Physe des fontaines de Ban (Physella johnsoni) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 9

Taille et tendances des populations

Activités de recherche

Il n’existe aucune estimation des populations historiques, car les quelques personnes qui ont récolté des physes jusqu’en 1996 (voir la section Répartition) n’ont effectué aucun dénombrement.

Mis en œuvre en janvier 1996, le programme de recherche et de rétablissement concernant la physe des fontaines de Banff comportait un certain nombre d’objectifs, dont celui de déterminer la répartition et l’abondance de l’espèce. Les sources thermales ayant déjà abrité l’espèce dans le passé (Clench, 1926; Clarke, 1973, 1977, 1981) ont été visitées de façon systématique et périodique, et des recherches visuelles de l’espèce y ont été effectuées selon des protocoles rigoureux. Les sources thermales et les exutoires ont été découpés en sections ou microsites à l’aide de cartes tracées au moyen d’une boussole et d’un ruban à mesurer. Les microsites ont été distingués sur la base de caractéristiques géomorphologiques locales, à une échelle de moins de un mètre. Au cours des inspections visuelles, menées au besoin sous l’éclairage d’une lampe frontale, des précautions ont été prises pour ne pas perturber le substrat. Un compteur manuel a facilité les dénombrements. Certains microsites n’ont jamais été examinés en raison de leur inaccessibilité (p. ex. secteurs adjacents à des parois de falaise, sections de chutes abruptes, conduites acheminant l’eau au LHNC&B, sections situées sous des promenades). Depuis janvier 1997, les bassins d’origine et les exutoires des sources où l’espèce n’a pas été observée en 1996 ne font plus l’objet d’un examen rigoureux, sauf aux endroits où les paramètres physicochimiques de l’eau sont mesurés. Entre janvier 1996 et juillet 2000, les relevés réguliers ont été effectués une fois par trois semaines. Depuis, ils sont réalisés aux quatre semaines (Lepitzki, 2000c).

Comme les dénombrements ont tous été effectués par la même personne (D.A.W. Lepitzki) et selon le même protocole adopté en janvier 1996, les résultats des dénombrements devraient être non biaisés et comparables. À l’évidence, un certain nombre de physes échappent à l’attention de l’observateur au cours des dénombrements. En conséquence, les estimations des populations doivent être considérées comme minimales. Des dénombrements répétés ont été effectués durant 5 jours consécutifs en septembre 1996 (Lepitzki, 1997b) afin d’établir la précision (ou la répétabilité) des dénombrements. Les résultats ont varié d’une journée à l’autre (117, 131, 156, 98 et 123), le nombre moyen de physes dénombrées s’établissant à 125± 9,5 (ETM) (IC à 95 p. 100 :± 26,4). Malheureusement, des perturbations engendrées dues à des baignades interdites ont peut-être faussé les résultats. Si l’on ajoute aux résultats une erreur de ± 10 p. 100, les valeurs obtenues au cours de 86 p. 100 et 96 p. 100 des dénombrements additionnels effectués chaque semaine aux 2 sites où l’espèce a été réintroduite (après le déclin initial, voir la section suivante, source Kidney n=28 et source Upper Middle n=24, respectivement) sont comprises à l’intérieur des valeurs obtenues au cours des relevés effectués aux 4 semaines. Ces résultats témoignent de la précision des dénombrements visuels.


Abondance, fluctuations et tendances

Les résultats des dénombrements effectués toutes les 3 semaines puis toutes les 4 semaines à chaque source thermale et à toutes les sources combinées de janvier 1996 à mai 2007 sont présentés à la figure 11. Bien que ces résultats correspondent aux nombres totaux de physes observées au cours des dénombrements, ils peuvent être interprétés comme des estimations du nombre de physes matures observées, car les physes de plus grande taille sont plus faciles à voir, et il a été démontré que les physes peuvent se reproduire dès que leur coquille atteint 3 mm (voir la sous-section Cycle vital et reproduction).

La réintroduction des sous-populations dans les sources Upper Middle et Kidney a été réalisée d’après les orientations fournies dans le plan de gestion des ressources approuvé par Parcs Canada (Lepitzki et al., 2002b), l’évaluation environnementale (Lepitzki et Pacas, 2001) et les réévaluations subséquentes (Lepitzki et Pacas, 2002, 2003). Cinquante individus ont été transférés de la source Lower Middle à la source Upper Middle en novembre 2002; et 50 autres individus (25 de la source Upper Middle et 25 de la source Lower Middle) ont subséquemment été introduits à la source Kidney, en novembre 2003. Après avoir chuté à respectivement 16 et 8 individus dans les 3 et 2 semaines qui ont suivi leur réintroduction, les 2 sous-populations semblent s’être rétablies et paraissent autosuffisantes (figure 11).

La sous-population de la source Basin a également été augmentée, conformément aux orientations fournies dans l’évaluation environnementale approuvée par Parcs Canada (Lepitzki, 2005) et dans le permis (BA-2005-859) délivré à D.A.W. Lepitzki en vertu de la Loi sur les espèces en péril. Lorsque le projet d’élevage de physes en captivité a pris fin, entre le 8 décembre 2005 et le 13 février 2006, 7 345 physes ont été introduites dans les tronçons supérieurs de l’exutoire de la source Basin. L’ajout de ces individus explique le pic d’abondance sans précédent enregistré au cours du dernier dénombrement de 2005 (figure 11). Comme il a déjà été mentionné, l’efficacité des mesures prises pour améliorer cet habitat et augmenter cette sous-population (voir la sous-section Adaptabilité) continue de faire l’objet d’un suivi rigoureux.


Figure 11 : Nombre de Physella johnsoni dans chaque source thermale et dans les sept sources combinées, de janvier 1996 à mai 2007

Figure 11. Nombre de Physella johnsoni dans chaque source thermale et dans les sept sources combinées, de janvier 1996 à mai 2007.

Les sous-populations réintroduites aux sources Upper Middle et Kidney et la population augmentée à l’exutoire de la source Basin sont incluses. Les relevés de population ont été réalisés une fois par trois semaines jusqu’en août 2000, et une fois par quatre semaines par la suite.

Les sous-populations de la physe des fontaines de Banff subissent normalement d’importantes fluctuations annuelles, qui peuvent excéder deux ordres de grandeur. Elles atteignent leur niveau le plus bas en été, et leur niveau le plus élevé à la fin de l’hiver (figure 11). Ces fluctuations saisonnières sont exactement à l’opposé de celles observées chez d’autres espèces nord-américaines de Physidés. Par exemple, les densités maximales sont observées en août et septembre au Michigan chez le P. integra (Clampitt, 1974), et en juin et juillet au Manitoba chez le P. gyrina (Pip et Stewart, 1976). Une limitation générale de ces études découle de l’impossibilité d’échantillonner les populations de ces espèces durant toute l’année à cause de la glace en hiver. Même s’ils n’ont pas échantillonné la population de P. gyrina sous la glace dans leur zone d’étude, Sankurathri et Holmes (1976) sont parvenus à poursuivre les échantillonnages durant toute l’année dans un secteur expérimental d’un lac situé près d’Edmonton (Alberta). Ces auteurs ont constaté que même s’il se reproduisait durant toute l’année dans le secteur expérimental du lac, le P. gyrina atteignait son abondance maximale au cours de l’été.

Les causes des fluctuations annuelles de la population de P. johsnoni demeurent incertaines, mais elles pourraient être liées à la disponibilité de la nourriture et/ou à la dynamique saisonnière des écosystèmes des sources thermales (Lepitzki, 2002b).

Les tailles minimales et maximales de chacune des sous-populations (incluant les 2 sous-populations réintroduites) au cours des 10+ dernières années (de janvier 1996 à mai 2007) sont présentées au tableau 1. Les droites de régression linéaire de l’effectif annuel minimum, maximum et moyen de chacune des sous-populations (excluant les sous-populations réintroduites) et de toutes les sous-populations combinées (incluant les sous-populations réintroduites) de 1996 à 2005 sont présentées à la figure 12. En raison de l’ampleur des fluctuations enregistrées d’une année à l’autre, aucune de ces régressions n’était significative (P < 0,05), sauf pour la hausse significative de l’effectif annuel maximum de la sous-population de la source Lower Middle et des effectifs annuels minimum et moyen de la sous-population de la source Basin (figure 12). Lorsque les 5 sous-populations initiales sont combinées, une augmentation significative de l’effectif annuel minimum est également apparente. Des hausses hautement significatives (P≤0,005) des effectifs annuels minimum, maximum et moyen sont observées seulement après ajout des 2 sous-populations réintroduites aux 5 sous-populations initiales.


Figure 12 : Effectif annuel minimum, maximum et moyen de chaque sous-population (à l’exception des sous-populations des sources Upper Middle et Kidney), des cinq sous-populations initiales combinées et de toutes les sous-populations, incluant les sous-populations réintroduites dans les sources Upper Middle et Kidney, de 1996 à 2005

Figure 12. Effectif annuel minimum, maximum et moyen de chaque sous-population (à l’exception des sous-populations des sources Upper Middle et Kidney), des cinq sous-populations initiales combinées et de toutes les sous-populations, incluant les sous-populations réintroduites dans les sources Upper Middle et Kidney, de 1996 à 2005.

On donne les droites de régression linéaire avec leurs intervalles de confiance à 95 %, ainsi que les coefficients de corrélation au carré et les valeurs de P pour les analyses de variance (test F).

Tischendorf (2003) a modélisé l’évolution des 5 sous-populations initiales en utilisant les données des dénombrements menés de 1996 à 2002 (7 ans). Les paramètres pour les modèles de population RAMAS GIS ont été extraits et estimés à partir des analyses des séries chronologiques. Mille simulations répétées ont été utilisées pour estimer les risques de disparition du pays des sous-populations et de disparition de l’espèce sur une période de 40 ans. Bien que les risques de disparition de la population augmentent en fonction du temps, fort probablement du fait d’événements stochastiques (Tischendorf, 2003), le risque de disparition pour chaque sous-population sur une période de dix ans était faible (≤ ~ 7,5 p. 100). Après 40 ans, les risques de disparition s’établissaient à environ 4 p. 100 pour la sous-population de la source Basin, et à 3 p. 100 pour la sous-population de la source Upper C&B. Toutefois, pour cette même période, les risques pour les sous-populations des sources Cave, Lower C&B et Lower Middle s’élevaient à environ 21 p. 100, environ 29 p. 100 et environ 27 p. 100, respectivement (Tischendorf, 2003). Pour les 5 sous-populations combinées, le risque de disparition était nul après 40 ans. Bien que ces estimations soient les meilleures que l’on puisse proposer au vu des connaissances actuelles de la biologie, du cycle vital et des besoins de l’espèce en matière d’habitat, bien des incertitudes persistent au sujet des paramètres démographiques de l’espèce, en particulier sa fécondité et ses taux de survie et de dispersion, ces valeurs absolues devant être interprétées avec prudence (Tischendorf, 2003).


Effet d’une immigration de source externe

Le fait que la physe des fontaines de Banff soit endémique à certaines sources thermales du Parc national du Canada Banff exclut toute possibilité d’immigration de source externe.

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