Lampsile fasciolée (Lampsilis fasciola) programme de rétablissement : chapitre 1


I. Contexte

Information sur l'espèce

Nom scientifique :  Lampsilis fasciola

Nom usuel :  Lampsile fasciolée

Situation actuelle selon le COSEPAC et année de la désignation :  En voie de disparition (1999)

Aire de répartition au Canada (provinces et territoires où on a observé sa présence) :  Ontario

Raison de la désignation : La lampsile fasciolée a connu un déclin considérable ces dernières années dans toute son aire de répartition historique. La population dans les Grands Lacs a été réduite par la moule zébrée tandis que les populations dans les rivières Thames, Sydenham et Ausable disparaissent ou se sont perdues principalement à cause des effets de l'agriculture.

Répartition

Aire globale de répartition : Aux États-Unis, la lampsile fasciolée est considérée en sécurité au plan national et se trouve présentement dans l'Alabama, l'Indiana, l'Illinois, le Kentucky, le Michigan, l'État de New York, la Caroline du Nord, la Pennsylvanie, le Tennessee, la Virginie occidentale et la Virginie (figure 2); on a toutefois observé des déclins récents dans toute son aire de répartition (Parmalee et Bogan 1998). Elle se trouvait historiquement dans la Georgie et l'Ohio, mais la situation de l'espèce dans ces États est présentement inconnue. Au Canada, la lampsile fasciolée est considérée en péril de façon critique et se trouve seulement dans le sud-ouest de l'Ontario (figure 3; tableau 1) (Metcalfe-Smith et coll. 2000).

Figure 2 :Répartition nord-américaine de la lampsile fasciolée (modifiée à partir de Parmalee et Bogan 1998)

Figure 2 : Répartition nord-américaine de la lampsile fasciolée (modifiée à partir de Parmalee et Bogan 1998)

Figure 3 : Répartition actuelle et historique de la lampsile fasciolée au Canada

Figure 3 : Répartition actuelle et historique de la lampsile fasciolée au Canada

Aire canadienne de répartition : La répartition canadienne actuelle de la lampsile fasciolée se limite au cours supérieur de la rivière Grand et ses affluents (Metcalfe-Smith et McGoldrick 2003), le cours supérieur de la rivière Thames (T. Morris, Pêches et Océans, Burlington, données non publiées), les quatre embranchements de la rivière Maitland (Janice Metcalfe-Smith, INRE, Burlington, comm. pers. octobre 2003), une petite section de la rivière Ausable (Metcalfe-Smith et McGoldrick 2003) et les eaux canadiennes du delta du lac St. Clair (Zanatta et coll. 2002) (Figure 3).

Pourcentage de l'abondance globale au Canada :Moins de 5 % de la répartition globale de l'espèce se trouve au Canada.

Tendance de la répartition : L'aire de répartition de la lampsile fasciolée a été considérablement réduite, celle-ci ayant disparue de son aire historique dans le bassin ouest du lac Érié, la plus grande partie du lac St. Clair, la rivière Detroit et la rivière Sydenham. Sa répartition dans les rivières Ausable et Grand a été réduite, tandis que l'aire historique semble encore occupée dans toute son étendue dans la rivière Thames. On ne peut pas évaluer la tendance dans la rivière Maitland, car aucun relevé historique n'existe. Les plus importantes populations de cette espèce occupent un segment de 60 km du cours supérieur de la rivière Grand, un segment de 45 kmde la rivière Maitland, une section de 65 km dans le bassin versant supérieur de la rivière Thames divisée entre les rivières North, Middle et South Thames et une zone d'environ 12 km² dans le delta du lac St. Clair (Metcalfe-Smith et McGoldrick 2003). 

Tableau 1 : Cotes nationales et provinciales/des États - Canada et États-Unis (NatureServe 2004)
Canada (N1) ON (S1)
États-Unis (N4) AL (S1S2), GA (S2?), IL (S2), IN (S2), KY (S4S5), MI (S2), NY (S1), NC (S1), OH (S?), PA (S4), TN (S4), VA (S4), WV (S2)

Abondance de la population

Aire globale : La lampsile fasciolée est en sécurité au plan mondial (G4), mais c'est une espèce peu commune dans toute son aire de répartition qui constitue habituellement moins de 2 % de la communauté de moules là où elle est présente (Metcalfe-Smith et McGoldrick 2003).

Aire canadienne : La rivière Maitland, les tronçons supérieurs de la rivière Grand et le cours supérieur de la rivière Thames soutiennent les plus importantes populations de cette espèce au Canada tandis qu'une plus petite population existe dans le delta du lac St. Clair. La lampsile fasciolée se trouve également dans la rivière Ausable, mais est représentée seulement par des individus de grande taille sans aucune preuve de succès reproducteur. Un seul exemplaire vivant a été trouvé lors d'une récente étude sur les invertébrés benthiques à un seul emplacement de la rivière St. Clair.

Pourcentage de l'abondance globale au Canada :Moins de 1 %

Tendance de la population : Le taux de mouvement de la population de lampsile fasciolée est inconnu. La seule population stable de cette espèce au Canada  se trouve dans le cours supérieur de la rivière Grand, tandis que le statut de la  deuxième plus importante population (Maitland R.) est inconnu en raison d'un manque d'information historique. La population de la rivière Grand semble s'être rétablie des conditions de mauvaise qualité de l'eau qui étaient présentes dans les années 1970 et au début des années 1980.  Les densités globales de toutes les espèces de moules dans le delta St. Clair semblent décliner au fil du temps, mais le petit nombre de lampsiles fasciolées rend difficile l'interprétation des résultats pour cette espèce en particulier (Metcalfe-Smith et coll. 2004). Toutes les autres populations canadiennes ont nettement diminué, à tel point qu'il ne reste que quelques individus, ou ont disparu du pays.

Facteurs biologiques contraignants

Attributs reproductifs

La lampsile fasciolée, à l'instar de tous les unionidés, a un cycle reproducteur complexe qui se caractérise par une période de parasitisme obligatoire. Cette phase parasitaire rend la lampsile fasciolée particulièrement vulnérable aux facteurs externes qui peuvent indirectement lui nuire par l'intermédiaire de son hôte (Bogan 1993). La lampsile fasciolée est une espèce de taille moyenne à dimorphisme sexuel, dont la durée de vie est moyenne. Durant l'époque du frai, les mâles libèrent du sperme dans la colonne d'eau et les femelles situées en aval le recueillent par leurs siphons branchiaux. Les femelles couvent les œufs jusqu'au stade larvaire dans les parties postérieures des branchies extérieures. Les coquilles qui se gonflent sur les bords ventraux postérieurs pour faire de la place aux sacs branchiaux expansés (Metcalfe-Smith et coll. 2000) caractérisent les lampsiles fasciolées femelles adultes. Chez les lampsiles fasciolées, la période de couvaison est longue (bradytictic), le frai se produisant en août et la libération des glochidies l'année suivante (de mai à août en Virginie (Zale et Neves 1982), de juin à août au Canada (Woolnough 2002)).

Les larves adultes sont libérées par la femelle et doivent subir une période d'enkystement sur les branchies d'un hôte convenable. Deux espèces hôtes ont été reconnues pour la lampsile fasciolée aux États-Unis. Zale et Neves (1982) ont signalé des expériences réussies d'infestations en laboratoire d'achigan à petite bouche (Micropterus dolomieu) par des glochidies de lampsile fasciolée, tandis que G.T. Watters (Université de l'État d'Ohio, cité dans Metcalfe-Smith et coll. 2000), a signalé une réussite avec l'achigan à grande bouche (M. salmoides). L'achigan à grande bouche et l'achigan à petite bouche ont récemment été confirmés comme hôtes pour la lampsile fasciolée au Canada (McNichols et coll. 2005). Des chercheurs de l'Université de Guelph ont également infecté avec succès le chabot tacheté (Cottus bairdi) et l'épinoche à cinq épines (Culaea inconstans) de glochidies de lampsile fasciolée; on ne sait toutefois pas vraiment si ces espèces agissent comme hôtes dans des conditions naturelles (K. McNichols, Université de Guelph, comm. pers., septembre 2003).

Pour augmenter la probabilité de rencontrer un hôte approprié et faciliter l'enkystement, les lampsiles fasciolées femelles ont développé un manteau spécial qui agit comme un leurre (Strayer et Jirka 1997). On a observé trois morphologies concomitantes de leurres du manteau sur des lampsiles fasciolées femelles qui les ont déployés lors d'études sur le terrain des rivières Grand, Thames, Ausable et Maitland. Ces trois morphologies consistent en un leurre noir, un leurre rouge vif et un leurre pisciforme (Figure 4). On ne sait pas si les trois morphologies de leurre constituent des espèces jumelles ou si elles sont écoformes. Une analyse phylogénique moléculaire est requise pour résoudre cette lacune.

Lorsqu'un hôte convenable touche au leurre du manteau, les rabats du manteau se rétractent dans la coquille, ce qui exerce une pression sur le marsupium et cause la libération des larves adultes (glochidies). La structure du leurre (p. ex. taches oculaires et pigmentation compatibles avec un petit poisson en forme de méné dans la morphologie de leurre pisciforme) et la méthode de libération des glochidies sont compatibles avec une espèce hôte qui est une prédatrice visuelle. Cela indique que la clarté de l'eau joue un rôle essentiel au bon déroulement du cycle de reproduction de la lampsile fasciolée.

Figure 4 : Trois morphologies de leurre de la lampsile fasciolée : noir (a), rouge (b) et pisciforme (c). Les trois animaux ont été observés dans la rivière North Thames durant 2004. Photos : courtoisie de T. Morris, Pêches et Océans Canada.

Figure 4 : Trois morphologies de leurre de la lampsile fasciolée : noir (a), rouge (b) et pisciforme (c). Les trois animaux ont été observés dans la rivière North Thames durant 2004. Photos : courtoisie de T. Morris, Pêches et Océans Canada.

Dispersion

Les lampsiles fasciolées adultes ont des capacités de dispersion très limitées. Bien que le mouvement des adultes puisse se diriger en amont ou en aval, les études ont permis de constater un net mouvement en aval au fil du temps (Balfour et Smock 1995; Villella et coll. 2004). Le principal moyen de dispersion à grande échelle, le mouvement en amont et l'invasion d'un nouvel habitat ou l'évasion d'un habitat détérioré, sont limités au stade de glochidie enkysté sur le poisson hôte.

Menaces

La lampsile fasciolée fait face à une vaste panoplie de menaces dans toute son aire de répartition. Les huit catégories indiquées dans le tableau 2 représentent les menaces les plus probables aux populations canadiennes de lampsile fasciolée.

Tableau 2 : Menaces à la lampsile fasciolée
Menace Impact relatifprédominant/ contribuant Spatial/Temporel
répandue/locale, chronique/éphémère
Certitude
probable/ spéculative/inconnue
Envasement/Solides en suspension prédominant répandue / chronique probable
Espèces exotiques prédominant locale / chronique probable
Retenues contribuant locale / chronique probable
Qualité de l'eau – contaminants et nutriments contribuant répandue / chronique probable
Rupture de la relation avec le poisson hôte contribuant locale / chronique spéculative
Prédation contribuant locale / éphémère spéculative
Urbanisation contribuant locale / chronique spéculative
Activité récréative contribuant locale / éphémère inconnue

Envasement/Solides en suspension : Des apports élevés de vase peuvent étouffer les moules en bouchant les structures des branchies et peuvent également perturber les fonctions de reproduction en diminuant la probabilité de rencontrer un poisson hôte convenable (un prédateur visuel). La vulnérabilité à l'envasement varie d'une espèce à l'autre et il a été démontré que la lampsile fasciolée tolère légèrement les conditions d'envasement élevé durant les périodes de faible débit (Dennis 1984). Cependant, de récentes études effectuées dans le sud de l'Ontario révèlent que la lampsile fasciolée est associée à des zones à faibles charges de limon. La clarté des eaux ordinaires est plus élevée dans les zones où l'on retrouve la lampsile fasciolée que dans les zones où elle est absente et où la capture par unité d'effort est en corrélation positive avec la clarté de l'eau (Metcalfe-Smith et McGoldrick 2003).  
 
Espèces exotiques :
Les moules zébrées (Dreissena polymorpha) ont décimé les populations de moules d'eau douce dans les Grands Lacs inférieurs en éliminant pratiquement les habitats historiques dans le lac St. Clair (Nalepa et coll. 1996) et dans la partie ouest du lac Érié (Schloesser et Nalepa 1994). Bien que la lampsile fasciolée soit principalement une espèce fluviale, et donc moins à risque de subir une infestation par les moules zébrées, la présence de retenues peut augmenter le risque (se reporter à la section sur les retenues ci-dessous). Les moules zébrées posent un risque beaucoup plus grand pour la population du delta St. Clair : la dernière population de lac connue au Canada.

D'autres espèces exotiques peuvent nuire indirectement à la lampsile fasciolée en perturbant la relation avec le poisson hôte. Par exemple, dans le cas du chabot tacheté, on a observé un échec de recrutement et de fortes baisses d'abondance dans le bassin des Grands Lacs depuis l'introduction du gobie arrondi exotique (Neogobius melanostomus) (Dubs et Corkum 1996, Jannsen et Jude 2001). 
 
Retenues :
Il a été démontré que la construction de barrage dans le lit d'un cours d'eau nuit aux moules de bien des façons. Les réservoirs modifient les courbes de débit en aval et perturbent le profil thermique naturel du cours d'eau, tandis que les retenues agissent comme des barrières physiques qui pourraient séparer les moules de leur poisson hôte. Les retenues servent aussi à augmenter les périodes de rétention de l'eau, ce qui fait en sorte que les rivières sont plus vulnérables à l'invasion des espèces exotiques comme la moule zébrée. Les réservoirs dont les périodes de rétention dépassent 20 à 30 jours donnent le temps aux larves véligères de s'installer et d'agir comme populations de semences pour les sites en aval (Metcalfe-Smith et coll. 2000). On a signalé la présence de moules zébrées depuis le réservoir Fanshawe (UTRCA 2003) et le réservoir Springbank (comm. pers., S. Hohn, UTRCA, juin 2003) sur la rivière Thames durant 2003 (UTRCA 2003). À l'heure actuelle, ces deux infestations de moules zébrées sont en aval de la plupart des sections où l'on retrouve la lampsile fasciolée. Des infestations semblables, si elles devaient se produire dans les réservoirs de Wildwood ou Pittock, situés plus haut dans le réseau, pourraient s'avérer très néfastes pour les populations de lampsile fasciolée dans les rivières North et South Thames. La rivière Grand est fortement endiguée avec 34 barrages ou déversoirs (GRCA 1998) et l'établissement de la moule zébrée dans les réservoirs de Luther, de Belwood, de Guelph ou de Conestogo pourrait avoir une grave incidence sur le tronçon où l'on retrouve la lampsile fasciolée. 

Qualité de l'eau

Contaminants : Tout porte à croire que les moules sont sensibles aux BPC, au DDT, au Malathion et à la roténone qui peuvent inhiber la respiration et s'accumuler dans le tissu des moules (USFWS 1994). On a détecté des BPC dans le tissu des moules dans la rivière Middle Maitland (comm. pers. D. Kenny, MVCA, juillet 2003). Le stade de glochidie semble particulièrement sensible aux métaux lourds (Kellar et Zam 1990), à l'ammoniaque (Goudreau et coll. 1993; Mummert et coll. 2003)), à l'acidité (Huebner et Pynnonen 1992) et à la salinité (Liquori et Insler, tel qu'il est cité dans USFWS 1994).  Tandis que les moules d'eau douce, en tant que groupe, semblent être sensibles à une qualité médiocre de l'eau, deux contaminants s'avèrent particulièrement problématiques. Une recherche récente a révélé que la lampsile fasciolée, de même que la plupart des espèces de moules d'eau douce testées comptent parmi les organismes les plus sensibles à l'ammoniaque et au cuivre (Mummert et coll. 2003; Jacobsen et coll. 1997; données non publiées d'Ingersoll). Une comparaison des données de toxicité déclarées pour ces deux contaminants avec les Recommandations pour la qualité de l'eau en vue de la protection de la vie aquatique indique que les objectifs actuels pour l'ammoniaque (en NH3) sont probablement suffisants pour protéger la L. fasciola (tableau 3). Par contre, la CE50 pour le cuivre déclarée par Ingersoll (données non publiées) s'inscrit dans les limites des objectifs actuels pour la protection de la vie aquatique dans les eaux canadiennes. Compte tenu du fait que 50 % des L. fasciola testées ont montré des effets (croissance réduite ou décès) à des concentrations de cuivre variant de moins 5 à 7 µg/L, il est peu probable que les objectifs actuels de 2 à 5 µg/L protègent cette espèce contre les effets nocifs. Les niveaux de cuivre dépassaient ceux précisés dans les directives fédérales dans plusieurs sous-bassins de la rivière Copper dans lesquels on retrouve encore la lampsile fasciolée. Seuls les tronçons supérieurs de la rivière Grand ont des niveaux de cuivre qui ne dépassent pas les niveaux précisés dans les directives fédérales et ceux-ci correspondent aux seules parties du bassin versant où l'on retrouve la lampsile fasciolée (Metcalfe-Smith et coll. 2000). Les niveaux de cuivre dépassent ceux précisés dans les directives fédérales dans la rivière Middle Maitland également (comm. pers. D. Kenny, MVCA, juillet 2003).

Tableau 3. Toxicité de l’ammoniaque et du cuivre pour la Lampsilis fasciola aux stades glochidie et juvénile
Contaminant Stade testé Résultat Source Recommandations pour la qualité de l'eau
Ammoniaque non en NH3
(NH3-N)
Juvénile CL50 (mg/L) :
24 h : 0,28-0,36
48 h : 0,21-0,24
72 h : 0,.21-0,24
96 h : 0,21-0,25
Mummert et coll. (2003)

CCMEa : 0,019 mg/L

OPQEb : 0,020 mg/L

Ammoniaque (Total)

Glochidie

Juvénile

48 h CE50 :
6 mg/L
10 j. CE50 :
1,7 mg/L
Ingersoll (données non publiées)

 

s.o.

Cuivre

Glochidie

 

 

Juvénile

24 h CL50 :
26-48 µg/L1
48 h CE50 :
7 µg/L2
72 h CE50 :
4,7 µg/L2
10 j. CE50 :
4,8 µg/L2
1Jacobsen et coll. (1997)
2Ingersoll (données non publiées)

CCME :2-4 µg/L

OPQE :5 µg/L

a Conseil canadien des ministres de l’Environnement (CCME 2005)
bObjectifs provinciaux de qualité de l'eau de l'Ontario (OPQE 2005)

Nutriments : L'agriculture représente la principale utilisation des terres dans les bassins des rivières Ausable et Sydenham. La culture en rangs (maïs, haricots) prédomine dans le bassin versant de la rivière Ausable, tandis que la culture commerciale domine dans le bassin versant de la rivière Sydenham (Nelson 2000). La qualité de l'eau dans la rivière Ausable est généralement considérée comme étant médiocre à cause du lessivage des terres cultivées et de l'infiltration de fumier (ABCA 1995, ARRT 2003). Dans la rivière Grand, l'enlèvement de la végétation riveraine et le fait de laisser le bétail accéder à la rivière ont donné lieu à une mauvaise qualité de l'eau et à des charges solides accrues (WQB 1989a). On s'attend à ce que l'activité agricole s'accroisse dans le bassin de la rivière Grand au cours des 25 prochaines années, ce qui entraînera une augmentation potentielle du ruissellement des sédiments, des pesticides, des engrais et du fumier. La qualité de l'eau dans le bassin de la rivière Thames a toujours grandement souffert des activités agricoles. Le drainage par tuyaux enterrés, les égouts, l'entreposage et l'épandage de fumier et l'insuffisante conservation du sol ont tous concouru à la qualité médiocre de l'eau au sein du bassin de la rivière Thames (Metcalfe-Smith et coll. 2000). Les charges en phosphore et en azote ont augmenté régulièrement et on a signalé certaines des charges en bétail les plus élevées de tout le bassin des Grands Lacs dans le bassin versant de la rivière Thames (WQB 1989b).  Les concentrations moyennes en ammoniaque dans tous les sous-bassins de la rivière Thames dépassent celles précisées dans les recommandations fédérales relatives à la vie dulcicole (Metcalfe-Smith et coll. 2000).  On a signalé récemment que les moules d'eau douce juvéniles comptent parmi les organismes aquatiques les plus sensibles à la toxicité par l'ammoniaque (en NH3), celles-ci montrant généralement des réactions indésirables à des niveaux bien en deçà de ceux utilisés comme lignes directrices pour la sécurité aquatique dans les voies d'eau aux États-Unis (Newton 2003; Newton et coll. 2003). La population de la rivière Maitland découverte récemment fait face à des menaces découlant du lessivage des terres cultivées, 75 % des échantillons d'azote sur la rivière Middle Maitland dépassant les niveaux des recommandations fédérales pour ce qui est des effets négatifs sur la santé aquatique tandis que 56 % des niveaux de phosphore total dépassent ceux indiquant une forte probabilité de fleurs d'eau (comm. pers. D. Kenny, MVCA, juillet 2003).
 
Perturbation de la relation avec le poisson hôte :
Tout facteur qui a une incidence directe ou indirecte sur la répartition des poissons hôtes aura un effet sur la répartition de la lampsile fasciolée. L'achigan à petite bouche, l'espèce hôte probable, est très rare dans le bassin hydrologique de la rivière Sydenham (M. Poos, Université de Guelph, cité dans Metcalfe-Smith et McGoldrick 2003), ce qui peut expliquer la disparition de la lampsile fasciolée dans ce bassin versant.  Les populations d'achigan à petite bouche ont également été réduites dans la rivière Grand entre Cambridge et West Montrose, probablement par suite de la pression de la pêche à la ligne (Cooke et coll. 1998).    
 
Urbanisation :
Le bassin versant de la rivière Grand a une population d'environ 780 000 habitants et on s'attend à ce que celle-ci augmente de près de 40 % au cours des 20 prochaines années (GRCA1998; Krause et coll. 2001). Plus de 80 % de la population occupe moins de 7 % de cette zone. Les décharges d'eaux usées constituent un apport important dans ces zones urbaines qui ne fera que s'accroître avec l'accroissement de la population. Au sein du bassin de la rivière Thames, tous les émissaires industriels et 70 % des émissaires municipaux sont situés au sein des tronçons supérieurs fortement peuplés où l'on retrouve la lampsile fasciolée.     

Activités récréatives : Les tronçons de la rivière Grand où se trouve la lampsile fasciolée sont des endroits très prisés par les canoéistes. Metcalfe-Smith et coll.  (2000) ont observé que les pagayeurs en eau peu profonde ont souvent perturbé le lit du cours d'eau, créant ainsi la possibilité de déloger les moules et favorisant le transport en aval.  La popularité croissante des activités récréatives comme le canotage pourrait accroître davantage le stress imposé aux populations instables. 
 
Prédation :
La prédation par des prédateurs terrestres tels que les rats musqués (Ondatra zibethicus) et les ratons laveurs (Procyon lotor) s'est avérée un facteur contraignant important pour certaines populations (Neves et Odom 1989). Neves et Odom (1989) ont signalé que les rats musqués sont des prédateurs à la fois spécifiques à la taille et à l'espèce et qu'ils choisissent activement la lampsile fasciolée lorsqu'elle est disponible. Metcalfe-Smith et McGoldrick (2003) ont déclaré avoir observé la prédation des moules par des ratons laveurs dans les eaux de l'Ontario. Les activités humaines, telles que l'adoption de pratiques aratoires antiérosives, ont donné lieu à des augmentations subites des populations de prédateurs, ce qui risque d'accroître l'importance des menaces liées à la prédation dans l'avenir (Metcalfe-Smith et McGoldrick 2003).  Des agriculteurs du sud-ouest de l'Ontario ont signalé une augmentation subite de la population de ratons laveurs ces dernières années qui pourrait correspondre à l'adoption des pratiques aratoires antiérosives (Metcalfe-Smith et McGoldrick 2003). Cette observation anecdotique a besoin d'être vérifiée afin de quantifier les effets des activités humaines sur les populations de prédateurs

Tableau 4 : Menaces prédominantes pour la lampsile fasciolée dans chaque localité présentement ou historiquement occupée.
Localité Menace prédominante
Rivière Ausable Envasement, qualité de l'eau
Rivière Grand Poisson hôte, urbanisation
Delta du lac St. Clair Espèces exotiques (moules dreissenas)
Rivière Maitland Inconnue
Rivière Thames Qualité de l'eau; envasement; espèces exotiques
Grands Lacs (espèce disparue du Canada) Espèces exotiques (moules dreissenas)
Rivière Sydenham  (espèce disparue du Canada) Envasement (perturbation du cycle de reproduction); perte de l'hôte

Description de l'habitat

On retrouve généralement la lampsile fasciolée dans les rivières et cours d'eau à forte stabilité hydrologique, où l'eau est claire. Clarke (1981) et Cummings et Mayer (1992) ont signalé la présence de l'espèce sur les fonds de gravier ou sablonneux des radiers dans les cours d'eau de taille moyenne. Strayer (1983) a signalé la présence de la lampsile fasciolée au Michigan dans les cours d'eau de taille moyenne et de grande taille se caractérisant par de faibles pentes, des eaux claires, des écoulements constants et des substrats de sable et de gravier. Dennis (1984) a examiné les préférences d'habitat de 72 espèces dans le bassin de la rivière Tennessee et a signalé la présence de la L. fasciola dans les cours d'eau de petite taille (ruisseaux des ordres 2 à 4) et de taille moyenne (ordres 5 à 7). Dennis (1984) a déclaré que l'habitat le plus productif consistait en des substrats stables composés d'un mélange de particules fines, de gravier et de roches. Dans les eaux ontariennes, on retrouve habituellement l'espèce dans les substrats de sable ou de gravier des radiers peu profonds (< 1 m). Dans les Grands Lacs, on l'a retrouvée sur les hauts-fonds peu profonds lavés par les vagues (Metcalfe-Smith et McGoldrick 2003).

Habitat occupé actuellement

Description géospatiale :

L'habitat ayant besoin de conservation pour la lampsile fasciolée a été situé au plan géospatial à l'aide des méthodes élaborées par McGoldrick et coll. (sous presse) (figures 5 à 8), qui recommandent d'utiliser le logiciel d'inventaire des paysages aquatiques du ministère des Richesses naturelles de l'Ontario (ALIS version 1) (Stanfield et Kuyvenhoven 2005) comme unité de base pour la définition de l'habitat important dans les systèmes fluviaux. Le système ALIS emploie une approche de classification des vallées pour définir les segments de rivière ayant un habitat semblable et une continuité en fonction de l'hydrographie, de la géologie des dépôts meubles, de la pente, de la position, de la zone de drainage en amont, du climat, du couvert paysager et de la présence d'obstacles dans les cours d'eau. Pour les populations des Grands Lacs, lorsque les segments du système ALIS ne peuvent être employés, McGoldrick et coll. (sous presse) recommandent de déterminer l'habitat essentiel à l'aide d'un tampon de 5 km autour de la présence d'espèces connues. Le tampon de 5 km a été choisi à la lumière de l'étendue spatiale de l'échantillonnage historique dans le lac St. Clair. Dans tous les segments fluviaux identifiés, la largeur de la zone d'habitat essentiel qui a besoin d'une protection est définie comme la zone allant du milieu du chenal à la largeur de toute la rive pour les rives de droite et de gauche.

On peut ainsi résumer l'habitat occupé actuellement par la lampsile fasciolée:

  • Une section de 60 km du cours supérieur de la rivière Grand entre Inverhaugh et Cambridge (Metcalfe-Smith et McGoldrick 2003).
  • Une section de 30 km de la rivière North Thames au-dessus de London, y compris les ruisseaux Medway et Fish. Une section de 25 km de la rivière Middle Thames de London à Dorchester, ainsi que les tronçons inférieurs de la rivière Middle Thames depuis Thamesford jusqu'à son confluent avec la rivière Middle Thames; (T. Morris, Pêches et Océans Canada, Burlington, données non publiées).
  • Les tronçons inférieurs des rivières Middle, Little et South Maitland et la section de 45 km de l'embranchement principal de la rivière Maitland depuis Wingham jusqu'au confluent avec la rivière South Maitland.
  • La section inférieure de la rivière Little Ausable et un segment de 12 km du chenal principal de la rivière Ausable en amont de Nairn (Metcalfe-Smith et coll. 1999).
  • Une région de 12 km2 du delta St. Clair. (Zanatta et coll. 2002).
Description fonctionnelle :

Dans l'aire définie sous Description géospatiale, seules les zones satisfaisant aux caractéristiques décrites ci-après sont considérées comme représentant l'habitat nécessitant des mesures de conservation :

  • Zone inondée en permanence et
  • d'un ordre de courant supérieur à 2 (populations fluviales seulement) et
  • ayant des substrats de sable/gravier propres, parfois stabilisés par de plus grosses matières (pierres, rochers ou fond rocheux) et
  • habitat dans les radiers/rapides (populations fluviales seulement) ou
  • platins de sable peu profonds (populations des Grands Lacs) et
  • offrant l'accès à des exemplaires hôtes convenables durant la période de gravidité (du 1er juin au 15 octobre).
Activités susceptibles de perturber l'habitat occupé actuellement

Diverses activités pourraient avoir un effet négatif sur l'habitat occupé actuellement. La destruction directe de l'habitat pourrait découler d'activités dans l'eau comme le dragage, les traversées routières, la construction de pipelines ou de barrages. Les activités terrestres qui nuisent à la qualité de l'eau ou à la quantité d'eau pourraient également avoir une incidence négative sur l'habitat occupé actuellement. Ces activités pourraient comprendre, entre autres, l'apport de nutriments, de sédiments et de substances toxiques transportés par des eaux pluviales non traitées, la culture des terres riveraines, l'accès libre du bétail à la rivière, les ouvrages de canalisation et de dragage, les prises d'eau, l'extraction des agrégats et le rejet des eaux usées traitées incorrectement.

McGoldrick et coll. (sous presse) ont déterminé plus tôt un certain nombre de valeurs seuils que l'on peut utiliser pour évaluer la probabilité qu'une activité exerce une influence négative sur l'habitat occupé actuellement ou le détruise. Toute activité qui dépasse les valeurs seuils précisées au tableau 5 doit être considérée comme étant susceptible de détruire l'habitat occupé actuellement.

Tableau 5 : Valeurs seuils pour déterminer la probabilité qu'une activité exerce une influence négative sur l'habitat occupé actuellement
Variable Seuil
ammoniaque (en NH3)
0,21 mg/L
ammoniaque total
1,7 mg/L
cuivre
4,7 µg/L
phosphore total
0,05 mg/L
rapport nitrate-nitrite
2,0 mg/L
turbidité
8 u. T. J.
potassium
6 mg/L

Dans le cas des moules d'eau douce, il est nécessaire de considérer non seulement les composantes physiques et chimiques de l'habitat mais également les éléments biologiques. Toute activité qui perturbe la connectivité entre les populations de lampsiles fasciolées et leurs espèces hôtes (voir la section sur le cycle biologique et la reproduction) peut entraîner la destruction de l'habitat occupé actuellement. Les activités qui peuvent perturber la relation moule-hôte comprennent, entre autres, les barrages, l'assèchement et la pêche. Il est à noter que les activités se déroulant à l'extérieur de la zone d'habitat occupé actuellement peuvent avoir une incidence sur la population hôte dans la zone (p. ex. les activités de construction de barrage en aval peuvent empêcher le mouvement du poisson dans la zone durant la période de reproduction des moules (du 1er juin au 15 octobre). Toute activité ayant une incidence sur une population hôte dans une aire d'habitat occupé actuellement devrait être évaluée pour s'assurer que le cycle de reproduction n'est pas perturbé.

Figure 5 : Habitat occupé actuellement par la lampsile fasciolée (Lampsilis fasciola) dans les Grands Lacs et les voies interlacustres.

Figure 5 : Habitat occupé actuellement par la lampsile fasciolée (Lampsilis fasciola) dans les Grands Lacs et les voies interlacustres.

Figure 6 : Habitat occupé actuellement par la lampsile fasciolée (Lampsilis fasciola) dans la rivière Thames supérieure et la rivière Ausable.

Figure 6 : Habitat occupé actuellement par la lampsile fasciolée (Lampsilis fasciola) dans la rivière Thames supérieure et la rivière Ausable.

Figure 7 : Habitat occupé actuellement par la lampsile fasciolée (Lampsilis fasciola) dans la rivière Maitland.

Figure 7 : Habitat occupé actuellement par la lampsile fasciolée (Lampsilis fasciola) dans la rivière Maitland.

Figure 8 : Habitat occupé actuellement par la lampsile fasciolée (Lampsilis fasciola) dans la rivière Grand supérieure.

Figure 8 : Habitat occupé actuellement par la lampsile fasciolée (Lampsilis fasciola) dans la rivière Grand supérieure.

Habitat occupé historiquement

L'habitat occupé historiquement comprend un segment de 40 km de la rivière Sydenham est et un petit segment de la rivière Grand inférieure près de York. Bien que les rivières St. Clair et Detroit, le lac St. Clair (sauf le delta) et le bassin ouest du lac Érié représentent l'habitat occupé historiquement, ce sont des sites de faible priorité pour le rétablissement en raison de la forte abondance de moules dreissenas en ces endroits.

Habitat essentiel

La détermination de l'habitat essentiel nécessite une connaissance approfondie des besoins des espèces durant tous les stades de la vie ainsi qu'une compréhension de la répartition, de la quantité et de la qualité de l'habitat dans toute l'aire de l'espèce. À l'heure actuelle, cette information n'est pas disponible pour la lampsile fasciolée, bien que le tableau 6 présente des activités qui pourraient aider à obtenir l'information requise. Les activités figurant dans le tableau 6 ne sont pas exhaustives mais soulignent la portée des mesures déterminées par l'OFMRT comme étant nécessaires pour déterminer l'habitat essentiel de la lampsile fasciolée. Il est probable que le processus d'étude des mesures du tableau 5 conduira à la découverte d'autres lacunes des connaissances qui devront être comblées. Jusqu'à ce que l'habitat essentiel puisse être défini, l'équipe de rétablissement a désigné les zones figurant dans la section sur l'habitat occupé actuellement comme des zones nécessitant des mesures de conservation.

Tableau 6 : Calendriers des activités de détermination de l'habitat essentiel
Activité Délai approximatif1
Entreprendre des relevés des populations de moules 2006-2008
Évaluer les conditions de l'habitat dans les zones occupées (p. ex. débit, substrat, clarté et qualité de l'eau) 2006-2008
Déterminer les différences d'utilisation de l'habitat selon les stades de vie 2007-2009
Arpenter et cartographier les zones d'habitat approprié mais inutilisé dans l'aire historique 2008-2010
Évaluer la structure génétique des populations 2006-2008
Déterminer les espèces de poissons hôtes 2006
Entreprendre des relevés des populations de poissons hôtes 2006-2008
Évaluer l'utilisation de l'habitat par les espèces hôtes 2006-2008
Déterminer les zones de chevauchement entre l'habitat des moules et celui des hôtes 2009-2010

1 Les délais peuvent être changés au fur et à mesure que de nouvelles priorités se présentent par suite des demandes changeantes imposées aux ressources ou au personnel.

Tendances des habitats

La plus grande partie du lac St. Clair (sauf le delta), la rivière Detroit et le bassin ouest du lac Érié ne constituent plus un habitat convenable pour la lampsile fasciolée à cause de l'infestation par les moules dreissenas. Il existe de fortes indications montrant que le manque de clarté de l'eau limite la répartition de la lampsile fasciolée (Metcalfe-Smith et McGoldrick, 2003). Les niveaux élevés de turbidité et de solides en suspension dans les rivières Sydenham et Ausable ont rendu impropres de grandes parties de l'habitat. La clarté de l'eau dans les tronçons occupés des rivières Grand, Thames et Maitland ne semblent pas poser de problème.

Protection de l'habitat

La Loi sur les espèces en péril (LEP) fédérale a été proclamée en juin 2003. En vertu de la LEP, il y a des interdictions générales de tuer, blesser, prendre, posséder, capturer et collectionner la lampsile fasciolée, et d'endommager ou de détruire les résidences des individus de ces espèces, ainsi que des interdictions relatives à la destruction de l'habitat essentiel. La Loi sur les pêches représente un outil important pour la protection de l'habitat et, de concert avec d'autres lois fédérales sur l'environnement, elle est complémentaire à Loi sur les espèces en péril. En vertu de la Loi sur les pêches fédérale, les moules sont considérées comme des mollusques et crustacés, entrant dans la définition de « poisson », et leur habitat est donc protégé contre la détérioration, la destruction ou la perturbation à moins d'y être autorisé par le ministre des Pêches et des Océans ou son fondé de pouvoir. Les autorités chargées de la planification urbaine doivent être d'accord avec l'énoncé de principe provincial en vertu de l'article 3 de la Loi sur l'aménagement du territoire de l'Ontario's, qui interdit l'aménagement et la modification des sites dans les habitats importants des espèces en péril. La Loi sur l'aménagement des lacs et des rivières de l'Ontario interdit la retenue ou la dérivation d'un cours d'eau si elle conduit à l'envasement, tandis que le programme d'aménagement des terres II volontaire du ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Affaires rurales de l'Ontario vise à réduire l'érosion sur les terres agricoles. L'aménagement des dérivations en Ontario est géré par la réglementation sur la plaine inondable appliquée par les offices de protection de la nature locaux.

La plupart des terres adjacentes aux rivières où la lampsile fasciolée est présente sont de propriété privée; cependant, le fond de la rivière appartient généralement à la Couronne. La municipalité de Southwestern Middlesex (anciennement canton de Mosa) possède une section de forêt de 20 ha le long du tronçon de la rivière Sydenham où l'on a trouvé des coquilles de lampsile fasciolée en 1997 (Muriel Andreae, Office de protection de la nature de la région St. Clair (SCRCA), cité dans Metcalfe-Smith et coll. 2000) et le SCRCA possède environ 1 816 ha de propriété dans le bassin versant. L'Office de protection de la nature d'Ausable Bayfield (ABCA) possède environ 1 830 ha de propriété partagés entre un certain nombre d'emplacements dans le bassin de la rivière Ausable (K. Vader, ABCA, cité dans Metcalfe-Smith et coll. 2000) et l'Office de protection de la nature de la vallée Maitland possède 28 propriétés couvrant 1 800 ha au sein du bassin versant de la rivière Maitland, y compris un site où l'on a trouvé la lampsile fasciolée (Office de protection de la nature de Wawanosh). Une grande partie des terres adjacentes au site de refuge identifié dans le delta du lac St. Clair sont à l'intérieur des frontières de la Première Nation de Walpole Island (Zanatta et coll. 2002).

Rôle écologique

Les moules d'eau douce jouent un rôle intégral dans le fonctionnement des écosystèmes aquatiques. Vaughn et Hakenkamp (2001) ont résumé une grande partie de la documentation relative au rôle des unionidés et ont détecté de nombreuses fonctions de filtrage dans la colonne d'eau (alimentation sélective à la taille, sélection du phytoplancton spécifique à l'espèce, cycle nutritif, contrôle de l'abondance du phosphore) et des processus de sédimentation (dépositivores diminuant la matière organique des sédiments, bio-dépôt des fèces et pseudo-fèces, invertébrés épizoïques et algues épiphytiques colonisant les coquillages, densités des invertébrés benthiques en corrélation positive avec la densité des moules) assurés par la présence de moulières. Welker et Walz (1998) ont démontré que les moules d'eau douce peuvent limiter le plancton dans les rivières européennes alors que Neves et Odom (1989) signalent que les moules jouent également un rôle dans le transfert de l'énergie à l'environnement terrestre par la prédation par les rats musqués et les ratons laveurs.

Importance pour les gens

Bien que ces espèces soient sans importance économique apparente, les moules d'eau douce sont sensibles à la pollution de l'environnement et une communauté de moules diverse indique un écosystème sain. En plus de la biodiversité qui diminue au Canada, le déclin de la lampsile fasciolée peut indiquer une détérioration accrue de l'environnement des cours d'eau du sud-ouest de l'Ontario qui nuirait aux gens qui utilisent l'eau de surface pour boire, pour les activités récréatives ou pour abreuver le bétail. Le rétablissement de l'espèce peut nécessiter la participation des pêcheurs à la ligne, car l'espèce hôte probable, l'achigan à petite bouche, est un poisson de sport très prisé.

Conflits ou difficultés prévus

La pénurie générale de spécialistes malacologiques dans le sud de l'Ontario et la retraite de deux importants experts en la matière vont poser un problème de continuité au cours de la période quinquennale de mise en œuvre de ce programme de rétablissement. Il faudra combler les vides créés par ces départs à la retraite et former de nouveaux spécialistes afin de poursuivre les programmes de recherche de ces scientifiques et de veiller à ce que les approches décrites dans ce programme  soient abordées efficacement.

Le rétablissement de populations viables dans les rivières Ausable et Sydenham nécessitera un rétablissement à l'échelle des bassins versants avant toute réintroduction de la lampsile fasciolée. Des améliorations cruciales des zones riveraines peuvent être accomplies à court terme; il peut toutefois s'agir de solutions éphémères car elles sont susceptibles de renversement en cas de changement de propriétaire foncier.

Lacunes des connaissances

Besoins en matière de relevés
Bassin versant Emplacement Raison
Ausable Marais Hay, Little Ausable, chenal principal en aval de Nairn Déterminer l'étendue, l'abondance et les données démographiques de la lampsile fasciolée.
Grand Affluents, y compris la rivière Conestogo
Rivière Maitland Tronçons supérieurs des 4 embranchements
Thames Tronçons inférieurs et affluenttributaries
Lac St. Clair Delta

Ces emplacements représentent les zones pour lesquelles l'équipe de rétablissement a déterminé que les données à leur sujet sont présentement insuffisantes. Suivant les besoins, d'autres zones peuvent faire l'objet de relevés dans l'avenir. Aucun relevé supplémentaire n'est prévu pour la rivière Sydenham, l'OFMRT étant satisfaite des relevés effectués à cet endroit.

Exigences en matière de recherche biologique/écologique

Exigences en matière de recherche

Détails
Détermination du poisson hôte
Étudier d'autres hôtes potentiels.

Multiplication des juvéniles
Élaborer un protocole pour l'élevage de moules juvéniles dans des conditions de laboratoire.

Génétique – variabilité
Examiner le degré de variation dans l'aire canadienne de répartition et comparer à la variabilité dans l'aire globale afin d'aider à déterminer la pertinence des efforts d'augmentation et à sélectionner les populations de départ si cette mesure est justifiée.

Génétique – directives de multiplication
Élaborer des directives de multiplication saines du point de vue génétique pour les moules d'eau douce en estimant le nombre d'individus requis pour maintenir ou réintroduire 95 % de la variation génétique connue dans les populations multipliées.

Génétique – phylogénétique moléculaire
Déterminer si les trois morphologies de leurre constatées dans les populations canadiennes sont en fait monophylétiques ou sont des taxons-soeurs.

Exigences en matière de clarification des menaces

Menace
Détails

Espèces exotiques
Examiner la menace que pose la moule zébrée à la lampsile fasciolée au sein du site de refuge du delta St. Clair.
Examiner la dynamique du poisson hôte en rapport avec l'espèce exotique ( p. ex. chabot tacheté et gobie).

Activité récréative
Déterminer si l'activité récréative pose une menace sérieuse à la lampsile fasciolée.

Prédation
Quantifier les niveaux de prédation. Suivre les changements dans l'abondance des prédateurs en réponse aux changements causés par l'homme dans l'environnement ( p. ex. urbanisation, pratiques agricoles).

Toxicité
Déterminer la vulnérabilité de tous les stades aux polluants connus ou dont la présence est soupçonnée. Mettre l'accent initial sur les glochidies et le stade juvénile, lesquels sont connus pour être les plus sensibles.

Clarté de l'eau
Vérifier l'hypothèse selon laquelle la clarté de l'eau limite le succès reproducteur de la lampsile fasciolée.

Faisabilité biologique et technique du rétablissement

On croit que le rétablissement de la lampsile fasciolée est possible biologiquement et techniquement car il existe encore des populations reproductrices comme sources éventuelles pour soutenir le rétablissement, l'habitat approprié peut être rendu disponible par des mesures de rétablissement, les menaces peuvent être atténuées et des techniques de rétablissement proposées seraient efficaces.

  1. Les moules croissent lentement et les individus sédentaires dépendent de leur poisson hôte pour la survie et la dispersion des jeunes. Le rythme lent de la croissance des populations prolonge le processus de rétablissement des populations décimées.
  2. L'habitat qui soutient cette espèce dans la rivière Grand supérieure et la rivière Thames semble être de qualité supérieure en raison de la grande clarté de l'eau et des preuves solides du succès de la reproduction. L'habitat actuel de la rivière Ausable est de piètre qualité à cause de la turbidité élevée ou de la mauvaise qualité de l'eau. L'habitat anciennement occupé dans la rivière Sydenham est aussi de piètre qualité à cause du manque de clarté de l'eau et de l'absence du poisson hôte. Les eaux du delta du lac St. Clair sont claires et propres, mais l'habitat est de qualité médiocre à cause de la présence de la moule dreissena. L'habitat dans la rivière Maitland semble être de qualité supérieure, mais il est encore nécessaire de procéder à une autre évaluation.
  3. L'habitat des rivières Sydenham et Ausable pourrait être amélioré considérablement avec une intendance appropriée des terres agricoles et urbaines dans chaque bassin versant.
  4. Les réductions de l'érosion du sol et de la turbidité dans tous bassins versants sont possibles mais seraient difficiles en raison du nombre et de l'intensité des impacts.
  5. L'élimination complète des impacts de la moule dreissena sur les populations des Grands Lacs est impossible, mais il serait possible d'établir des sites de refuge gérés dans le delta du lac St. Clair.
  6. La multiplication artificielle de la lampsile fasciolée a été réussie aux États-Unis (Hanlon et Neves 2000).

La lampsile fasciolée est naturellement un élément rare de la communauté de moules où on la trouve. Le niveau d'effort requis pour rétablir l'espèce serait faible (p. ex. préservation de l'habitat) pour les rivières Grand, Thames et Maitland Rivers, modéré pour le delta St. Clair (sites de refuge gérés, élimination de la moule zébrée), élevé pour la rivière Ausable (p. ex. translocation, augmentation des populations à long terme) et élevé pour la rivière Sydenham qui nécessite probablement la réintroduction de la moule et de l'achigan à petite bouche.

Échelle de rétablissement recommandée

Bien que l'aire de répartition de la lampsile fasciolée soit géographiquement restreinte à l'échelle nationale, elle est relativement répartie d'une manière générale dans le sud de l'Ontario où on la trouve encore vivante dans 4 rivières principales (Ausable, Grand, Maitland, Thames) et dans le lac St. Clair. Des programme s de rétablissement des écosystèmes aquatiques sont en voie d'élaboration pour les rivières Ausable et Thames. Bien que ces programme s tiennent compte de la lampsile fasciolée, on ne peut pas uniquement compter sur elles pour protéger cette espèce car chacune se concentre sur une petite partie seulement de l'aire totale de répartition. Boersma et coll. (2001) ont signalé que les espèces visées par les plans pour des écosystèmes sont quatre fois moins susceptibles de montrer une amélioration par rapport aux espèces visées par les plans pour une seule espèce en partie parce que l'on consacre généralement moins de temps et d'argent à chaque espèce dans les plans pour des écosystèmes. Une approche se penchant sur une seule espèce est nécessaire pour s'assurer qu'aucun élément crucial n'est omis des plans pour des écosystèmes et pour représenter le seul moyen de protection dans les bassins versants où il n'existe pas de programme s écosystémiques (rivière Grand, rivière Maitland, lac St. Clair). Si des plans pour des écosystèmes sont élaborés dans l'avenir pour ces bassins versants, la programme  pour une seule espèce fournira une solide assise sur laquelle les fonder.

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