Lampsile jaunel (Lampsilis cariosa) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 4

Répartition

Aire de répartition mondiale

La lampsile jaune est une espèce des bassins de la pente atlantique; on la trouve à l’est des Appalaches depuis la rivière Sydney, en Nouvelle-Écosse, jusque dans la rivière Ogeechee, en Géorgie. La figure 2 en donne la répartition mondiale. L’espèce est mentionnée en Géorgie, en Caroline du Sud, en Caroline du Nord, en Virginie, au Maryland, au Delaware, en Pennsylvanie, au New Jersey, au New York, au Connecticut, au Massachusetts, au Maine, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse et au Québec (Clarke, 1981; Williams et al., 1993).

Figure 2. Répartition générale de la lampsile jaune, Lampsilis cariosa, sur la pente atlantique de l’est de l’Amérique du Nord. On remarquera, à l’extrémité septentrionale de l’aire de répartition :

  1. la rivière Madawaska, Ontario (Lampsilis« cariosa » = L. cardium), qui n’a pas été incluse dans l’aire de répartition du L. cariosa;
  2. le bassin du Saint-Laurent, État de New York, populations de L. cariosa;
  3. le site de McKinley Ferry, rivière Saint-Jean, Nouveau-Brunswick;
  4. la rivière Sydney, Nouvelle-Écosse;
  5. une connexion hypothétique par une plaine côtière, 7000 ans avant le présent.
Figure 2. Répartition générale de la lampsile jaune, Lampsilis cariosa, sur la pente atlantique de l’est de l’Amérique du Nord.

Aire de répartition canadienne

Au Canada, on ne connaît que deux localités pour le L. cariosa, soit la rivière Sydney, sur l’île du Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, et le Saint-Jean et ses affluents, non loin de Fredericton, au Nouveau-Brunswick (Clarke, 1981; Sabine et al., sous presse) (figures 3 et figure4). Des mentions de l’espèce pour la rivière Madawaska, en Ontario, et le bas Saint-Laurent (Burch, 1975; La Rocque, 1953) se sont révélées n’être que de mauvaises identifications du Lampsilis ovata (Say, 1817) = Lampsilis ventricosa (Barnes, 1823) (Clarke, 1981). Toutefois, Strayer et Jirka (1997) rapportent que le L. cariosa est très répandu dans le bassin du Saint-Laurent dans le nord de l’État de New York. Cela pourrait indiquer la possibilité qu’il soit présent dans les affluents du Saint-Laurent au Canada. Une mention historique d’un spécimen récolté le 31 août 1952 par H.D. Athearn dans la rivière Saint-François, à 5,5 milles au nord-ouest de Drummondville, au Québec, semble étayer cette hypothèse. Ce spécimen est maintenant conservé à l’Ohio State Museum of Biological Diversity de l’Ohio State University (OSM 24450). G.T. Watters et D.H. Stansberry ont confirmé qu’il s’agit bien d’un spécimen de L. cariosa (Myers, comm. pers., 2003). Malheureusement, tout récemment, le spécimen s’est avéré introuvable et n’a donc pas pu être examiné. La situation actuelle du L. cariosa au Québec demeure donc incertaine et devra faire l’objet de recherches supplémentaires.

Figure 3. Répartition du Lampsilis cariosa dans le bassin du bas Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, avec tous les sites fouillés en 2001-2002.Les points noirs indiquent la présence de L. cariosa, les cercles vides l’absence de L. cariosa et les étoiles une présence passée (carte fondée sur Sabine et al., sous presse).

Figure 3. Répartition du Lampsilis cariosa dans le bassin du bas Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, avec tous les sites fouillés en 2001-2002. Les points noirs indiquent la présence de L. cariosa, les cercles vides l’absence de L. cariosa et les étoiles une présence passée (carte fondée sur Sabine et al., sous presse).

Le bassin hydrologique de la rivière Sydney est un petit bassin d’environ 14 000 hectares (140 km²) qui se déverse vers le nord dans l’Atlantique, dans le havre de Sydney (figure 4). Le cours d’eau principal a une longueur d’environ 15 km. On trouve deux lacs à la tête de la rivière. Le plus important est le lac Blacketts (187 ha), qui est le centre principal de la population de L. cariosa. Le lac Gillis (11,6 ha) est relié au lac Blacketts par un petit cours d’eau. On retrouve en Nouvelle-Écosse un ensemble d’espèces animales et végétales indigènes à affinité méridionale venues de Nouvelle-Angleterre environ 7000 ans avant le présent durant la période post-glaciaire chaude désignée sous le nom de période hypsithermale (Davis et Browne, 1996). L’abaissement du niveau de la mer a alors permis la formation d’une vaste plaine côtière parcourue de rivières parvenues à maturité, propices au L. cariosa. Deux autres populations disjointes de mulettes, l’une de Leptodea ochracea (Say, 1818) et l’autre d’une forme à rayons d’Elliptio complanata,habitent la rivière Sydney, de même qu’une population également disjointe d’un isopode aquatique, le Caecidotea communis. L’élévation du niveau de la mer, les refroidissements passés et des facteurs géologiques affectant la qualité de l’eau souterraine et la forme du paysage, comme le type de substrat rocheux, ont contribué à l’isolement de la population de la rivière Sydney. Counts et al. (1991) expliquent de façon similaire l’isolement des populations de moules de la péninsule Delmarva, aux États-Unis. 

Le bassin du Saint-Jean est beaucoup plus vaste : il a une superficie de 55 000 km², avec un cours d’eau principal d’une longueur de 700 km. Le L. cariosa ne se retrouve aujourd’hui que dans le bas Saint-Jean (en aval de la limite de la marée) et dans ses affluents. Cette portion du bassin comprend les 140 derniers kilomètres de la rivière principale et cinq affluents importants, couvrant une superficie de 15 000 km², soit 27 p. 100 du bassin complet. Le bassin du bas Saint-Jean comprend plusieurs lacs importants, dont le Grand Lac (17 100 ha), habité par le L. cariosa.

Figure 4. Sites des recensements de mulettes effectués dans la rivière Sydney, dans le comté du Cap-Breton (Nouvelle-Écosse), par Clarke et Meachem Rick (1963), par le personnel du Musée d’histoire naturelle de la Nouvelle-Écosse jusqu’en 1999 (1-8), et par K. White (deux bancs de moules denses recensés en 2002, 9 et 10). Voir le texte pour plus de détails.

Figure 4. Sites des recensements de mulettes effectués dans la rivière Sydney, dans le comté du Cap-Breton (Nouvelle-Écosse), par Clarke et Meachem Rick (1963), par le personnel du Musée d’histoire naturelle de la Nouvelle-Écosse jusqu’en 1999 (1-8), et par K. White (deux bancs de moules denses recensés en 2002, 9 et 10). Voir le texte pour plus de détails.

Il n’est pas étonnant de retrouver le L. cariosa dans le Saint-Jean, puisque cette rivière fait partie de l’aire de répartition générale de l’espèce et que cette dernière habite dans plusieurs bassins voisins, comme ceux des rivières Mattawamkeag et Penobscot, au Maine (Nedeau et al., 2000). Pourtant, les malacologues du 20e siècle ont négligé une mention ancienne de la présence de la lampsile jaune au Nouveau-Brunswick. Matthew et Stead (1903) ont écrit que la lampsile jaune était présente dans le Grand Lac et ailleurs dans la province. Cette observation est confirmée par des spécimens anciens découverts récemment lors de la préparation d’une base de données pour la collection de mollusques du Musée du Nouveau-Brunswick comprenant des spécimens récoltés au lac Darlings, sur la rivière Kennebecasis, probablement entre 1895 et 1900, et dans la crique Coal, au Grand Lac, par W. D. Matthew, peut-être autour de 1900. Il est donc prouvé qu’on connaît depuis longtemps l’existence de populations de L. cariosa au Nouveau-Brunswick, même si cette information a été largement négligée.

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