Couleuvre d'eau du lac Érié évaluation et mise à jour du rapport de situation du COSEPAC : chapitre 5

Habitat

Besoins en matière d’habitat

Durant la saison active, la couleuvre d’eau du lac Érié a besoin d’un habitat particulier pour se nourrir, s’exposer au soleil, exécuter sa parade nuptiale, s’accoupler et mettre bas; elle a aussi besoin d’un habitat convenable pour hiberner. L’habitat estival essentiel est constitué de rivages rocheux, de plateformes ou de corniches de calcaire ou de dolomite fissurées et peu végétalisées (King, 1987; idem, 1989; USFWS, 2003); au Canada, il englobe également des zones sableuses jonchées de débris ou parsemées de végétation, de même que des plages et des talus de galets (D. Jacobs, comm. pers., juin 2005). La couleuvre d’eau du lac Érié fréquente également les secteurs de gravier, de sable nu et/ou de roche-mère exposée (King; idem, 1986; idem, 1989; NatureServe, 2005). Les plantes, les roches et les plateformes de calcaire lui fournissent des lieux pour se cacher; le choix de ces structures se fait en fonction de la densité de la végétation, de leur proximité du rivage et de la présence de lieux où s’exposer au soleil (USFWS, 2003). Les troncs d’arbre et les débris laissés par les gens (p. ex. feuilles de tôle, cartons, etc.) peuvent aussi lui servir d’abri (M.J. Oldham, comm. pers., octobre 2005).

Quel que soit l’habitat, King (1986, 2003) signale que 75 p. 100 des observations de couleuvres d’eau du lac Érié se font à moins de 13 m du bord de l’eau dans les îles de l’Ohio. La couleuvre utilise un habitat riverain semblable dans les îles Sister East, Middle et Pelée, en Ontario, bien que cette dernière île, contrairement aux autres, comporte des plages sableuses, moins attrayantes pour l’espèce que les rivages rocheux (D. Jacobs, comm. pers., septembre 2005). La distance réelle du bord de l’eau dépend toutefois davantage de la présence d’un couvert (végétation ou débris au sol) que de la distance proprement dite (D. Jacobs, comm. pers., novembre 2004). Quoi qu’il en soit, l’espèce se rencontre rarement à plus de 100 m à l’intérieur des terres (King, 2003). La présence de proies, de prédateurs et de lieux pour s’exposer au soleil et se réfugier ont une incidence sur l’utilisation que fait la couleuvre des portions intérieures des îles (USFWS, 2003; King, 2004a). Quelques individus utilisent les étangs et les milieux humides de l’intérieur, de même que les carrières inondées et les fossés de drainage durant la saison active estivale. (M.J. Oldham, comm. pers., octobre 2005).

Tendances en matière d’habitat

L’intérieur des terres, peu utilisé durant la saison estivale active, est toutefois important pour l’hibernation (King, 1998; idem, 2003; D. Jacobs, comm. pers., novembre 2004), ce qui indique que la couleuvre d’eau du lac Érié exploite tout l’éventail des milieux offerts par les îles et que tous les endroits sont susceptibles de lui servir d’habitat (King, 1998; idem, 2003). L’aménagement accru des rivages (construction de maisons, aménagement de routes, de quais, de marinas et d’ouvrages de protection contre l’érosion) constitue une menace pour la survie de l’espèce (USFWS, 2003). Si la couleuvre utilise parfois certaines structures artificielles, elle en évite d’autres (comme les quais de tôles d’acier et les ouvrages de contrôle de l’érosion en béton coulé), ce qui diminue la superficie d’habitat qui lui convient (USFWS, 2003). Il lui arrive aussi parfois de s’adapter à certains aménagements humains, mais elle n’en est pas moins proportionnellement plus abondante dans les zones plus végétalisées, selon les observations de King (1998). Comme ces sites comportaient relativement moins de substrats de gravier, de sable et de terre nue, et davantage de débris, il semble que l’espèce préfère les emplacements offrant un meilleur couvert riverain et que les endroits moins perturbés par les humains lui plaisent davantage (King, 1998).

Protection et propriété

En 1991, la couleuvre d’eau du lac Érié a été ajoutée aux espèces relevant de la Loi sur espèces en voie de disparition de l’Ontario, qui protège l’habitat des espèces contre la destruction ou l’interférence. En vertu du Programme d'encouragement fiscal pour les terres protégées, le ministère des Richesses naturelles de l’Ontario (MRNO) offre un remboursement de taxe aux propriétaires qui possèdent des terres abritant au moins 0,2 ha d’habitat d’espèces en voie de disparition (comme l’habitat riverain de la couleuvre d’eau du lac Érié) (MRNO, 2004; D. Jacobs, comm. pers., septembre 2005). En 1999, la Société canadienne pour la conservation de la nature a fait l’acquisition de l’île Middle (15 ha) et, en 2001, en a transféré les titres à Parcs Canada, qui a intégré l’île au parc national de la Pointe-Pelée (l’île est maintenant gérée comme une zone 1 – aire de préservation spéciale, le degré de protection le plus élevé conféré par le système des parcs nationaux) (D. Jacobs, comm. pers., septembre 2005, V. McKay, comm. pers., octobre 2005). L’île Sister East est également protégée à titre de réserve naturelle provinciale (D. Jacobs, comm. pers., septembre 2005).

L’île Pelée renferme trois réserves naturelles : les réserves de la Pointe Fish et de la Pointe Lighthouse (totalisant 114 ha), établies et gérées par le ministère des Richesses naturelles de l’Ontario, et la réserve de Stone Road Alvar, propriété de la Société canadienne pour la conservation de la nature, d’Ontario Nature et de l’Office de protection de la nature de la région d’Essex. Une petite portion de la pointe Mill (1,5-2 km d’habitat riverain) est également protégée par l’Office et par Ontario Nature (B. Porchuk, comm. pers., novembre 2004; D. Jacobs, comm. pers., septembre 2005).

D’autres îles et habitats insulaires jugés essentiels pour la couleuvre d’eau du lac Érié et appartenant à des intérêts privés sont zonés en vue de la protection de l’environnement, mais l’expérience a montré que le fait de conférer une protection juridique à un habitat freine souvent la collaboration des propriétaires, qui interdisent aux chercheurs d’accéder à leurs terrains (USFWS, 1999; King, 2004a). Ainsi, en 2003, des scientifiques du MRNO voulaient confirmer la présence ou l’absence de la couleuvre d’eau du lac Érié sur trois îles canadiennes privées (Hen, Middle Sister et North Harbour), mais se sont vus refuser l’accès à ces îles par les propriétaires (dans un cas, le refus était dû expressément à la crainte d’une restriction éventuelle des activités) (D. Jacobs, comm. pers., septembre 2005).

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