Dard vert (Etheostoma blennioides) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 3

Information sur l'espèce

Nom et classification

Quatre sous-espèces de dards verts ont été décrites (Miller, 1968). L’une d’elles, l'Etheostoma blennioides gutselli, qui est présente dans les bassins hydrographiques des rivières Little Tennessee et Pigeon, dans l'est du Tennessee, a récemment été élevée au rang d'espèce sous le nom anglais de Tuckasegee darter (Etheostoma gutselli) (Nelson et al., 2004). Des trois autres sous-espèces, seul l'Etheostoma blennioides pholidotum est présent au Canada (Miller, 1968).

Description morphologique

Le genre Etheostoma est celui qui compte le plus grand nombre et la plus grande diversité d’espèces de poissons en Amérique du Nord, soit 131 espèces actuellement reconnues (Nelson et al., 2004). Le Canada compte sept espèces du genre Etheostoma. Le dard vert est le seul à appartenir au sous-genre Etheostoma, qui se caractérise par des yeux hauts placés sur une large tête au museau court et arrondi, des lèvres épaisses, des membranes de branchies largement jointes, de grandes nageoires pectorales arrondies, des canaux sensoriels supratemporels et infraorbitaires complets et un corps dont la couleur prédominante est le vert chez le mâle (Kuehne et Barbour, 1983).

Ce poisson, la plus grosse espèce du genre Etheostoma, peut atteindre 170 mm de longueur (Page et Burr, 1991), mais la majorité des spécimens canadiens mesurent moins de 110 mm et font en moyenne 76 mm de longueur (Scott et Crossman, 1973). Le dard vert a le corps robuste et un museau arrondi (figure 1), qui surplombe parfois légèrement la petite bouche. Bien que le frein prémaxillaire soit inexistant chez l'E. blennioides pholidotum (Page, 1983), les prémaxillaires ne sont pas protractiles parce que la moitié antérieure des maxillaires est fusionnée aux suborbitaux par de la chair et de la peau (Scott et Crossman, 1973; Trautman, 1981). Une bosse symphysaire peut être présente sur la lèvre supérieure. Les membranes des branchies sont largement jointes et ne sont pas attachées à l'isthme. Le dard vert a une ligne latérale complète de 50 à 86 écailles (de 53 à 68 écailles chez l'E. blennioides pholidotum), et, comme d'autres espèces du même genre, il n'a pas de vessie gazeuse (Kuehne et Barbour, 1983). Les nageoires dorsales souples et épineuses sont rapprochées et comprennent respectivement de 12 à 14 épines et de 12 à 14 rayons. La nageoire anale, qui comporte 2 épines et de 7 à 9 rayons, prend son origine sous le point de départ de la nageoire dorsale souple (Miller, 1968; Scott et Crossman, 1973). Les nageoires paires, la nageoire anale et la nageoire dorsale épineuse sont généralement plus grosses chez le mâle que chez la femelle. La nageoire caudale barrée forme une fourche peu profonde. La joue, l'opercule et le ventre sont entièrement couverts d'écailles. Des tubercules sont présents sur la moitié postérieure du ventre des mâles prêts à frayer (Smith, 1985). Les femelles prêtes à frayer ont des papilles urogénitales allongées (Winn, 1958a).

Figure 1. Dard vert mâle, Etheostoma blennioides (dessin d’Anker Odum reproduit à partir de Scott et Crossman, 1973; reproduction autorisée par W. B. Scott).

Figure 1. Dard vert mâle, Etheostoma blennioides (dessin d’Anker Odum reproduit à partir de Scott et Crossman, 1973; reproduction autorisée par W. B. Scott).

Le dard vert figure parmi les poissons les plus colorés des eaux douces canadiennes (figure 2). Son dos est essentiellement vert olive, tandis que ses flancs, de même que ses nageoires pectorales, sa nageoire anale et sa nageoire caudale, sont de couleur vert pâle à vert-jaune (Scott et Crossman, 1973; Jenkins et Burkhead, 1994). Le vert est plus intense chez les mâles reproducteurs, parfois à un point tel que les autres marques ne sont pas visibles. Les nageoires dorsales sont souvent rouges à la base, et elles sont vertes chez le mâle. Le ventre est blanc crème. La partie supérieure de l'animal (au-dessus de la ligne latérale) est mouchetée de brun-rouge. On observe sur le dos du dard vert de cinq à huit bandes carrées vert-brun qui ne se prolongent pas très loin sur les côtés et qui sont souvent obscurcies chez les individus plus gros et plus colorés. Les flancs portent de cinq à dix grosses marques brun olive en forme de V (elles peuvent également prendre la forme de taches, de barres, de U ou de W) qui s’étendent jusqu’en dessous de la ligne latérale (Scott et Crossman, 1973; Trautman, 1981; Kuehne et Barbour, 1983). Il arrive que ces marques latérales soient obscurcies chez les mâles reproducteurs, qui se teintent de vert vif et sur lesquels se forment de quatre à sept bandes verticales vert foncé sur la moitié postérieure du corps (Trautman, 1981). Les femelles sont majoritairement de jaune à jaune-vert (Smith, 1985). Les deux sexes prennent une couleur verte plus intense lorsque la température de l'eau refroidit à l'automne, et ils gardent cette couleur jusqu'à la fin de la fraye au printemps (Fahy, 1954; Smith, 1979).La fusion de la lèvre supérieure au côté du museau est unique en son genre et permet de distinguer le dard vert de toutes les autres espèces canadiennes de dards. La couleur verte et les marques latérales en forme de V sont également distinctives. Même s’il arrive souvent que les juvéniles ne soient pas verts, leur lèvre supérieure fusionnée et leurs marques latérales permettent de les distinguer des juvéniles d'autres espèces. Les très petits dards verts sont souvent pris pour des raseux-de-terre (Etheostoma nigrum), lesquels sont similaires sur les plans de la forme et de la couleur (Trautman, 1981). Baker (1979) a décrit en détail le développement larvaire du dard vert.

Figure 2. Dard vert mâle, Etheostoma blennioides, de la rivière Conestogo, bassin hydrographique de la rivière Grand, capturé en juillet 2002 (photo : Jason Barnucz, Pêches et Océans Canada, Burlington, Ontario).

Figure 2. Dard vert mâle, Etheostoma blennioides, de la rivière Conestogo, bassin hydrographique de la rivière Grand, capturé en juillet 2002 (photo : Jason Barnucz, Pêches et Océans Canada, Burlington, Ontario).

Description génétique

Aucune étude génétique n'a été réalisée sur les populations canadiennes de dards verts, mais des travaux ont été amorcés sur le sujet à la University of Windsor (N. E. Mandrak, communication personnelle, 2005). Le flux génétique entre certains bassins hydrographiques canadiens, et peut-être à l’intérieur d’un même bassin, est probablement limité, mais cette question n'a pas été approfondie. Le flux génétique entre les populations de certaines parties de l'aire de répartition américaine a été étudié par électrophorèse des allozymes. Heithaus et Laushman (1997) ont découvert que les variations génétiques étaient grandes au sein des populations de dards verts des cours d'eau de l'Ohio et que le flux génétique entre les populations était faible. Des variations génétiques plus faibles ont été observées dans le réseau hydrographique pollué de la rivière Huron. Faber et White (2000) ont pour leur part observé de grandes variations génétiques au sein des populations de dards verts de deux affluents de la rivière Ohio. Turner et Trexler (1998) ont noté un flux génétique plus grand entre les populations de dards verts des régions de la rivière Ohio et de la rivière Ouachita (Missouri et Oklahoma) qu'entre les populations de la région de la rivière Ozark (Missouri et Arkansas). Une analyse phylogénétique de 26 espèces de dards par électrophorèse des allozymes a confirmé le classement du dard vert dans le sous-genre Etheostoma (Wood et Mayden, 1997).

Unités désignables

Toutes les populations canadiennes occupent l’écozone des Grands Lacs et de l’ouest du Saint-Laurent. Aucune distinction entre les populations de cette région ne justifie la création d'unités désignables inférieures au niveau d'espèce.

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