée. Bien qu’on ait observé, chez les populations des monts Berkeley, que les plantes isolées ne produisaient pas de fruits ou de graines ou en produisaient beaucoup moins que celles poussant en groupes, certains individus isolés peuvent manifestement produire des fruits et des graines (Schlising, 1966). L’unique individu dont semble être constituée la population  1 produit des fruits et des graines, et un individu unique obtenu d’une graine récoltée en 2002 dans l’île San Juan a produit en 2008 des fleurs, des fruits et des graines (C. Fryer, comm. pers., 2008).

Certaines variétés de concombre peuvent produire des fruits sans qu’il y ait eu pollinisation ni une autre forme de stimulation, mais on ne sait pas si le Marah oreganus est capable de produire des fruits sans qu’il y ait eu fécondation (parthénocarpie). La culture de concombres sans graines est une composante importante de l’industrie serricole, et ils sont produits soit en isolant la culture de tout agent pollinisateur, soit en traitant les fleurs pistillées avec des régulateurs de croissance. Chez les concombres, une modulation de la température ou de la photopériode peut avoir un effet sur les différentes étapes de la séquence de floraison ou sur la proportion de fleurs mâles et de fleurs femelles. Nitsch et al. (1952) ainsi que Rylski et Aloni (1990) ont décrit comment des températures nocturnes basses et une courte photopériode stimulent la parthénocarpie chez le concombre.

Chez le Marah oreganus, les fleurs staminées et les fleurs pistillées produisent du nectar. Or, la production de nectar est une adaptation des plantes pour la pollinisation par les insectes; les plantes anémophiles n’en produisent pas. Les insectes peuvent également se nourrir du pollen des fleurs staminées du M. oreganus.

Dans les monts Berkeley, les principaux pollinisateurs du Marah oreganus sont probablement l’abeille domestique introduite (Apis mellifera) et les abeilles indigènes de la Californie du genre Ceratina, plus petites. Les abeilles butinent le M. oreganus pour récolter le nectar au moment où la plupart des sujets sont en pleine floraison. À cette époque, les ovaires commencent à se renfler, signe que la pollinisation a cours. De plus, bien que le transfert de pollen du corps d’une abeille au stigmate d’une fleur n’ait pas été observé directement, du pollen de M. oreganus a été identifié sur le corps d’abeilles des deux genres et du pollen a été observé sur le stigmate de fleurs butinées par des abeilles (Schlising, 1966).

Chez les populations des monts Berkeley, il s’écoule généralement environ six à huit semaines entre la pollinisation et le moment où les fruits atteignent leur taille maximale, la déhiscence ayant lieu au début de l’été. Les fruits renferment en moyenne trois ou quatre graines, qui continuent leur développement durant trois à cinq semaines avant d’être libérées (Schlising, 1966).

Établissement des semis

Schlising (1969) affirme que ce sont les graines rejetées ou enfouies par des rongeurs nocturnes qui assurent, dans toute l’aire de répartition des Marah, la production de semis. Des expériences de plantation menées dans les monts Berkeley ont montré que, en dépit du mécanisme d’enracinement dont sont dotées les plantules, seulement 2 % des graines laissées à la surface du sol réussissaient à s’établir, alors que le taux d’établissement pour les graines enfouies à différentes profondeurs se situait entre 69 et 100 % (Schlising, 1969). Sur le terrain, les graines à la surface du sol, protégées contre les rongeurs à l’aide d’un grillage, présentaient également un faible taux de germination (Schlising, 1966).

En conditions naturelles, dans les monts Berkeley, les graines de Marah oreganus ayant donné les jeunes plantes observées se trouvaient enfouies à une profondeur de 5 à 10 cm. Ces graines ont probablement été enfouies à ces profondeurs par des rongeurs (Schlising, 1966). Si les graines ne sont pas mangées par les animaux, elles ont de très bonnes chances de survivre aux conditions chaudes et sèches de l’été et de germer à la saison des pluies suivante.

Herbivores

Aucun dommage au feuillage pouvant être attribué à des herbivores, des insectes ou des champignons n’a été observé chez les populations de Marah oreganus de la Colombie–Britannique. Chez celles des monts Berkeley, en revanche, les feuilles et les jeunes fruits étaient attaqués par des chrysomèles, dont le Diabrotica undecim–punctata (= D. duodecim–punctata) et le D. trivittata. Chez les individus fortement infestés par ces insectes broyeurs, les dommages entraînaient la dessiccation précoce de la plante (Schlising, 1966). Parmi les autres ravageurs observés se trouvaient des insectes de la famille des Miridés, notamment un Corizus sp., un Irbisia sp. et l’Anasa tristis. Ces hétéroptères sucent le suc des tissus foliaires et, comme les chrysomèles, peuvent causer la dessiccation précoce de la plante. On observe souvent des forficules (ordre des Dermaptères) et des cloportes (ordre des Isopodes) dans les fruits ouverts, en particulier ceux au sol (Schlising, 1966).

Bien que les animaux domestiques ne semblent pas brouter le Marah oreganus, Schlising (1966) a observé, chez les populations des monts Berkeley, des traces de broutage des jeunes pousses tendres, probablement le fait du cerf mulet (Odocoileus hemionus). Dans l’État de Washington, des observations non confirmées indiquent que l’abondance du M. oreganus aurait augmenté après l’arrêt du pâturage des bovins (Burrill, 1992). Il est toutefois possible que cette augmentation d’effectif soit attribuable à une diminution du piétinement plutôt que du broutage.

Physiologie

Les besoins nutritionnels et les exigences particulières en matière de sol du Marah oreganus n’ont pas été étudiés. En Californie et en Oregon, le M. oreganus est répertorié comme hôte du virus de la mosaïque du concombre sauvage (code 77.0.1.0.018), transmis par la chrysomèle rayée du concombre (Acalymma trivittata) (ICTVdB Management, 2006). En règle générale, les milieux propices au M. oreganus reçoivent peu de précipitations durant la saison de croissance, mais les réserves d’eau souterraine, qui se refont chaque hiver, semblent suffisantes pour assurer la croissance végétative, la floraison et la production de graines avant la sénescence de la plante, qui survient au milieu de l’été.

Dispersion

En milieu naturel, la dispersion est le fait de la gravité, qui peut entraîner les graines parfois loin de la plante mère, et peut–être des eaux, pendant la saison pluvieuse. Dans les monts Berkeley, les graines du Marah oreganus et du M. fabaceus sont dispersées par plusieurs espèces de rongeurs nocturnes, dont la souris Peromyscus truei, le campagnol Microtus californicus et le gaufre Thomomys bottae, qui les enfouissent sous terre, où elles demeurent durant les mois chauds et secs de l’été. Les semis observés se trouvaient presque toujours dans des secteurs où le sol avait récemment été creusé par des rongeurs, souvent où il y avait des galeries souterraines, et généralement loin d’individus produisant des graines (Vestal, 1938; Linsdale et Tevis, 1951; Schlising, 1966).

Relations interspécifiques

Dans les monts Berkeley, le Marah oreganus est fréquenté par divers insectes, notamment des petites fourmis noires (Hyménoptères : Formicidés), des mouches (Diptères : Bombyliidés et Syrphidés) et des Coléoptères (Schlising, 1966). Il est possible que ces insectes utilisent les feuilles ou les fleurs du M. oreganus comme support pour s’accoupler. Le M. oreganus ne forme aucune association mycorhizienne connue. Les plantes auxquelles le M. oreganus s’accroche ou s’enroule ne semblent pas en souffrir, et le M. oreganus ne semble pas les étrangler en dépérissant.

Adaptabilité

La grande taille des individus et la rareté des semis aux sites canadiens ainsi que la grosseur de la racine chez certains individus donnent à croire que le Marah oreganus a une longévité de plusieurs décennies, voire de plusieurs siècles. La longévité des individus, la capacité des populations établies de survivre en milieux partiellement perturbés et la tolérance de l’espèce aux fluctuations saisonnières d’humidité sont signes que le M. oreganus peut s’adapter à des conditions environnementales variables.

Deux personnes ont réussi à faire germer dans la région de Victoria des graines de M. oreganus récoltées en 2002 à l’île San Juan, sans les avoir soumises à un traitement préalable spécial. Les sept graines semées ont germé, mais un seul individu a survécu. La plante n’a pas fleuri, mais sa racine a atteint 20 à 30 cm de diamètre (J. Miskelly, comm. pers., 2008). Des trois graines récoltées au même endroit qui ont été semées à l’extérieur par une autre personne, une a germé. En 2003, durant sa première année de croissance, la plante était petite et a disparu rapidement, mais depuis elle est réapparue chaque année. En 2008, sa croissance a été particulièrement vigoureuse et, après avoir produit des fleurs, des fruits et des graines, elle a subsisté jusqu’en octobre (C. Fryer, comm. pers., 2008). Il est peut–être caractéristique de l’espèce que les individus mettent plusieurs années de croissance végétative avant d’atteindre la maturité. Le M. oreganus est assez rustique pour être cultivé dans nos jardins et pourrait être considéré pour une éventuelle réintroduction en milieu naturel.

Taille et tendances des populations

Activités de recherche

Les sites propices à la croissance du Marah oreganus ont été inventoriés à plusieurs reprises depuis le début des années 1980, dans le cadre d'une série de projets visant à déterminer la répartition des plantes rares des prés et des escarpements côtiers du sud–est de l'île de Vancouver et des îles Gulf. Les principaux chercheurs ayant participé à ces projets connaissent tous bien le M. oreganus. Ce sont les botanistes Hans Roemer, Matt Fairbarns, Frank Lomer ainsi que Harvey Janszen, qui a effectué des relevés des îles Gulf méridionales par bateau. De nombreux autres botanistes ont exploré ces secteurs, mais aucun n’a signalé le M. oreganus, qui pourtant ne passe pas inaperçu.

Plus de 30 sites couvrant au total une superficie de plus de 500 hectares d’habitat propice ont été inventoriés, et ce, souvent plus d’une fois au cours des cinq dernières années. Au cours de la dernière décennie, plus de 100 journées–personnes ont été consacrées à effectuer des recherches dans les milieux propices.

Quatre campagnes de recherche visaient le Marah oreganus en particulier (environ 1 journée–personne en 2003, 4 journées–personnes en 2004, 2 en 2005 et 2 en 2006). En dépit de ces recherches, aucune nouvelle population de l’espèce n’a été repérée.

Abondance

Quatorze spécimens de Marah oreganus ont été récoltés entre 1898 et 1980. Onze d’entre eux auraient été récoltés dans la réserve indienne Union Bay, dans la baie Patricia de la péninsule de Saanich, où la population actuelle (population  1) est bien visible. La relative abondance de spécimens récoltés à ce site s’explique peut–être par le fait que la péninsule de Saanich a été peuplée beaucoup plus tôt que les localités sur les îles Gulf. La population canadienne de M. oreganus compte en tout 18 individus répartis entre trois sites (tableau 1).

Tableau 1. Sommaire des populations canadiennes de Marah oreganus.
Population et première observation/récolte Observateurs et dernière observation Superficie occupée Nombre d’individus
 1 – Péninsule de Saanich
Anderson, 1898
Fairbarns, Donovan, Ford et Penny, 2004
150 
1
 2 – Île North Pender
Penny, 1996
Fairbarns, Donovan, Bennett et Kirkby, 2004
100 
2
 3 – Île Saltspring
Ashlee, 1958
Roemer, 2006
2 800 
15
 4 – Île South Pender
Ashlee, 1958
Ashlee, 1964 population disparue population disparue

Fluctuations et tendances

La présence du Marah oreganus a été signalée au site de la péninsule de Saanich (population  1) depuis 1898, et plusieurs spécimens y ont été récoltés au cours des ans. Cependant, il n’existe pas d’information quant à l’effectif de la population et à la taille des individus. Il semble que l’enchevêtrement de tiges de cette population observé actuellement appartiendrait à un seul et même individu. En 2006, un membre du personnel du Service canadien de la faune a rendu visite à la collectivité indienne de la réserve Union Bay. Il a appris que la plante (population  1) a toujours été là du vivant du chef, ce qui signifie qu’elle aurait au moins 61 ans (Donovan, comm. pers., 2008). Il est impossible de dégager des tendances démographiques pour les trois populations actuelles de l’espèce, faute d’information sur leur effectif historique et de suivis récents.

Immigration de source externe

La population connue de Marah oreganus la plus proche des populations canadiennes se trouve à English Camp, à l’île San Juan, dans l’État de Washington (T. Dominico, comm. pers.). Elle est séparée de la population canadienne la plus proche par plus de 20 km de mer. Comme les graines du M. oreganus flottent et peuvent ainsi être transportées à grande distance par l’eau, une immigration naturelle de graines provenant des États–Unis est possible. On ne sait pas cependant quelle serait la viabilité des graines transportées par l’eau salée. Toutefois, le M. oreganus se reproduit rarement en Colombie–Britannique, et il semble y avoir un autre facteur limitant l’établissement de l’espèce. La probabilité de rétablissement de l’espèce par recolonisation naturelle est donc vraisemblablement faible. Par ailleurs, étant donné qu’au moins un individu a réussi à s’établir à partir de graines récoltées chez des populations de l’État de Washington, les populations américaines pourraient être une source importante de semences pour la réintroduction artificielle de l’espèce à l’île de Vancouver.

Facteurs limitatifs et menaces

Perte et fragmentation de l’habitat

Le Marah oreganus n’a probablement jamais été commun en Colombie–Britannique, à la fois parce qu’il s’y trouve à la limite septentrionale de son aire de répartition et qu’il a un faible taux de colonisation. Il est difficile de déterminer l’aire de répartition historique du M. oreganus, car l’information dans la documentation est limitée et les récoltes sont rares. Cependant, il est probable que la transformation de l’habitat dans l’aire de répartition de l’espèce a causé la disparition d’un certain nombre de populations présentes avant les établissements humains.

Au Canada, chacune des populations de Marah oreganus est située dans des paysages fortement fragmentés par des aménagements résidentiels et récréatifs. Les zones d’habitat côtier propice sont essentiellement discontinues, ce qui accroît la dépendance de l’espèce aux cas relativement rares de dispersion à grande distance pour franchir des milieux hostiles, comme les routes et les terres agricoles. De plus, les milieux ouverts où le M. oreganus pourrait s’établir sont maintenant colonisés par des espèces exotiques envahissantes. Dans le paysage environnant, la succession forestière dans les sites similaires pourrait également limiter l’établissement de l’espèce.

Aux termes de la définition de l’UICN, les trois populations canadiennes actuelles pourraient peut–être être considérées comme gravement fragmentées, en raison de la viabilité douteuse de deux de ces trois « populations ». L’effectif canadien de l’espèce s’élève à seulement 18 individus, répartis en populations considérablement éloignées les unes des autres (> 5 km), au sein d’un paysage fragmenté. De surcroît, les populations sont également séparées par des étendues d’océan. Bien que les individus aient une grande longévité, il n’est pas certain que 1, 2 et même 15 individus, aussi longévifs soient–ils, peuvent être considérés comme des populations viables à long terme. Deux des trois populations (populations  1 et 2) n’occupent ensemble pas plus de 250  sur une superficie totale d’environ 3 000 . Le Marah oreganus est considéré comme une mauvaise herbe dans certaines parties de son aire de répartition principale aux États–Unis, où il est abondant (Burrill, 1992), mais les trois populations de la Colombie–Britannique comptent à peine quelques individus qui ne se propagent pas à partir des points où ils se sont établis il y a vraisemblablement de nombreuses décennies ou, peut–être même, des siècles.

Plantes exotiques envahissantes

Plusieurs espèces non indigènes ont envahi l’habitat actuel et potentiel du Marah oreganus. Cependant, une fois établi, celui–ci semble tolérer un certain degré de perturbation. Ainsi, la population de la péninsule de Saanich (population  1) pousse au bord d’une route située en contre–haut de la plage, parmi une végétation non indigène qui est sporadiquement fauchée. L’unique sujet de cette population a été en partie coupé par la débroussailleuse lors d’une opération visant apparemment à éliminer la ronce, mais la plante continue de fleurir et de produire des fruits. Une plante bien établie qui a eu le temps de former une grosse racine contenant d’abondantes réserves alimentaires et présentant de nombreux bourgeons est capable de produire de nouvelles tiges après une perturbation mécanique comme le fauchage ou le broutage.

Les populations actuelles semblent vivre de nombreuses années sans que de nouvelles plantes réussissent à s’établir à partir de graines. Toutefois, le faible effectif et le faible taux de colonisation des populations donnent à croire qu’il existe des facteurs (microclimat, auto–incompatibilité, etc.) limitant l’établissement et la persistance du Marah oreganus en Colombie–Britannique. La compétition interspécifique par les arbres et arbustes envahissants, dont le genêt à balais, la ronce et le liseron des haies, pour l’eau, les éléments nutritifs du sol et l’espace nécessaire au développement des racines, peut être limitative pour le M. oreganus et peut rendre les conditions défavorables à la germination des graines et à la survie des semis. Pour les populations  1 et 2, les pesticides et herbicides chimiques utilisés dans le paysage résidentiel avoisinant pourraient nuire au M. oreganus, et même entraîner la mort de la plante ou celle de ses pollinisateurs. Aux États–Unis, dans les parties de l’aire de répartition du M. oreganus où celui–ci est considéré comme une mauvaise herbe, il a été démontré que les herbicides tuent le feuillage de la plante; cependant, l’effet à long terme des herbicides sur la racine et sur sa capacité de produire de nouvelles pousses n’est pas connu (Burrill, 1992).

Herbivores

L’unique sujet de la population de l’île South Pender (population  4) a été observé pour la dernière fois en 1964. Il a probablement été piétiné à la suite du bris de la clôture qui l’avait jusqu’alors protégé contre les brouteurs. il est toutefois possible qu’il n’ait pas été brouté ni piétiné, et que sa disparition de cette localité soit attribuable aux conséquences du piétinement, soit le compactage des sols et leur consécutive saturation en eau.

Modification des régimes hydrologiques

Rodenhuis et al. (2007) ont effectué une synthèse des données de modèles climatiques qui prévoient un réchauffement continu à la grandeur de la Colombie–Britannique ainsi que des étés plus secs dans le sud et sur la côte de la province. Cette tendance s’inscrit dans le contexte plus général des changements climatiques mondiaux. Les conséquences probables des changements climatiques sur la végétation de la région ne font pas l’unanimité, mais les données montrent qu’il y aurait des impacts sur la phénologie, la croissance, le développement et la reproduction des espèces et sur les relations interspécifiques. Il y aurait également des conséquences sur les fonctions des écosystèmes, comme les cycles de l’eau et des éléments nutritifs (Ministère de l’Environnement de la Colombie–Britannique, 2007).

Une modification des précipitations ou des régimes locaux d’écoulement des eaux, résultant des changements climatiques ou de changements d’affectation des terres, pourrait avoir des effets négatifs sur la survie du Marah oreganus, soit en augmentant, soit en diminuant la quantité d’eau à un moment critique de la saison de croissance. Un manque d’humidité durant la période de germination pourrait conduire à la prolifération d’espèces compétitrices pour lesquelles une trop forte humidité est un facteur limitant. De même, une trop forte humidité durant la période de dormance pourrait entraîner des infections fongiques causant la pourriture de la racine.

L’unique individu de la population de la péninsule de Saanich ( 1) pousse au bord d’une route qui le sépare d’un quartier résidentiel, et pourrait ainsi être vulnérable aux eaux des égouts pluviaux de l’agglomération et aux eaux de ruissellement riches en nutriments, contaminées par des engrais ou des pesticides. Il est également menacé par l’accumulation de sédiments ou la perturbation du sol associées à la construction ou à l’entretien routiers.

Aménagement

Les îles Gulf et la région de Victoria sont parmi les secteurs les plus prisés de la province pour l’habitation, en raison du climat, de la beauté des paysages et de la douceur du relief, favorables à l’aménagement et à l’agriculture. La croissance a été rapide dans cette région, en particulier sur les terres privées, et la pression est forte, de sorte que les espaces naturels continuent d’être déboisés, asséchés et aménagés à des fins résidentielles, commerciales et agricoles (Ward et al., 1998). On ne sait pas s’il existe des plans d’aménagement pour les trois sites où poussent les populations restantes de Marah oreganus, mais elles se trouvent toutes sur des terres privées et ne bénéficient d’aucune protection dans l’éventualité d’un changement d’affectation des terres.

Importance de l’espèce

Les peuples autochtones utilisaient différentes parties de la plante à des fins médicinales (Turner et Bell, 1971; Gunther, 1973; Baker, 1981; Pojar et MacKinnon, 1994).

Le Marah oreganus renferme des protéines inactivant les ribosomes (RIP). Ces protéines ont diverses propriétés qui pourraient être utiles en pharmacologie, notamment des propriétés antivirales, antitumorales, antidiabétiques, abortives et immunomodulatrices. Une protéine, la trichosanthine, extraite de la racine d’une autre Cucurbitacée, le Trichosanthes kirilowii, a une action inhibitrice sélective sur la réplication virale dans les globules sanguins d’humains infectés par le VIH–1. La protéine a été soumise à des essais cliniques comme médicament contre le SIDA (Shih et al., 1998).

Les populations de Marah oreganus de la Colombie–Britannique se trouvent à la limite septentrionale de l’aire de répartition de l’espèce. Les populations périphériques isolées sont souvent génétiquement et morphologiquement différentes des populations principales d’une espèce. La capacité d’une espèce de s’adapter aux changements de conditions écologiques et, par conséquent, sa survie à long terme, peut dépendre de la conservation des populations périphériques génétiquement distinctes (Lesica et Allendorf, 1995).

Protection actuelle ou autres désignations de statut

Le Marah oreganus n’est pas visé par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) ni par la Endangered Species Act des États–Unis. Il n’est pas non plus inscrit sur la Liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

Le Marah oreganus est classé G5 à l’échelle mondiale (espèce non en péril à l’échelle mondiale) et S1 à l’échelle de la Colombie–Britannique (espèce gravement en péril dans la province) (NatureServe, 2007; Conservation Data Centre de la Colombie–Britannique, 2007). En Colombie–Britannique, aucune des populations ne se trouve dans un parc ou une aire protégée.

En Californie, en Oregon et dans l’état de Washington, le statut de conservation du Marah oreganus n’a pas encore été évalué (cote SNR) (NatureServe, 2007).

Aucun instrument juridique provincial ne protège le Marah oreganus en Colombie–Britannique.

Résumé technique

Marah oreganus

Marah d’Orégon – Coast Manroot

Répartition au Canada (province/territoire/océan) :
Colombie–Britannique

Données démographiques

Durée d’une génération (habituellement l'âge moyen des parents dans la population: indiquer si une autre méthode d'estimation
de la durée des générations inscrite dans les lignes directrices
de l'UICN (2008) a été utilisée)
Inconnue; probablement plusieurs décennies, peut–être plus
Y a–t–il un déclin continu [observé, inféré ou prévu] du nombre total d'individus matures?
Disparition de la population no 4 en moins de trois générations; survie peu probable de deux des trois très petites populations existantes; aucune production de semis.
Déclin continu inféré
Pourcentage estimé du déclin continu du nombre total
d'individus matures pendant [cinq années ou deux générations]
Inconnu
Pourcentage [observé, estimé, inféré ou soupçonné] de [la réduction ou l'augmentation] du nombre total d'individus
matures au cours des [dix dernières années ou trois
dernières générations]
Inconnu
Pourcentage [prévu ou soupçonné] de [la réduction ou l'augmentation] du nombre total d'individus matures au cours
des [dix prochaines années ou trois prochaines générations]
Inconnu
Pourcentage [observé, estimé, inféré ou soupçonné] de [la réduction ou l'augmentation] du nombre total d'individus
matures au cours de toute période de [dix ans ou trois
générations] commençant dans le passé et se terminant
dans le futur
Inconnu
Est–ce que les causes du déclin sont clairement réversibles et comprises et ont effectivement cessé?
Inconnu
Y a–t–il des fluctuations extrêmes du nombre d'individus matures?
Non

Information sur la répartition

Valeur estimée de la zone d’occurrence
77 km²
Indice de la zone d’occupation
3 km² pour une grille à mailles de 1 × 1 km, 12 km² pour une
grille à mailles de 2 × 2 km
12 km²
La population totale est–elle très fragmentée?
La réponse est affirmative si deux des trois populations, très petites, ne sont pas considérées comme viables en raison de l’absence de production de semis.
Oui
Nombre de « localités » (d’après la définition de localité, qui
tient compte des menaces)
3
Y a–t–il un déclin continu [observé, inféré ou prévu] de la zone d'occurrence?
La population  4 est disparue, et deux autres populations ne sont probablement pas viables.
Oui
Y a–t–il un déclin continu [observé, inféré ou prévu] de l'indice
de la zone d'occupation?
La population  4 est disparue, et deux autres populations ne sont probablement pas viables.
Oui
Y a–t–il un déclin continu [observé, inféré ou prévu] du nombre
de populations?
La population  4 est disparue, et deux autres populations
ne sont probablement pas viables.
Oui
Y a–t–il un déclin continu [observé, inféré ou prévu] du nombre
de localités?
La population  4 est disparue, et deux des trois populations existantes ne sont probablement pas viables.
Oui
Y a–t–il un déclin continu [observé, inféré ou prévu] de [la superficie, l’étendue ou la qualité] de l'habitat?
L’absence de régénération par semis peut être un signe de dégradation de l’habitat.
La propagation d’espèces exotiques peut avoir diminué la qualité de l’habitat.
Y a–t–il des fluctuations extrêmes du nombre de populations?
Non
Y a–t–il des fluctuations extrêmes du nombre de localités
(d’après la définition de localité, qui tient compte des
menaces)?
Non
Y a–t–il des fluctuations extrêmes de la zone d'occurrence?
Non
Y a–t–il des fluctuations extrêmes de l'indice de la zone d'occupation?
Non

Nombre d’individus matures (dans chaque population)

Population
Nombre d’individus matures
Péninsule de Saanich
1
Île North Pender
2
Île Saltspring
15
Total
18

Analyse quantitative

La probabilité de disparition de l’espèce de la
nature est d'au moins [20 % sur 20 ans ou
5 générations, ou 10 % sur 100 ans].
Aucune analyse quantitative disponible

Menaces (actuelles ou imminentes, pour les populations ou les habitats)

Menaces réelles, mais dont l’impact est incertain: perte d’habitat, brouteurs, espèces exotiques envahissantes et modification des régimes hydrologiques.

Statut existant

COSEPAC :
espèce en voie de disparition (novembre 2009

Statut et justification de la désignation

Statut :
Espèce en voie de disparition
Code alphanumérique :
B1ab(i,ii,iii,iv,v)+2ab(i,ii,iii,iv,v); C2a(i); D1

Justification de la désignation :
Il s’agit d’une vigne vivace longévive qu’on ne trouve qu’à trois localités largement éloignées les unes des autres dans le sud–est de l’île de Vancouver et dans des îles Gulf adjacentes. Il reste moins de 20 individus matures, et rien n’indique une production de semences. Des pertes d’habitat, de populations et d’individus matures sont prévues dans l'aire de répartition canadienne. Les principales menaces sont le développement des quelques sites connus, les espèces exotiques et les événements fortuits touchant les quelques individus restants.

Applicabilité des critères

Critère A (Déclin du nombre total d’individus matures) : sans objet, le pourcentage de déclin est inconnu.

Critère B (Aire de répartition peu étendue, et déclin ou fluctuation) : Correspond aux critères de la catégorie « espèce en voie de disparition », B1ab(i,ii,iii,iv,v)+2ab(i,ii,iii,iv,v), car la zone d’occurrence et l’indice de la zone d’occupation sont sous les seuils critiques, l’espèce n’est présente qu’à trois localités très fragmentées, l’effectif de chacune des populations est extrêmement faible et l’absence de recrutement de semis laisse prévoir un déclin continu; la disparition de la population de l’île Pender révèle qu’un déclin selon le sous–critère i–v serait survenu dans le passé, probablement au cours des trois dernières générations.

Critère C (Nombre d’individus matures peu élevé et en déclin) : Correspond au critère de la catégorie « espèce en voie de disparition », C2a(i), car l’effectif est inférieur à 250 individus matures et présente un déclin continu inféré en se fondant sur la disparition de l’une des populations et du risque de disparition des autres populations, comme l’unique individu de la péninsule de Saanich, étant donné le manque de recrutement de semis à tous les sites.

Critère D (Très petite population totale ou répartition restreinte) : Correspond au critère de la catégorie « espèce en voie de disparition », D1, le nombre d’individus matures étant inférieur à 250.

Critère E (Analyse quantitative) : Aucune disponible

Remerciements et experts contactés

Les rédacteurs du présent rapport tiennent à remercier Robb Bennett, Shane Ford, Jan Kirkby et Jenifer Penny pour l’aide fournie sur le terrain.

Experts contactés

  • Domico, Terry. Conservation Biologist, Puget Sound BioSURVEY, Friday Harbor (État de Washington).
  • Fryer, Catherine. Victoria (Colombie–Britannique).
  • Roemer, Hans. Mimulus Consulting, 1717 Woodsend Rd., Victoria (Colombie–Britannique) V9E 1H7.
  • Filion, Alain. Chargé de projets scientifiques et de géomatique, Secrétariat du COSEPAC, Service canadien de la faune, Environnement Canada, Ottawa (Ontario), K1A 0H3.
  • Goulet, Gloria. Coordonnatrice, Connaissances traditionnelles autochtones, Secrétariat du COSEPAC, Service canadien de la faune, Environnement Canada, Ottawa (Ontario), K1A 0H3.

Sources d’information

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Agence Parcs Canada. 2006. Programme de rétablissement multi–espèces visant les plantes en péril des chênaies de Garry au Canada, in Série de Programmes de rétablissement de la Loi sur les espèces en péril, Agence Parcs Canada, Ottawa, 66 p.

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Burrill, L.C. 1992. Weeds. Western Wildcucumber Marah oreganus (T. & G.) Howell, A Pacific Northwest Extension Publication, PNW 401, January 1992.

Sommaires biographiques des rédacteurs du rapport

Marta Donovan a obtenu un baccalauréat ès sciences (biologie) de l’Université de Victoria en 2003. Elle travaille actuellement en qualité de botaniste pour le Centre de données sur la conservation (Conservation Data Centre) de la Colombie–Britannique.

Matt Fairbarns a obtenu un baccalauréat ès sciences (botanique) de l’Université de Guelph en 1980. Il compte à son actif environ 25 années d’expérience dans le domaine des plantes rares et de la cartographie, du recensement et de la conservation des écosystèmes de l’ouest du Canada.

Collections examinées

Les collections suivantes ont été consultées.

  • Herbier du Musée royal de la Colombie–Britannique (Royal British Columbia Museum) (V).
  • Herbier de l’Université de Victoria (University of Victoria Herbarium) (UVIC).
  • Herbier de l’Université de la Colombie–Britannique (University of British Columbia Herbarium) (UBC).

1 Normales climatiques pour la période 1971–2000, aéroport international de Victoria. Source : Normales climatiques (Environnement Canada); site Web consulté en juillet 2007.

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