Programme de rétablissement de l’éléocharide fausse-prêle (Eleocharis equisetoides) au Canada [Proposition] 2006

  1. Table des Matières
  2. Évaluation de l’espèce par le COSEPAC
  3. Contexte
  4. Rétablissement
  5. Références
  6. Personnes-ressources
  7. Annexe 1

La série de Programmes de rétablissement de la Loi sur les espèces en péril

Qu’est-ce que la Loi sur les espèces en péril (LEP)?

La LEP est la loi fédérale qui constitue l’une des pierres d’assise de l’effort national commun de protection et de conservation des espèces en péril au Canada. Elle est en vigueur depuis 2003 et vise, entre autres, à permettre le rétablissement des espèces qui, par suite de l'activité humaine, sont devenues des espèces disparues du pays, en voie de disparition ou menacées.

Qu’est-ce que le rétablissement?

Dans le contexte de la conservation des espèces en péril, le rétablissement est le processus par lequel le déclin d’une espèce en voie de disparition, menacée ou disparue du pays est arrêté ou inversé et par lequel les menaces à sa survie sont éliminées ou réduites de façon à augmenter la probabilité de survie de l’espèce à l’état sauvage. Une espèce sera considérée comme rétablie lorsque sa survie à long terme à l’état sauvage aura été assurée.

Qu’est-ce qu’un programme de rétablissement?

Un programme de rétablissement est un document de planification qui identifie ce qui doit être réalisé pour arrêter ou inverser le déclin d’une espèce. Il établit des buts et des objectifs et indique les principaux champs des activités à entreprendre. La planification plus élaborée se fait à l’étape du plan d’action.

L’élaboration de programmes de rétablissement représente un engagement de toutes les provinces et de tous les territoires ainsi que de trois organismes fédéraux -- Environnement Canada, l’Agence Parcs Canada et Pêches et Océans Canada -- dans le cadre de l’Accord pour la protection des espèces en péril. Les articles 37 à 46 de la LEP décrivent le contenu d’un programme de rétablissement publié dans la présente série ainsi que le processus requis pour l’élaborer

(http://www.registrelep-sararegistry.gc.ca/approach/act/default_f.cfm).

Selon le statut de l’espèce et le moment où elle a été évaluée, un programme de rétablissement doit être préparé dans un délai de un à deux ans après l’inscription de l’espèce à la Liste des espèces en péril de la LEP. Pour les espèces qui ont été inscrites à la LEP lorsque celle-ci a été adoptée, le délai est de trois à quatre ans.

Et ensuite?

Dans la plupart des cas, un ou plusieurs plans d’action seront élaborés pour définir et guider la mise en oeuvre du programme de rétablissement. Cependant, les recommandations contenues dans le programme de rétablissement suffisent pour permettre la participation des collectivités, des utilisateurs des terres et des conservationnistes à la mise en oeuvre du rétablissement. Le manque de certitude scientifique ne doit pas être prétexte à retarder la prise de mesures efficientes visant à prévenir la disparition ou le déclin d’une espèce.

La série de Programmes de rétablissement

Cette série présente les programmes de rétablissement élaborés ou adoptés par le gouvernement fédéral dans le cadre de la LEP. De nouveaux documents s’ajouteront régulièrement à mesure que de nouvelles espèces seront inscrites à la Liste des espèces en péril et que les programmes de rétablissement existants seront mis à jour.

Pour en savoir plus

Pour en savoir plus sur la Loi sur les espèces en péril et les initiatives de rétablissement, veuillez consulter le Registre public de la LEP (http://www.registrelep.gc.ca) et le site Web du Secrétariat du rétablissement (http://www.sararegistry.gc.ca/sar/recovery/default_f.cfm).

Programme de rétablissement de l’éléocharide fausse-prêle (Eleocharis equisetoides) au Canada [Proposition]

Juillet 2006

Référence recommandée :

Environnement Canada. 2006. Programme de rétablissement de l’éléocharide fausse-prêle (Eleocharis equisetoides) au Canada [Proposition], Série de Programmes de rétablissement de la Loi sur les espèces en péril, Environnement Canada, Ottawa, vi + 19 p.

Exemplaires supplémentaires :

Il est possible de télécharger des exemplaires de la présente publication à partir du Registre public de la Loi sur les espèces en péril (http://www.registrelep.gc.ca).

Illustration de la couverture : E.J. Judziewicz

Also available in English under the title:

“ Recovery Strategy for the Horsetail Spike-rush (Eleocharis equisetoides) in Canada [Proposed]”

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre de l’Environnement, 2006. Tous droits réservés.

ISBN à venir

No de cat. à venir

Le contenu (à l’exception des illustrations) peut être utilisé sans permission, mais en prenant soin d’indiquer la source.

Environnement Canada a élaboré son programme de rétablissement de l’éléocharide fausse-prêle tel que l’exige la Loi sur les espèces en péril. Le présent programme de rétablissement proposé a été préparé en collaboration avec les compétences responsables de l’espèce, tel qu’il est décrit dans la préface.

Réussir à rétablir l’espèce dépendra de l’engagement et de la collaboration d’un grand nombre de parties concernées qui participeront à la mise en œuvre des recommandations formulées dans le présent programme. Cette réussite ne pourra reposer sur Environnement Canada ou sur toute autre compétence seulement. Dans l’esprit de l’Accord pour la protection des espèces en péril, le ministre de l’Environnement invite toutes les Canadiennes et tous les Canadiens à se joindre à Environnement Canada pour appuyer le programme et le mettre en œuvre, pour le bien de l’éléocharide fausse-prêle et de l’ensemble de la société canadienne. Environnement Canada s’appliquera à appuyer la mise en œuvre du programme, compte tenu des ressources disponibles et des diverses priorités à l’égard de la conservation des espèces en péril. Le ministre rendra compte des progrès réalisés d’ici cinq ans.

Un ou plusieurs plans d’action détaillant les mesures de rétablissement particulières à prendre pour appuyer la conservation de l’espèce viendront s’ajouter au présent programme. Le ministre mettra en œuvre des moyens pour s’assurer, dans la mesure du possible, que les Canadiennes et les Canadiens directement touchés par ces mesures seront consultés.

Environnement Canada -- Région de l’Ontario

Le présent programme de rétablissement a été préparé par Holly Bickerton, consultante en biologie.

Nous tenons à remercier sincèrement les personnes suivantes qui ont fourni de l’information et formulé des commentaires sur les versions provisoires : Heather Arnold, Paul Ashley, Bill Crins, Mike Oldham, Jeff Robinson, Don Sutherland et Christine Vance. Nous aimerions également remercier la Section de la conservation des habitats du Service canadien de la faune pour les conseils formulés et la Section du rétablissement du Service canadien de la faune pour les conseils et les efforts entourant la préparation de l’affichage du présent document.

Une évaluation environnementale stratégique (EES) est effectuée dans le cadre de tous les documents de planification du rétablissement en vertu de la LEP conformément à laDirective du Cabinet de 1999 sur l'évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes. L’objet de l’EES est d’incorporer les considérations environnementales à l’élaboration des projets de politiques, de plans et de programmes publics pour appuyer une prise de décisions éclairées du point de vue de l’environnement.

La planification du rétablissement vise à favoriser les espèces en péril et la biodiversité en général. Il est cependant reconnu que des programmes peuvent, par inadvertance, produire des effets environnementaux qui dépassent les avantages prévus. Le processus de planification fondé sur des lignes directrices nationales tient directement compte de tous les effets environnementaux, notamment des incidences possibles sur les espèces ou les habitats non ciblés. Les résultats de l’EES sont directement inclus dans le programme lui-même, mais également résumés ci-dessous.

Le présent programme de rétablissement favorisera clairement l’environnement en encourageant le rétablissement de l’éléocharide fausse-prêle. La possibilité que le programme produise par inadvertance des effets négatifs sur d’autres espèces a été envisagée. L’EES a permis de conclure que le présent programme sera clairement favorable à l’environnement et n’entraînera pas d’effets négatifs significatifs. Consultez plus particulièrement les sections suivantes du document : 1.3 Besoins de l’espèce; 2.9 Effets sur les espèces non ciblées; 2.10 Approche recommandée pour la mise en œuvre du présent programme.

La LEP définit la résidence comme suit : Gîte -- terrier, nid ou autre aire ou lieu semblable -- occupé ou habituellement occupé par un ou plusieurs individus pendant tout ou partie de leur vie, notamment pendant la reproduction, l’élevage, les haltes migratoires, l’hivernage, l’alimentation ou l’hibernation [Paragraphe 2(1)].

Les descriptions de la résidence ou les raisons pour lesquelles le concept de résidence ne s’applique pas à une espèce donnée sont publiées dans le Registre public de la LEP : http://www.registrelep-sararegistry.gc.ca/sar/recovery/residence_f.cfm.

La gestion de l’éléocharide fausse-prêle (Eleocharis equisetoides) relève de la compétence d’Environnement Canada (Service canadien de la faune, Région de l’Ontario). En vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP, article 37), le ministre compétent est tenu d’élaborer un programme de rétablissement pour toute espèce inscrite comme disparue du pays, en voie de disparition ou menacée. L’éléocharide fausse-prêle a été évaluée en novembre 2000 par le COSEPAC comme étant en voie de disparition et a été inscrite à la liste des espèces en péril sous le régime de la LEP en 2003. Le Service canadien de la faune, Région de l’Ontario, Environnement Canada, a dirigé l’élaboration du présent programme de rétablissement. Le programme proposé satisfait à toutes les exigences de la LEP en termes de contenu et de processus (articles 39 à 41). Le ministère des Richesses naturelles de l’Ontario a examiné le présent document. Bien que l’espèce relève actuellement uniquement de la compétence d’Environnement Canada, le ministère des Richesses naturelles de l’Ontario sera appelé à participer au processus de rétablissement et à toutes les décisions entourant le rétablissement si cette espèce était découverte ailleurs qu’en territoire domanial.

L’éléocharide fausse-prêle (Eleocharis equisetoides) est une plante aquatique de la famille des Cypéracées qui se trouve principalement aux États-Unis, dans les plaines côtières de l’Atlantique et du golfe du Mexique. Il y a une seule occurrence connue de l’espèce au Canada. Les exigences biologiques de l’éléocharide fausse-prêle sont peu connues. La population canadienne pousse sur un substrat organique, dans un étang situé au creux de dunes boisées, dans la Réserve nationale de faune de Long Point dans le sud-ouest de l’Ontario.

Le site canadien de l’éléocharide fausse-prêle se trouve sur des terres fédérales protégées, et aucun facteur anthropique ne menace l’espèce ou son habitat. Les menaces possibles sont l’envahissement par le roseau commun (Phragmites australis), les phénomènes stochastiques, le broutage par le cerf de Virginie (Odocoileus virginianus), les fluctuations de niveau des eaux et l’appauvrissement génétique.

L’habitat essentiel de l’espèce est l’étendue que la colonie occupe actuellement ainsi que la communauté végétale à céphalanthe occidental (Cephalanthus occidentalis) et à cornouiller stolonifère (Cornus stolonifera) qui borde l’étang où elle se trouve. L’étendue de cette communauté doit être cartographiée.

Le rétablissement de l’éléocharide fausse-prêle est considéré réalisable sur le plan biologique et technique. Le but du rétablissement est de maintenir l’effectif de la seule colonie connue de l’espèce à une superficie égale ou presqu'égale à celle qu'elle occupe actuellement (5 à 10 m2). Les objectifs du rétablissement sont les suivants :

· effectuer le suivi de la population et des menaces potentielles afin d'évaluer les tendances et la gravité des menaces;

· enquêter sur les méthodes de gestion du roseau commun et, si nécessaire, appliquer une méthode appropriée;

· enquêter sur la viabilité des semences, sur les techniques de conservation et sur la multiplication à partir de rhizomes; si possible, recueillir et conserver des semences ou procéder à la multiplication par rhizomes;

· cartographier l’habitat essentiel et assurer sa protection;

· vérifier toute nouvelle mention de l’espèce;

· déterminer la tolérance de l’éléocharide fausse-prêle aux fluctuations de niveau des eaux, la taille minimale d’une population viable et la viabilité du site existant, ainsi que la mesure dans laquelle la perte de diversité génétique constitue une menace pour l’espèce.

Des mesures concrètes sont proposées pour l’atteinte de ces objectifs et l’évaluation des progrès accomplis.

Le présent programme de rétablissement de l’éléocharide fausse-prêle ne devrait avoir aucune répercussion négative pour des espèces en péril non visées. La gestion du roseau commun peut avoir une incidence sur d’autres espèces, mais cette incidence peut être atténuée par l’emploi de méthodes de lutte non chimiques.

Un plan d’action pour le rétablissement de l’éléocharide fausse-prêle sera élaboré d’ici 2008.

Date de l’évaluation : Novembre 2000

Nom commun : Éléocharide fausse-prêle

Nom scientifique : Eleocharis equisetoides

Statut selon le COSEPAC : En voie de disparition

Justification de la désignation : Une herbe vivace qui ne se trouve que dans un seul endroit où elle représente sans doute une seule plante clonale occupant moins de 10 mètres carrés sur le rivage d’un étang.

Présence au Canada :Ontario

Historique du statut selon le COSEPAC :Espèce désignée « en voie de disparition » en novembre 2000. Évaluation fondée sur un nouveau rapport de situation.

L’éléocharide fausse-prêle est une plante aquatique vivace de la famille des Cypéracées (famille du carex). Les tiges aériennes (chaumes) sont vertes, non ramifiées. Elles sont longues de 50 à 100 cm, ont un diamètre de 3 à 5 mm et sont rondes en coupe transversale. L’éléocharide fausse-prêle se distingue partiellement des autres éléocharides présentes dans son aire de répartition par ses tiges, qui sont relativement épaisses, au moins aussi larges que leurs épillets terminaux mûrs et pourvues de cloisons internes. La tige n’est pas feuillée mais comporte à la base des écailles papyracées étroites. L’espèce commence à fleurir à la fin du printemps et produit des fruits de juillet à octobre. Les fruits sont réunis dans un épillet terminal long de 15 à 40 mm et couvert d’écailles de couleur paille, à surface intérieure ponctuée de violet. Les fruits sont petits, ovés, aplatis à triangulaires et se terminent d'un côté par une longue saillie. L’éléocharide fausse-prêle se multiplie également par voie végétative, par des rhizomes souterrains. On trouvera des descriptions techniques et des illustrations dans Voss (1972), Gleason et Cronquist (1991) ainsi que Holmgren (1998).

L’éléocharide fausse-prêle est une espèce des plaines côtières de l’Atlantique et du golfe du Mexique mais pousse également par endroits dans le sud de la région des Grands Lacs, qui marque la limite nord de son aire de répartition. À l’échelle mondiale, l’espèce est cotée apparently secure (G4) (apparemment non en péril) (NatureServe, 2006). L’espèce est répertoriée dans 23 États des États-Unis mais est cotée rare (S1-S3) (rare) dans 13 États et historical (SH) (historique) ou extirpated (SX) (disparue) dans cinq autres (annexe 1).

Au Canada, l’éléocharide fausse-prêle est répertoriée pour une seule localité située dans la Réserve nationale de faune de Long Point, dans le sud-ouest de l’Ontario (Reznicek et Catling, 1989; Sutherland, 2000). L’espèce est considérée gravement en péril (S1) dans la province (Centre d’information sur le patrimoine naturel, 2005), et cette occurrence représente moins de 1 % de son effectif mondial (Sutherland, 2000). On ne connaît pas les tendances à long terme de cette population en raison de l’absence de données. Bien que le nombre de tiges et l’étendue de cette population aient fluctué entre les relevés de 1988 et de 2004 (tableau 1), ces changements ne sont peut-être que des variations annuelles en partie attribuables à la fluctuation du niveau des eaux. On ne croit pas que la chute récente (2004) du nombre de tiges indique un déclin important de la population, car la superficie du site n’a pas beaucoup changé, et le niveau des eaux en 2004 était exceptionnellement élevé (M. Oldham, comm. pers., 2005). Comme l’espèce peut se multiplier de façon végétative, il est possible que la population soit en fait formée par un seul individu.

Tableau 1. Données sur la population de l’éléocharide fausse-prêle de Long Point, en Ontario
Année Herborisateurs/ observateurs Effectif Superficie occupée (m2)
1953 Landon Aucune estimation Aucune estimation
1956 Soper et Dale Aucune estimation Aucune estimation
1960 Landon Aucune estimation Aucune estimation
1988 A.A. Reznicek et al. Environ 12 tiges 1
1993 D. Sutherland 151 tiges (91 fertiles) 6
1999 A.A. Reznicek et M. Oldham Environ 100 tiges (10 fertiles) 8-10
2004 M. Oldham, A.A. Reznicek et J. Robinson 19 tiges (9 fertiles) 5-10

Sources : Sutherland (2000); Oldham (2004).

En 1999, l’espèce a été signalée dans le parc provincial Turkey Point, mais il n’existe aucun spécimen ni aucune photographie pour documenter cette nouvelle occurrence, et celle-ci n’a pas été localisée de nouveau, malgré les recherches intensives de botanistes connaissant bien l’espèce (M. Oldham, comm. pers., 2005). Les populations connuesles plus proches se trouvent à au moins 200 km à l’est de Long Point, dans le comté de Monroe, dans l’État de New York, et à plus de 300 km à l’ouest, dans le comté de Washtenaw, au Michigan (Young et Weldy, 2005; Michigan Natural Features Inventory, 2006).

1.3.1 Besoins biologiques et en matière d'habitat

À Long Point, l’éléocharide fausse-prêle pousse dans un sol boueux, organique et sableux sur la rive exposée au sud d’un étang intérieur (Sutherland, 2000) situé entre deux cordons de dunes fixées, à l’extrémité de la pointe, et exposé à des processus naturels. L’éléocharide fausse-prêle est une espèce aquatique poussant dans des eaux de 4 à 35 cm de profondeur. Il est possible qu’elle tolère, comme de nombreuses autres espèces des plaines côtières de l’Atlantique, des fluctuations périodiques de niveau d’eau (Schneider, 1994), mais ses limites à cet égard n’ont pas été étudiées.

La végétation bordant l’étang où pousse l’éléocharide fausse-prêle est dominée par le céphalanthe occidental (Cephalanthus occidentalis) et le cornouiller stolonifère (Cornus stolonifera). Parmi les autres espèces associées à l’éléocharide fausse-prêle figurent le scirpe subterminal (Scirpus subterminalis), l’éléocharide de Small (Eleocharis smallii), le potamot à feuilles de graminé (Potamogeton gramineus), le potamot noueux (Potamogeton nodosus), la cornifle nageante (Ceratophyllum demersum), la naïade flexible (Najas flexilis), le grand nénuphar jaune (Nuphar variegatum), la zizanie des marais (Zizania palustris) et le carex à fruits tomenteux (Carex lasiocarpa). Sutherland (2000) dresse une liste complète des plantes vasculaires recensées dans cette localité.

On connaît très peu les exigences biologiques de l’éléocharide fausse-prêle, en dehors des caractères généraux de son habitat. L’espèce est rare dans tout le nord-est de l’Amérique du Nord, et sa répartition au Canada est vraisemblablement limitée par le climat. Si la population canadienne se compose de quelques individus seulement, voire d’un seul, sa diversité génétique est très faible, ce qui pourrait limiter sa viabilité à long terme.

L’éléocharide fausse-prêle est probablement anémophile, comme les autres Eleocharis. Des études européennes ont montré que les graines des Eleocharis pouvent être dispersées avec les fèces des oiseaux aquatiques migrateurs (Charalambidou et Santamaria, 2005). Les propagules de plusieurs plantes aquatiques communes (notamment Scirpus spp., Eleocharis spp. et Chenopodium spp.) peuvent également demeurer viables après être passées dans l’intestin d’oiseaux aquatiques (De Vlaming et Proctor, 1968; Holt-Mueller et van der Valk, 2002). Les oiseaux aquatiques agiraient ainsi comme agents de dispersion de l’espèce.

1.3.2 Rôle écologique

On ne connaît pas le rôle écologique de l’éléocharide fausse-prêle (par ex. servir de nourriture ou de refuge à d’autres organismes).

1.3.3 Facteurs limitatifs

On ne sait pas si la reproduction ou le cycle vital sont limitatifs au plan biologique.

À l’heure actuelle, peu de facteurs menacent l’éléocharide fausse-prêle et son habitat puisque la seule colonie canadienne de l’espèce se trouve dans un secteur peu fréquenté d’une réserve nationale de faune. L’habitat de l’espèce est jugé non menacé, et le milieu environnant est surtout exposé à des processus naturels. Des terrains adjacents à la Réserve nationale de faune et proches du site de l’espèce ont récemment été achetés par Conservation de la nature Canada (H. Arnold, comm. pers., 2005), mais ils sont encore utilisés par les propriétaires à des fins récréatives. Ces activités pourraient perturber l’habitat potentiel de l’espèce qui pourrait exister sur ces terres, mais n’ont aucun impact direct sur la population connue ou son habitat.

Cinq facteurs pouvant constituer une menace pour l’espèce et son habitat ont été identifiés. Cependant, les répercussions négatives que pourraient avoir ces facteurs sur l’espèce au Canada n’ont pas été démontrées. Les menaces sont énumérées ci-dessous par ordre décroissant de probabilité et de gravité.

1.4.1 Envahissement par le roseau commun (Phragmites australis)

Le roseau commun (Phragmites australis), espèce envahissante, se répand dans la Réserve nationale de faune de Long Point comme dans toute la région des Grands Lacs. Il a été observé récemment dans l’étang où pousse l’éléocharide fausse-prêle (M. Oldham, comm. pers.,2005). Il n’y avait jamais été signalé auparavant, malgré son apparence distinctive (voir par ex. Sutherland, 2000). Le roseau commun forme une colonie dense à quelques centaines de mètres de la population d’éléocharides fausse-prêle (M. Oldham, comm. pers., 2005). Le roseau commun a tendance à former des colonies denses excluant les autres espèces et peut ainsi réduire la diversité de la végétation et la complexité de sa structure, importante pour les oiseaux aquatiques (Mal et Narine, 2004). La prolifération du roseau commun est le facteur qui menace le plus sérieusement l’habitat de l’éléocharide fausse-prêle.

1.4.2 Vulnérabilité aux phénomènes stochastiques

Les menaces attribuables aux phénomènes stochastiques n’ont pas été étudiées et sont à peu près impossibles à quantifier. De manière générale, les preuves indiquent que l’impact des événements stochastiques peut augmenter lorsque la taille de la population diminue (Lande, 1993). Le seul site canadien de l’éléocharide fausse-prêle, avec son très faible effectif et sa très faible étendue (de 5 à 10 m2), est extrêmement vulnérable à cet égard et pourrait disparaître par suite d’un seul événement de cette nature (ex. : maladie, tempête, inondation). Comme l’espèce est rare dans tout le nord-est de l’Amérique du Nord, la recolonisation serait peu probable. Les processus stochastiques qui peuvent avoir un impact sur la population canadienne de l’éléocharide fausse-prêle sont les processus naturels. Des analyses polliniques ont montré que des populations localisées de l’espèce sont disparues d’Indiana pendant la période holocène (5 700 à 2 800 ans avant le présent),probablement en raison de l’assèchement rapide du climat(Jackson et Singer, 1997).

1.4.3 Herbivorie

Dans le passé, la population de cerfs de Virginie (Odocoileus virginianus) a atteint un niveau nuisible à Long Point en l’absence de populations suffisantes de prédateurs, mais des mesures ont été prises pour ramener la population de cerfs à un niveau acceptable (J. Robinson, comm. pers., 2005). À ce jour, on n’a relevé aucun indice de broutage de l’éléocharide fausse-prêle par le cerf de Virginie (J. Robinson, D. Sutherland, et M. Oldham,comm. pers., 2005), et la population d’éléocharides fausse-prêle s’est maintenue même lorsque la population de cerfs de Virginie était élevée. La population d’éléocharides fausse-prêle est isolée du rivage par une arbustaie dense et est peut-être inaccessible aux cerfs. Toutefois, le cerf de Virginie broute d’autres espèces d’Eleocharis (D. Sutherland, comm. pers., 2005) et peut être considéré comme une menace potentielle pour l’éléocharide fausse-prêle. Les castors (Castor canadensis) et les rats musqués (Ondatra zibethicus) sont également des menaces possibles, mais aucun indice de broutage par ces espèces n’a été observé.

1.4.4 Élévation ou stabilisation du niveau d’eau

La présence de castors a déjà été signalée dans le passé dans l’étang et pourrait modifier à court ou à moyen terme le niveau des eaux. Comme d’autres espèces émergentes de rivage qui représentent des reliques des plaines côtières de l’Atlantique (voir Reznicek, 1994), l’éléocharide fausse-prêle est probablement adaptée aux fluctuations de niveau d’eau. Il est possible que la stabilisation prolongée du niveau d’eau constitue une menace pour l’espèce. Cependant, alors que de nombreuses espèces annuelles des plaines côtières de l’Atlantique ont besoin des fluctuations du niveau d’eau pour germer (Keddy et Reznicek, 1982), il est aussi possible que les racines vivaces de l’éléocharide fausse-prêle permettent à l’espèce de mieux résister à ces changements de l'hydropériode.

1.4.5 Perte de diversité génétique

La diminution de la taille d’une population peut s’accompagner d’une réduction du nombre d’allèles qu’elle compte et, à long terme, de sa variabilité génétique globale. Les conséquences à long terme peuvent être une réduction de la capacité d’adaptation des individus et de la viabilité de la population. L’apport dans une petite population de pollen ou de semences provenant de populations voisines peut réduire le risque d’appauvrissement génétique (Young et al., 1996). La colonie canadienne d’éléocharides fausse-prêle est exposée à l’appauvrissement génétique en raison de sa petite taille et du fait qu’elle ne peut bénéficier d’un apport important de pollen et de semences des populations voisines, trop éloignées. On ne sait pas si une seule petite colonie est suffisante pour maintenir la capacité d’adaptation des individus et la viabilité de la population à long terme. Il n’y a aucune information sur cette menace, qui demeure donc hypothétique.

1.4.6 Changements climatiques

Les changements climatiques pourraient menacer la population canadienne d’éléocharides fausse-prêle en altérant son habitat actuel, très restreint. Les changements climatiques pourraient également entraîner des modifications dans le régime hydrique de la région ou dans les températures hivernales, lesquelles pourraient avoir un impact sur la survie de la population.

L’extrémité de la péninsule Long Point est exposée à des processus naturels, et aucune mesure de gestion particulière n’a encore été prise à l’égard de l’éléocharide fausse-prêle. La gestion des populations de cerfs devrait continuer de maintenir un effectif stable tout en protégeant la biodiversité.

Les recherches requises pour la gestion de la population canadienne de l’éléocharide fausse-prêle sont indiquées dans le tableau 2 (voir section 2.5). Toutefois, vu l’absence presque complète de données sur l’écologie de l’espèce en Amérique du Nord, toute recherche écologique de base (reproduction, viabilité des semences, etc.) serait utile. Les principaux domaines où il y a des lacunes à combler sont indiqués ci-dessous, de même que les questions auxquelles il faut répondre pour pouvoir préciser les objectifs de rétablissement :

· Identification des menaces : Quelles sont les menaces réelles et les menaces potentielles qui pèsent sur l’espèce, à Long Point et ailleurs dans son aire de répartition? De quelle manière le niveau d’eau influence-t-il la population? L’éléocharide fausse-prêle risque-t-elle d’être broutée? Les rats musqués menacent-ils l’espèce?

· Écologie : Quel est la tolérance de l’éléocharide fausse-prêle aux fluctuations du niveau d’eau? Quels sont les facteurs biotiques et abiotiques qui expliquent les préférences de l’espèce en matière d’habitat? Quelle est la longévité des graines en dormance, et quelles sont les conditions nécessaires à leur germination? À quelle distance le pollen de l’espèce peut-il être transporté? Cette espèce est-elle capable d’autofécondation? Quel est le rôle de l’espèce dans l’écosystème (p. ex. : source de nourriture ou hôte)?

· Génétique : Quelle est la variabilité génétique de la population canadienne? Y a-t-il des indices de flux génique entre cette population et d’autres populations du nord-est des États-Unis?

· Recrutement et démographie : Quel est le taux de recrutement et quelle est la structure de la population de l’Ontario? Quelle est la viabilité probable de cette population? Combien faut-il d’individus pour assurer la viabilité à long terme de la population, et combien d’habitat leur faudrait-il?

Le rétablissement de l’éléocharide fausse-prêle est jugé réalisable sur le plan technique et biologique. La seule population répertoriée au Canada existe toujours. Bien que les données soient insuffisantes pour dégager une tendance démographique ou déterminer le taux de recrutement, les multiples visites récentes donnent à croire que le nombre de tiges et la superficie occupée sont stables. Il existe des individus capables de se reproduire à l’échelle de l’aire de répartition nord-américaine de l’espèce, mais on ne sait pas si la réintroduction est possible. On peut présumer que l’habitat actuel est suffisant pour répondre aux exigences de l’espèce, puisque celle-ci est répertoriée depuis 1953 et qu’aucune autre population n’a été observée dans le sud-ouest de l’Ontario, malgré les relevés floristiques intensifs. Il n’y a que quelques menaces reconnues pour l’espèce, et un suivi peut être effectué pour la majorité d’entre elles afin que des mesures proactives soient prises si elles devaient menacer de manière imminente la population existante. Pour l’heure, il n’est pas nécessaire de prendre des mesures actives de rétablissement puisque ni l’habitat connu ni la population ne semblent en déclin.

Il faut souligner que l’éléocharide fausse-prêle est très rare à l’état sauvage au Canada et qu'on ne sait pas si son effectif actuel et les processus naturels dont elle dépend peuvent assurer sa survie à long terme. Toutefois, les données actuellement disponibles indiquent qu’il est possible de conserver l'unique colonie actuelle de l’espèce.

Le but à long terme du présent programme de rétablissement est de maintenir la seule colonie connue de l’éléocharide fausse-prêle à une superficie égale ou presque égale à celle qu'elle occupe actuellement (de 5 à 10 m2).

1. Effectuer un suivi annuel de la population (nombre de tiges) et des menaces potentielles (envahissement par le roseau commun, niveau d’eau, broutage) afin de d'évaluer les tendances et la gravité des menaces sur une période de cinq ans.

2. Enquêter sur les méthodes d’élimination du roseau commun et, au besoin, procéder à la limitation ou à l’élimination du roseau commun dans un cadre de gestion adaptative.

3. Enquêter sur la viabilité des semences et sur les techniques de conservation. Si possible, récolter et conserver des semences de l’espèce. Évaluer la possibilité de prélever des rhizomes pour la réintroduction et mettre cette mesure en œuvre s’il y a lieu.

4. Cartographier l’habitat essentiel et assurer sa protection.

5. Vérifier toute nouvelle mention de l’éléocharide fausse-prêle auCanada.

6. Déterminer la tolérance de l’éléocharide fausse-prêle aux fluctuations de niveau des eaux, la taille minimale d’une population viable et la viabilité du site existant, ainsi que la mesure dans laquelle la perte de diversité génétique constitue une menace pour l’espèce.

Le but et les objectifs du présent programme de rétablissement ont été définis à la lumière du fait que la seule occurrence canadienne de l’éléocharide fausse-prêle est protégée par les mesures législatives fédérales et que les processus naturels dans la Réserve nationale de faune de Long Point ne sont pratiquement pas perturbés.

L’éléocharide fausse-prêle est rare à l’état sauvage au Canada et s’y trouve probablement comme relique de la flore des plaines côtières de l’Atlantique, qui s’est retrouvée isolée à la fin de la dernière glaciation(Reznicek, 1994; Jackson et Singer, 1997). Rien n’indique que d’autres populations de l’espèce auraient disparu du Canada depuis l’arrivée des colons européens. Le site de Long Point est connu depuis plusieurs décennies. Si les conditions demeurent inchangées, il est raisonnable de croire que cette population survivra. Il n’est donc pas recommandé d’accroître la zone d’occupation, le nombre de sites ou l’effectif de l’espèce. De même, il n’est pas réaliste de penser qu’on pourra un jour retirer l’éléocharide fausse-prêle de la liste des espèces en péril au Canada puisqu’elle était probablement déjà extrêmement rare avant la colonisation. Compte tenu de l’occurrence très restreinte de l’espèce, la conservation de semences ou de propagules offrirait une garantie contre sa disparition en cas d’événements stochastiques graves.

Même s’il n’a pas été établi que le roseau commun présente une menace réelle, il est recommandé de gérer sa propagation autour du site de l’éléocharide fausse-prêle tandis qu’il est encore peu abondant.

Les stratégies envisagées pour réduire ou éliminer les menaces sont énumérées au tableau 2. Elles comprennent notamment des suivis, des inventaires, la gestion et la cartographie de l’habitat et la recherche. Elles visent à repérer, à préciser et à gérer les menaces.

Tableau 2. Planification du rétablissement
Niveau de priorité Objectif Approche ou stratégie générale Menaces ciblées Mesures proposées

Résultats attendus

(cibles mesurables)

Élevé 1 Suivi

Envahissement par le roseau commun.

Niveau d’eau.

Broutage par des cerfs.

Événements stochastiques.

· Établir un protocole de suivi annuel des paramètres suivants :

o tendance dans le nombre de tiges et le nombre de tiges fertiles;

o prolifération du roseau commun;

o effet de la fluctuation du niveau des eaux sur la population;

o indices de broutage par les cerfs.

· Analyser les résultats et prendre les mesures qui s’imposent.

· Élaboration et application d’un protocole de suivi annuel.
Moyen 2 Gestion de l’habitat Envahissement par le roseau commun

· Enquêter sur les méthodes possibles de contrôle du roseau commun à Long Point.

· Si nécessaire, appliquer une méthode appropriée (assurer un suivi annuel).

· Élimination du roseau commun ou maintien de la population au niveau non menaçant de 2005.
Moyen 4 Cartographie de l’habitat Toutes les menaces · Cartographier l’habitat essentiel de l’éléocharide fausse-prêle. · Cartographie réalisée.
Moyen 3 Recherche Événements stochastiques

· Examiner la possibilité de conserver des semences de l’éléocharide fausse-prêle.

· Si possible, recueillir des semences et les conserver de manière appropriée.

· Évaluer les possibilités de succès de l'utilisation des rhizomes pour multiplier l'espèce en cas de nécessité.

· Si possible et approprié, semences recueillies et conservées.

· Si nécessaire, multiplication par rhizomes.

Faible 6

Recherche

Gestion de l’habitat

Niveau d’eau

· Déterminer la tolérance de l’éléocharide fausse-prêle aux fluctuations du niveau des eaux.

· Si nécessaire, recommander la régulation du niveau des eaux.

· Tolérance de l’espèce connue.
Faible 6 Recherche Événements stochastiques · Réaliser des études démographiques afin de déterminer la taille minimale d’une population viable et la viabilité de la population existante.

· Taille minimale d’une population viable connue.

· Viabilité de la population existante connue.

Faible 6 Recherche Événements stochastiques · Réaliser des études afin de déterminer la dispersion des graines produites, la viabilité des graines et la stratégie de reproduction actuelle de la population. · Estimation de la capacité du site à assurer la reproduction.
Faible 6 Recherche Appauvrissement génétique

Répondre à des questions non résolues en matière de génétique :

· déterminer la variabilité génétique de la population existante;

· déterminer si l’érosion génétique, la dérive génétique ou la dépression de consanguinité sont des facteurs qui touchent l’éléocharide fausse-prêle;

· évaluer dans quelle mesure ces facteurs peuvent compromettre la viabilité à long terme de la population.

· Connaissance de la variabilité génétique de la population et évaluation de la menace liée à l’appauvrissement génétique.
Au besoin 5 Inventaire Événements stochastiques

· Vérifier toute nouvelle mention de l’espèce.

· Effectuer des relevés à Turkey Point afin de confirmer ou d’infirmer la mention de 1999.

· Nouvelles mentions vérifiées.
2.6.1 Désignation de l’habitat essentiel de l'espèce (proposition)

L’habitat essentiel de l’éléocharide fausse-prêle est désigné, dans la mesure du possible, dans le présent programme de rétablissement. Un examen de la désignation et une description plus raffinée de l'habitat essentiel proposé seront réalisés une fois complétés les travaux prévus au calendrier des études et seront inclus dans le plan d'action. L’habitat essentiel comprend la zone d’occupation actuelle ainsi que la communauté végétale dont l’espèce fait partie à Long Point. Cette communauté à céphalante occidental et à cornouiller stolonifère doit être décrite et cartographiée conformément aux exigences définies pour les écosites dans le système de classification écologique des terres pour le sud de l’Ontario (Lee et al., 1998), la norme ontarienne pour la cartographie des communautés végétales. Toutefois, l’habitat essentiel se limitera au complexe englobant l’étang où pousse l’espèce et ne s’étendra pas aux milieux humides voisins, sauf si de nouvelles colonies d’éléocharides fausse-prêle y sont découvertes.

On ne peut pas savoir quelle est la superficie minimale d’habitat nécessaire pour maintenir une population viable d’éléocharides fausse-prêle puisqu’on ne sait pas combien il faut d’individus pour former une population viable ni quelles seraient les exigences d’une telle population. Comme l’effectif de l’espèce a toujours été faible au Canada malgré la présence d’habitats semblables à celui qu’elle occupe, il est peu probable que la quantité disponible de ce type de milieu limite la viabilité à long terme de la population. Le but du présent programme de rétablissement étant de maintenir l’effectif actuel (voir plus haut), on peut supposer, en l’absence de données contraires, que l’habitat actuel est suffisant.

L’habitat essentiel de l’éléocharide fausse-prêle est l’étang qui l’abrite à l’heure actuelle et où elle pousse dans un sol organique sableux, sur le rivage exposé au sud. Cet étang se trouve entre deux cordons de dunes fixées, près de la pointe de la Réserve nationale de faune de Long Point. L’éléocharide fausse-prêle est une espèce aquatique poussant dans des eaux de 4 à 35 cm de profondeur. La végétation bordant l’étang est dominée par le céphalanthe occidental et le cornouiller stolonifère. Parmi les autres espèces associées à l’éléocharide fausse-prêle figurent le scirpe subterminal, l’éléocharide de Small, le potamot à feuilles de graminée, le potamot noueux, la cornifle nageante, la naïade flexible, le grand nénuphar jaune, la zizanie des maraiset le carex à fruits tomenteux.

2.6.2 Exemples d’activités susceptibles de détruire l’habitat essentiel

Actuellement, aucune activité humaine ne risque de détruire l’habitat essentiel de la colonie de Long Point. Toutes les menaces à la survie de ce site sont liées à des processus naturels.

2.6.3 Calendrier des études nécessaires pour la désignation de l’habitat essentiel

Les activités décrites dans le tableau 3 sont nécessaires pour désigner plus précisément l’habitat essentiel de l’espèce.

Tableau 3. Calendrier des études
Description de l’activité Résultats attendus Échéance
Relevés annuels du nombre de tiges et de l’étendue du site. Compréhension des paramètres démographiques de la population Continu
Cartographie de l’habitat essentiel de la population connue et de la communauté végétale dont elle fait partie. Désignation et cartographie de tout l’habitat essentiel connu 2007
Cartographie de l’habitat essentiel de toute nouvelle population confirmée dans l’année suivant la confirmation. Désignation et cartographie de tout l’habitat essentiel connu Continu

Toutefois, comme l’habitat essentiel est protégé parce que la population se trouve dans une réserve nationale de faune les études démographiques ne sont pas urgentes, et aucune échéance n’est fixée.

Tout l’habitat essentiel connu del’éléocharide fausse-prêle au Canada se trouve dans une réserve nationale de faune. Quatre-vingt dix jours après que ce programme de rétablissement ait été mis dans le Registre public, une description de l’habitat essential sera publiée dans la Gazette du Canada. Les interdictions découlant de l’article 58 de la LEP, s’appliqueront 90 jours suivant la publication de cette description dans la Gazette du Canada. Cette protection s’ajoutera à celle actuellement en vigueur pour la réserve nationale de faune de Long Point(McKeating, 1983) en vertu de la Loi sur les espèces sauvages du Canada. Par conséquent, il ne sera pas nécessaire d’acquérir des terres ou d’adopter des politiques particulières, sauf si de nouveaux sites de l’espèce sont découverts. La protection de l’habitat se limitera à l’élimination des menaces.

Si l’éléocharide fausse-prêle est découverte sur des terrains privés ou sur des terrains provinciaux, le ministère des Richesses naturelles de l’Ontario sera appelé à participer à la mise à jour du programme de rétablissement.

Le rétablissement sera jugé réussi en 2011 si les critères suivants ont été rencontrés :

· Objectif 1 – Les données des suivis annuels montrent que l’étendue du site ainsi que le nombre total de tiges et le nombre de tiges fertiles (ou d’autres indicateurs définis dans le protocole de suivi) sont demeurés stables ou ont augmenté.

· Objectif 1 – Les suivis ont permis de déterminer si le broutage ou les fluctuations de niveau des eaux semblent avoir un impact sur le nombre de tiges (c.-à-d. les menaces ont été confirmées) et, si tel est le cas, les mesures possibles ont été évaluées et mises en œuvre de façon appropriée.

· Objectif 2 – Les populations de roseaux communs et d’autres espèces aquatiques envahissantes sont absentes de l'étang ou ont été maintenues à leur niveau de 2005 et ne présentent aucune menace immédiate à l’habitat del’éléocharide fausse-prêle.

· Objectif 3 – Des études ont été menées sur la conservation à long terme de semences et la multiplication à partir de rhizomes. Ces activités ont été mises de l’avant si, à l’issue des études, elles ont été jugées réalisables.

· Objectif 4 – L’habitat essentiel de toutes les populations répertoriées a été cartographié : dans l’année suivant leur découverte pour les nouvelles populations, et d’ici 2007 pour le site de la Réserve nationale de faune de Long Point.

· Objectif 4 – Des dispositions visant la protection de l’éléocharide fausse-prêle ont été intégrées aux nouveaux plan de gestion de la Réserve nationale de faune de Long Point ou autres documents pertinents, et les gestionnaires continuent de participer aux décisions et aux mesures prises en vue du rétablissement de l’espèce.

· Objectif 5 – Toutes les nouvelles mentions de l’éléocharide fausse-prêle ont été vérifiées, et les mentions avérées ont été prises en compte dans les mesures de rétablissement.

· Objectif 6 – Des travaux de recherche ont été effectués, et les résultats de ces recherches ont été examinés pour améliorer les activités de gestion.

Les mesures de rétablissement proposées ne devraient avoir aucune répercussion négative pour les autres espèces indigènes non visées, puisqu’elles portent principalement sur le maintien des fonctions écologiques naturelles du milieu de même que sur le suivi de la population d’éléocharides fausse-prêle.

Le présent programme recommande toutefois des mesures de contrôle du roseau commun. Selon les méthodes qui seront employées, ces mesures pourraient avoir des répercussions sur d’autres espèces indigènes de plantes ou d’animaux vivant dans les roseaux ou à proximité. L’emploi de méthodes biologiques ou non chimiques pourrait atténuer les répercussions potentielles. Bien qu’aux États-Unis, l’herbicide Rodeo® soit largement utilisé dans les marais des plaines côtières de l’Atlantique pour lutter contre le roseau commun (Marks et al., 1993; Mal et Narine, 2004), ce produit n’est pas actuellement autorisé au Canada.

Aucune autre espèce en péril connue ne cohabite avec l’éléocharide fausse-prêle. Par conséquent, aucune espèce en péril ne sera touchée par les activités recommandées dans le présent programme.

Compte tenu de la répartition limitée del’éléocharide fausse-prêle et de l’absence d’espèces en péril dans cette aire, nous recommandons une approche monospécifique. Nous recommandons que le but et les objectifs visés par le présent programme ainsi que les mesures proposées pour les atteindre soient intégrés aux plans de gestion des communautés végétales ou des écosystèmes de la Réserve nationale de faune de Long Point.

Un plan d’action pour le rétablissement de l’éléocharide fausse-prêle sera préparé d’ici 2008.

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Oldham, M. 2005. Botaniste/Herpétologiste, Ministère des Richesses naturelles de l’Ontario.

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Sutherland, D. 2005. Zoologiste, Ministère des Richesses naturelles de l’Ontario.

Environnement Canada – Service canadien de la faune, Région de l’Ontario.

Paul Ashley, Environnement Canada – Service canadien de la faune, Région de l’Ontario, Réserve nationale de faune de Big Creek

Madeline Austen, Environnement Canada – Service canadien de la faune, Région de l’Ontario, Downsview

Kate Hayes, Environnement Canada – Service canadien de la faune, Région de l’Ontario, Downsview

Angela McConnell, Environnement Canada – Service canadien de la faune, Région de l’Ontario, Downsview

Jeff Robinson, Environnement Canada – Service canadien de la faune, Région de l’Ontario, London

Conseillers :

Bill Crins, Parcs Ontario, Ministère des richesses naturelles de l’Ontario, Peterborough

Mike Oldham, Centre d’information sur le patrimoine naturel, Ministère des richesses naturelles de l’Ontario, Peterborough

Don Sutherland, Centre d’information sur le patrimoine naturel, Ministère des richesses naturelles de l’Ontario, Peterborough

Cotes infranationales attribuées à l’éléocharide fausse-prêle aux états-unis
État Rang Sa
Alabama SNR
Arkansas SH
Connecticut S1
Delaware S2
Floride SNR
Géorgie S3
Illinois SX
Indiana S1
Louisiane SNR
Maryland S1
Massachusetts SX
Michigan S3
Mississippi S3S4
Missouri SH
New Jersey S1
New York S2
Caroline du Nord S3
Rhode Island S2
Caroline du Sud SNR
Tennessee S1
Texas SNR
Virginie S1
Wisconsin SX

a Les rangs infranationaux sont attribués par le centre de données sur la conservation de chaque État (ou chaque province). Ce ne sont pas des désignations légales, mais des indicateurs de la rareté relative de l’espèce dans l’État ou la province.

S1 Extrêmement rare; généralement cinq occurrences ou moins dans l’État ou la province ou très peu d’individus; espèce souvent menacée de disparition.

S2 Très rare; généralement entre cinq et vingt occurrences dans l’État ou la province ou de nombreux individus mais un moins grand nombre d’occurrences; espèce souvent susceptible de disparaître.

S3 Rare; généralement entre vingt et cent occurrences dans l’État ou la province ou un moins grand nombre d’occurrences mais de nombreux individus dans certaines populations; espèce pouvant être vulnérable aux grandes perturbations.

S4 Apparemment non en péril; peu commune, mais pas rare; source de préoccupation à long terme en raison de déclins ou d’autres facteurs.

SH Présence historique dans l’État ou la province mais non vérifiée récemment (espèce n’ayant généralement pas été répertoriée dans l’État ou la province au cours des vingt dernières années).

SX Apparemment disparue, faible probabilité de la redécouvrir; espèce n’ayant généralement pas été vue dans l’État ou la province depuis des dizaines d’années, malgré des recherches dans les sites historiques connus.

SNR Non classée.

Source: NatureServe (2006).

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