Limace-prophyse bleu-gris (Prophysaon coeruleum) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 5

Rapport de situation du COSEPAC
sur la
Limace-prophyse bleu-gris
Prophysaon coeruleum
au Canada
2006

Information sur l'espèce

Nom et classification

La limace-prophyse bleu-gris (Prophysaon cœruleum Cockerell, 1890) appartient à la grande famille cosmopolite des Arionidés. Le genre Prophysaon, endémique de l’ouest de l’Amérique du Nord, regroupe neuf espèces décrites réparties entre deux sous-genres : le sous-genre Mimetarion, auquel appartiennent le P. vanattae, le P. obscurum, le P. fasciatum et le P. humile, et le sous-genre Prophysaon, qui comprend le P. andersoni, le P. boreale, le P. cœruleum, le P. dubium et le P. foliolatum. Le genre Prophysaon se distingue des autres Arionidés présents en Amérique du Nord par son pénis très réduit, son épiphallus spécialisé et sa faculté de s’amputer de sa queue (autotomie) (Pilsbry, 1948). D’autres caractères de l’appareil génital séparent les deux sous-genres.

Le Prophysaon cœruleum a été décrit à partir de spécimens provenant de l’État de Washington, où la localité type se trouve à Olympia. Voici la classification complète de l’espèce : embranchement : Mollusca; classe : Gastropoda; sous-classe : Orthogastropoda; ordre : Pulmonata; sous-ordre : Eupulmonata; infraordre : Stylommatophora; super-famille : Arionoidea; famille : Arionidae; genre :Prophysaon; sous-genre : Prophysaon; espèce : Prophysaon cœruleum.


Description morphologique

Le Prophysaon cœruleum est une limace de taille petite à moyenne; en extension, l’adulte peut atteindre environ 45 mm de longueur (Kelley et al., 1999). Le corps est mince et effilé. La queue n’est pas carénée. Le manteau est grand, couvrant environ le tiers de la longueur totale de l’animal. Le pneumostome (orifice de la cavité respiratoire) est situé sur le côté droit de l’animal, légèrement en avant du milieu de la marge du manteau. Les caractères morphologiques externes permettant de reconnaître l’espèce sont sa coloration uniforme bleu-gris, sans stries dorsales ou latérales, ainsi que les sillons et les crêtes parallèles qui ornent le dessus et les côtés du pied (figure 1; Pilsbry, 1948; Kelley et al., 1999). Le bord du pied est étroit, avec une marge différenciée. Les spécimens découverts en Colombie-Britannique étaient gris-bleu moyen avec de petits points plus pâles, sauf deux, observés tard à l’automne, qui n’avaient pas de points pâles. Chez les spécimens des États-Unis, le dos et les flancs sont bleus ou gris-bleu très pâle, parfois blancs, à bleus ou bleu-gris très foncé. La sole du pied est gris pâle ou blanche, et le mucus est incolore. On peut généralement distinguer une légère constriction ou dépression oblique à l’endroit où la queue se détache (autotomie) (figure 1, photo du bas).


Figure 1 : Spécimens vivants de la limace-prophyse bleu-gris (Prophysaon cœruleum) provenant de l’île de Vancouver

Figure 1 : Spécimens vivants de la limace-prophyse bleu-gris (Prophysaon cœruleum) provenant de l’île de Vancouver.

Le spécimen du haut provient de Colwood, et celui du bas, de la péninsule Rocky Point. En extension, les deux spécimens mesurent environ 25 mm. Photographies de K. Ovaska.

Comme pour la plupart des limaces, l’anatomie de l’appareil de reproduction est utile pour l’identification du P. cœruleum. Chez le P. cœruleum, l’épiphallus se compose d’une partie distale musculeuse et renflée et d’une partie proximale longue et mince, spiralée à sa jonction avec la partie distale. L’ovotestis est bien développé et comporte de nombreux lobules. La taille du pénis est variable; chez certains individus, elle est presque égale à celle de la région musculeuse de l’épiphallus (Ovaska et al., 2004). Le vagin et le spermoviducte sont longs et étroits. Le P. cœruleum se distingue de toutes les espèces du sous-genre Mimetarion par son épiphallus, très musculeux et brusquement élargi dans sa partie distale (Pilsbry, 1948). À part sa taille plus petite, il se distingue du P. andersoni et du P. foliolatum par son pénis, plus long, et par la région distale de son épiphallus, plus courte et presque sphérique (Pilsbry, 1948). On trouve des illustrations de l’appareil génital du P. cœruleum dans Pilsbry (1948) et dans Ovaska et al. (2004).


Description génétique

Wilke et Duncan (2004) ont étudié la structure génétique du P. cœruleum dans l’ensemble de son aire de répartition, en se fondant sur des marqueurs provenant de deux gènes mitochondriaux. Deux des spécimens à l’étude provenaient de Rocky Point, à l’île de Vancouver (Colombie-Britannique). L’analyse a révélé une structure génétique complexe, et les auteurs ont distingué trois principaux clades probablement vieux d’environ 2,6 à 5,9 millions d’années. À cette structure ancienne se superpose une structure plus récente comprenant huit clades mineurs. Cette dernière remonte à moins de 2 millions d’années et résulte probablement de perturbations survenues lors des glaciations du Pleistocène. Les différences génétiques entre les trois clades anciens sont égales ou supérieures à celles qui séparent les différentes espèces du genre Prophysaon, et la forme actuellement connue sous le nom de Prophysaon cœruleum pourrait en fait être constituée d’un complexe d’espèces cryptiques (Wilke et Duncan, 2004).

La différenciation génétique s’observe principalement dans la partie méridionale de l’aire de répartition de l’espèce, en particulier dans le sud de l’Oregon, dans la région de Klamath (Wilke et Duncan, 2004). La répartition géographique du clade ancien auquel appartient la population de la Colombie-Britannique couvre le sud de l’île de Vancouver et la chaîne des Cascades depuis l’État de Washington jusque dans le centre-sud de l’Oregon. À ce clade appartient également une population isolée de l’Idaho. Ce clade majeur se subdivise en trois clades mineurs : le clade du nord, un petit clade situé dans le centre-sud de l’Oregon, et un clade singulier représenté à la fois dans le sud de l’Oregon et dans le nord de l’Idaho. Les spécimens de la Colombie-Britannique appartiennent au clade mineur du nord, dont on trouve également des représentants dans l’État de Washington et en Oregon. La population de l’île de Vancouver n’est donc pas génétiquement distincte.

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