Chabot du versant est (populations des rivières St. Mary et Milk) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 8

Biologie

Généralités

L'information sur le cycle vital du chabot du versant est, malheureusement limitée, se fonde sur un nombre restreint d'études concernant les populations de C. bairdii d'autres bassins de l’Ouest. Il semble que Bailey (1952) pourrait faire référence au même taxon. La seule étude qui décrit précisément le cycle vital du chabot du versant est a été réalisée par Roberts (1988).

Roberts (1988) a remarqué que la fraye de toutes les espèces de Cottus de l'Alberta, y compris le chabot du versant est, avait lieu à la fin du printemps. Il a observé plus précisément que des mâles protégeaient les œufs dans le ruisseau Lee, un affluent de la rivière St. Mary, à la mi-mai, alors que la température de l'eau était de 15 oC (Roberts, 1988). Il a également remarqué que seules des femelles gravides (aucun mâle protégeant les nids n’a été observé) avaient été vues dans le cours principal de la rivière St. Mary lorsque la température de l'eau était de 7,5 oC, ce qui porte à croire que la fraye s'amorce lorsque la température atteint un certain seuil qui se situerait entre 7,5 oC et 15 oC.


Reproduction

La saison de fraye des espèces de Cottus varie largement et peut avoir lieu entre février et août selon l’endroit (résumé dans Bailey, 1952). Bailey (1952) a mené une étude assez détaillée sur l'écologie de la fraye du chabot des montagnes Rocheuses dans le sud-ouest du Montana. De manière générale, les mâles arrivent avant les femelles aux sites de fraye et sont fertiles plus tôt. De plus, les mâles sont hautement polygames et s'accouplent avec de 1,5 à 4 femelles, allant parfois jusqu’à 12. La femelle du C. bairdii pond une grappe d’œufs à un seul endroit, sur ou sous les roches, et un seul mâle demeure près du nid jusqu'à plusieurs semaines, pendant la ponte, l'incubation et les premiers stades embryonnaires (Peden, 2000; Bailey, 1952). Selon Bailey (1952), ces mâles ne jouent pas le rôle de gardiens, mais nettoient plutôt les nids de la vase et des autres débris. Enfin, Bailey (1952) a découvert que plus d'une femelle pouvaient pondre au même endroit (Bailey, 1952).

Les chabots capturés dans les rivières St. Mary et Milk pondent en général entre 100 et 250 œufs, mais une grosse femelle (longueur totale de 80,7 mm (LT – longueur en ligne droite du bout du museau à l’extrémité de la nageoire caudale) contenait 354 œufs (Roberts, 1988). Peden et Hughes (1984) ont capturé dans la rivière Flathead une femelle d'une longueur standard de 53 mm (LS – longueur en ligne droite du bout du museau à l’extrémité du pédoncule caudal) qui portait 128 œufs et une de 99 mm LS qui en portait 690. Les œufs du chabot du versant est éclosent généralement en deux à trois semaines, selon la température (Roberts, 1988). Les jeunes de l'année mesuraient entre 30 et 40 mm LT à la fin de leur premier été et ceux d'un an mesuraient au moins 50 mm (Roberts, 1988). Ces données sont similaires à celles obtenues pour la rivière Flathead, où les jeunes de l'année mesuraient en moyenne 37 mm LS à la fin de l'été (Hughes et Peden, 1984). Dans la rivière Flathead, les mâles d'un an mesuraient en moyenne 64,4 mm LS et les femelles d'un an 48,6 mm LS, en octobre (Hughes et Peden, 1984). La croissance des chabots à tête courte dans la rivière Big Lost, en Idaho, était de 10 à 20 mm environ par année (Gasser et al., 1981).

Chez les chabots du versant est, on estime que les deux sexes atteignent la maturité sexuelle à l'âge de 23 mois, même si l'âge d'aucun individu n'a été déterminé (Roberts, 1988). La seule femelle mature capturée dans la rivière Flathead, âgée de deux ans, mesurait 71,4 mm LS (Hughes et Peden, 1984). La plus petite femelle mature capturée dans les rivières Milk et St. Mary mesurait 52,3 mm LT, mais son âge n'a pas été estimé (Roberts, 1988). Ces observations concordent avec les données recueillies ailleurs pour le C. confusus et le C. bairdii. Le plus jeune âge de première maturation chez le C. confusus en Colombie-Britannique est probablement de deux ans. La plus petite femelle mature capturée avait une longueur standard de 42 mm (Peden, 2001). De façon similaire, tous les individus de chabot des montagnes Rocheuses qui étaient parvenus à maturité sexuelle avaient au moins deux ans et mesuraient 57 mm LT ou plus (Bailey, 1952).


Survie

Il n'existe aucune donnée sur la longévité de cette espèce, mais on évalue que les chabots à tête courte vivent tout au plus cinq ans et qu'ils se reproduisent probablement chaque année (Peden, 2001). On a également observé que le chabot à tête courte de Big Lost Creek, en Idaho, se reproduisait chaque année (Gasser et al., 1981).


Physiologie

Il existe très peu de données sur la physiologie du chabot du versant est. Dans la rivière Milk, celui-ci n'est présent que dans les cours supérieurs et moyens, ce qui laisse penser qu'il préfère les eaux froides et limpides, comme c'est le cas pour le chabot du Columbia (Peden, 2000). Willock (1969) a avancé l’hypothèse que la température de l'eau était le facteur qui influait le plus sur la répartition des chabots. La température joue peut-être également un rôle dans la fraye, qui a lieu dans une plage thermique de 7,5 °C à 15 °C (Roberts, 1988).


Déplacements et dispersion

Il est peu probable que le « chabot tacheté » ou le chabot à tête courte entreprennent une longue migration pendant l'année, puisque des individus des deux espèces ont été capturés aux mêmes endroits, en Colombie-Britannique, au printemps, en été, en automne et en hiver (Peden, 2001). Peden et Hughes (1984) ont aussi constaté que les chabots à tête courte, juvéniles et adultes, n'entreprenaient pas de longue migration. Peden (2000) a en outre remarqué que le domaine vital du « chabot tacheté » en Colombie-Britannique était de moins de 5 m2. Bailey (1952) avait également observé que la dispersion maximale des C. bairdii punctulatus marqués au Montana n'était que d'environ 143 m. Enfin, l'étude des différences génétiques entre les petits affluents (fondée sur l'électrophorèse des allozymes) suggère qu'il n'y a pratiquement aucun déplacement (ou du moins aucun flux génique) parmi les populations de C. confusus dans les affluents séparés par au moins 10 km en Colombie-Britannique, et des différences mineures ont aussi été observées chez le C. bairdii (Peden, 2000). Bien qu'il n'existe aucune donnée sur les déplacements des chabots du versant est, ceux-ci ont fort probablement les mêmes habitudes comportementales que les espèces observées dans les études citées précédemment.


Alimentation et relations interspécifiques

Les chabots cherchent principalement leur nourriture la nuit, mais cette quête dépend quelque peu de l'espèce. Une récente étude a observé que les chabots à tête courte du bassin du Columbia restaient la nuit en eau vive, où ils se nourrissent d'insectes à la dérive sur le côté en amont des roches (McPhail, 2001). De manière générale, les habitudes alimentaires du C. bairdii et du C. confusus semblent similaires (Peden, 2000, 2001). Ces chabots se nourrissent principalement de larves d'insectes aquatiques, mais également de mollusques, de poissons et même d'œufs de chabots (Bailey, 1952; Peden, 2000, 2001; Paetz, 1993). De la même manière, Bailey (1952) a observé que l'alimentation du C. bairdii punctulatus, au Montana, se composait presque exclusivement (99,7 %) d'insectes aquatiques benthiques, mais aussi dans une moindre mesure (0,3 %) de gastéropodes, de bivalves, d’hydrachnes, d'œufs de chabots et de poissons.

Les chabots peuvent manger les œufs d'autres poissons et faire partie de l'alimentation d’autres poissons, comme l’omble de fontaine (Salvelinus fontinalis) ou l'achigan à petite bouche (Micropterus dolomieu), ou même de serpents (Deason, 1939; Scott et Crossman, 1974). On ne connaît pas les interactions parasitaires chez le chabot du versant est, mais des infestations de larves de cestodes (Proteocephalus ambloplitis, P. sp.) et de trémadotes (Tetracotyle sp., Diplostomum sp.) ont été observées chez le C. bairdii de l’est du Canada (Bangham et Hunter, 1939; Bangham, 1955). Ce dernier est en outre porteur de l’Aeromonas salmonicida, bactérie responsable de la furonculose chez les poissons (Rabb et McDermott, 1962). En plus des trémadotes et des cestodes, Hoffman (1967) mentionne les protozoaires, les nématodes, les acanthocéphales, les mollusques et les crustacés au nombre des parasites associés.


Comportement et adaptabilité

Comme mentionné précédemment, la température de l'eau est un facteur crucial dans la répartition du chabot du versant est; toutefois, le niveau de l'eau a lui aussi une grande importance (R.L. & L., 2002). En raison de la zone d'occupation restreinte (< 300 km2) et des épisodes d'extrême sécheresse qui se produisent dans les prairies, le chabot du versant est se trouve vulnérable à de tels événements stochastiques. Par exemple, le débit insuffisant résultant de la sécheresse ainsi que des retenues, des dérivations et des prélèvements d'eau est certainement à l'origine des changements dans la répartition qui se sont produits depuis les années 1960 (Paetz, 1993; R.L. & L., 2002). Les populations du cours supérieur de la rivière Milk ont disparu en raison du manque d'eau, quoique Clayton (comm. pers., 2004) estime qu'il s'agit plutôt d'une expansion non réussie : lorsque le bras principal de la rivière Milk s'assèche, certains poissons se trouvent pris au piège et meurent. Lorsque le débit d'eau est suffisant, certains poissons peuvent se déplacer vers l’amont dans la rivière Milk Nord et poursuivre leur remontée les années suivantes si les conditions le permettent. Les années de sécheresse, le cycle s'inverse. Par conséquent, Clayton estime que cette limitation est attribuable à la disponibilité de l'eau.

Il est également possible que les chabots aient disparu en aval du réservoir dans la rivière St. Mary. Il se peut que le chabot du versant est ait été présent dans la rivière St. Mary, en aval du barrage, avant la construction du réservoir, mais qu'il n'ait pu tolérer la température plus élevée de l'eau (Clayton, comm. pers., 2004). Certains indices suggèrent qu'il pourrait y avoir une certaine fragmentation dans les bassins hydrographiques (voir la section Aire de répartition canadienne). Les disparitions locales pourraient donc bloquer le flux génique et accroître la fragmentation. Les gènes et les chabots de la rivière St. Mary, au Montana, en amont du canal St. Mary, pourraient aboutir dans les rivières Milk ou St. Mary au Canada; toutefois, les chabots ne peuvent passer de la rivière Milk à la rivière St. Mary, et les chabots de la rivière St. Mary au Canada ne peuvent passer à la rivière Milk (Clayton, comm. pers., 2004). En cas de catastrophe, le chabot du versant est pourrait bien disparaître de l'Alberta.

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