Camassie faux scille (Camassia scilloides) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 6

Biologie

Généralités

La camassie faux-scille fleurit au milieu du printemps, entre la mi-mai et la fin mai, période où les insectes pollinisateurs sont abondants. Comme les autres plantes printanières éphémères des forêts, la camassie faux-scille perd ses feuilles et sa hampe florale avant le milieu de l’été. D’après les observations en milieu naturel, la plante produit une grande quantité de graines. Les graines germent au printemps suivant, dès que le sol se réchauffe (observation de l’auteur dans son jardin). Les graines, dures et sèches, ne semblent pas recherchées par les fourmis ni d’autres agents éventuels de dissémination; il semble plutôt que les capsules, une fois sèches et ouvertes, laissent simplement échapper les graines du haut de la longue hampe fructifère. Selon Oldham (1988), la multiplication végétative par rejets du bulbe n’est pas courante. Les observations effectuées sur le terrain pour le présent rapport confirment cette constatation.

Reproduction

Les jours ensoleillés, les fleurs sont butinées par une multitude d’insectes (papillons, bourdons, halictes, petites abeilles solitaires, bombyles et syrphes), mais ceux-ci sont rares ou absents les jours nuageux ou pluvieux.

Des individus ont été sortis de terre pour vérifier si l’espèce se propage par voie végétative. Plusieurs bulbes parvenus à maturité ont été examinés attentivement, et aucun ne présentait de rejets ou de bulbilles. Toutefois, un nombre considérable de bulbes de petite taille se trouvaient parmi les bulbes de pleine taille et manifestement séparés de ces derniers, de sorte qu’on peut penser qu’il s’agit de semis de différents âges. La présence au sein d’une même colonie de fleurs de différentes couleurs (blanches, bleu très pâle et bleu pâle) témoigne d’une variabilité génétique qui ne se trouverait pas dans une colonie se multipliant uniquement par voie végétative et confirme la conclusion concernant l’origine des bulbes de petite taille.

Survie

Le fait que les sites de la camassie faux-scille ne se soient pratiquement pas déplacées au cours des deux dernières décennies indique que la plante a probablement une longue vie. Depuis peu, la prolifération rapide des colonies de cormorans pose une menace pour la survie de la camassie. Ces oiseaux se trouvent en grands nombres dans les petites îles où pousse la camassie et ont sur l’espèce un impact direct par leur piétinement du sol et un impact indirect par l’action de leurs fientes, qui tuent une grande partie de la végétation, y compris les arbres dans lesquels ils nichent. L’habitat de l’espèce est alors envahi par des mauvaises herbes qui forment une couverture dense. Pas plus tard qu’en 1993, les aires de nidification du cormoran dans l’île Middle étaient considérées comme aires d’espèces animales rares. La population de camassie faux-scille de l’île Middle a perdu une part importante de son effectif, et celle de l’île East Sister n’a pas été retrouvée lors des relevés effectués en mai 2001. Aucun des sites de l’espèce ne présente de signes de broutage important ou de déracinement de bulbes.

Dissémination

Les graines sont dispersées au moment de la déhiscence des capsules, encore attachées au pied ou tombées au sol, de sorte qu’elles demeurent tout près des individus porteurs. Anguleuses, sèches et dures, elles ne semblent posséder aucune adaptation particulière favorisant la dissémination. Le regroupement des individus en touffes, la coexistence de fleurs de différentes couleurs et la présence d’un grand nombre d’individus non florifères parmi les individus reproducteurs sont autant d’indices d’une dissémination locale. Par ailleurs, on observe parfois dans un même habitat plusieurs colonies voisines poussant en groupes serrés; le mécanisme donnant lieu à l’établissement d’une nouvelle colonie n’est pas encore élucidé.

Nutrition et interactions interspécifiques

Les colonies de camassie faux-scille poussant sur des sols riches partiellement ombragés sont vigoureuses, même dans les cas où le sol ne dépasse guère 10 cm d’épaisseur (observation faite dans l’alvar du chemin Stone). Il semble que la présence d’insectes butineurs joue un rôle important dans la production de graines, mais pour le confirmer, il faudrait mettre un certain nombre de fleurs à l’abri des butineurs, puis comparer leur production avec celle de fleurs butinées.

Le cormoran à aigrettes a un effet dévastateur sur les populations de la camassie faux-scille : aucun individu de l’espèce n’a été observé dans l’île East Sister en 2000 (M.J. Oldham, comm. pers.) ni en mai 2001 (travaux sur le terrain pour le présent rapport), et les relevés effectués en mai 2001 dans l’île Middle ont révélé une forte baisse de cette population.

Adaptabilité

Dans les îles du lac Érié, l’espèce pousse sur des sols riches plus ou moins profonds et à substratum calcaire, où l’ombrage des arbres forestiers est de léger à modéré. Plus au sud, on la trouve dans les boisés de plaines inondables, où le sol est généralement profond.

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